mercredi 3 février 2010 par Le Nouveau Réveil

C'est une circulaire qui traduit, d'une part, l'exaspération du ministre de la Justice et des droits de l'homme face aux incursions répétées et incontrôlées du ministre de l'Intérieur dans le processus électoral et, d'autre part, la volonté de faire échec aux tentatives de fraude et de radiation d'électeurs régulièrement inscrites sur le fichier électoral. Le ministre Koné Mamadou a décidé simplement de prendre ses responsabilités. On est au bord d'une crise gouvernementale pour ne pas dire d'un bras de fer Gbagbo-Soro via Tagro-Koné Mamadou.

Dans une situation normale, c'est une affaire qui aurait pu se régler en interne, c'est-à-dire, au sein même du gouvernement afin d'éviter que des ministres de la République n'affichent leurs divergences à l'extérieur ou au grand jour. Cela ne fait pas bonne impression pour un gouvernement de sortie de crise.

Mais force est de constater que dans le cas d'espèce, Tagro Désiré ne laisse pas le choix à ses collègues. Il multiplie les actes solitaires, outrepasse ses pouvoirs, contrarie le Premier ministre, empiète sur les attributions de ses collègues. Bref, Tagro en fait un peu trop et jusque-là, les rappels à l'ordre, les interpellations n'ont pu le faire fléchir, véritablement. Au vu et au su de tout le monde, il pose des actes qui sont fort dommageables au processus de sortie de crise.

La semaine dernière, c'est la primature qui l'interpellait publiquement et le désavouait suite à sa décision de rouvrir le contentieux électoral et de confier cette opération au corps préfectoral.

Aujourd'hui, c'est le garde des Sceaux, ministre de la Justice et des droits de l'homme qui monte au créneau pour indirectement rappeler à l'ordre Tagro et le camp présidentiel.

En effet, depuis quelques jours, dans le cadre du contentieux sur la liste électorale, l'on découvre avec surprise que le Fpi a fait établir des listes de milliers d'Ivoiriens inscrits sur la liste électorale dont il demande la radiation. L'on constate en outre avec effroi que les personnes visées par ces radiations collectives sont issues du Nord ou du Nord-est. Il s'agit des Malinkés et des Lobis.

Le ministre de la Justice rappelle aux magistrats que le recours devant le tribunal ne peut se faire que si l'on satisfait à une démarche préalable, à savoir la saisine de la Cei. En clair, la demande d'inscription ou de radiation d'une personne sur la liste électorale n'est recevable que si et seulement si le requérant fournit la preuve qu'il a préalablement saisi la Cei et que celle-ci a rejeté ladite requête en radiation ou d'ajout sur la liste électorale.

Tagro désavoué
En matière pénale, le ministre de la Justice rappelle une disposition spéciale qui a été prise dans le cadre de la future élection présidentielle. Il s'agit de l'ordonnance du 14 avril 2008 qui précise en son article 41 alinéa 6 que seuls sont compétents pour saisir le procureur de la République, la Commission Electorale Indépendante (Cei) et tout candidat déclaré à l'élection présidentielle.

En clair, cela veut faire que le ministre de l'intérieur n'est pas fondé, au regard de l'ordonnance suscité, à instruire le procureur d'ouvrir une enquête contre la Cei. Il ne peut le faire parce qu'il n'est pas candidat et parce qu'il n'est pas la Cei.

La procédure initiée par Tagro contre la Cei et son président est donc illégale. C'est pourquoi, le ministre Koné Mamadou demande aux responsables de parquet de ne pas se prêter au jeu. Une procédure dont le seul objectif est de mettre en difficulté la Cei et de retarder les élections. Car depuis que cette affaire a commencé, on ne parle plus d'élection février début Mars. Hier, nous apprenons que les noms des informaticiens de la Cei et du Secrétaire général de la Cei ont été affichés dans tous les commissariats et sont activement recherchés.

Nous avons également appris de sources proches de la police judiciaire que les collaborateurs de Tagro veulent entendre le président de la Cei, M. Beugré Mambé dans le cadre de cette enquête illégale. En tout état de cause, pour qui connaît la proximité des liens qui unissent d'une part le ministre Tagro à Laurent Gbagbo et d'autre part le ministre Koné Mamadou à Soro, l'on peut affirmer que cette affaire a franchi un nouveau palier depuis le 29 janvier. Car autant Tagro ne peut agir sans l'aval de Gbagbo autant Koné Mamadou ne peut donner de telles instructions sans l'avis favorable de Guillaume Soro.

Les jours du gouvernement sont-ils comptés ?

Akwaba Saint Clair

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