jeudi 12 novembre 2009 par Le Temps

Dans cette interview, l'ex-international ivoirien Badra Aliou Siby parle, sans détour, des chances des Eléphants à la Can et au Mondial 2010, de Vahid, de l'Asec, de la crise qui secoue l'Africa, de la gestion de Jacques Anouma etc.

Que devient Badra après avoir rangé les crampons ?
Badra est là. Il se porte bien. Il mène bien sa vie et s'occupe de ses activités d'après football.

Que faites-vous réellement après le football ?
Je m'occupe de (il hésite un instant) de mes affaires. Mais souffrez que je n'en parle pas dans vos colonnes. Toutefois, soyez rassuré que je m'occupe bien dans des domaines bien précis (il rit).

Comme nombreux de vos camarades, notamment Alain Gouaméné, Lucien Kassy Kouadio et autres Maxime Gouaméné, pourquoi n'avez-vous pas opté pour une carrière d'entraîneur ?
Chacun à sa vision de la chose. Si nous devenons tous entraîneurs ou encadreurs, il nous sera difficile de faire de la place à d'autres. C'est pourquoi, moi, j'ai choisi de faire autre chose. Après avoir rendu service au football ivoirien qui m'en a également rendu, j'ai décidé d'emprunter un autre chemin dans la vie.

Quels ont été vos moments de joie et de tristesse dans votre carrière de footballeur ?
Dans la vie, il y a des hauts et des bas. Les bons moments, j'en ai eu énormément ; et tout naturellement les moins bons aussi. Mais j'avoue que j'ai été très content d'évoluer dans une grande équipe ivoirienne et africaine, à savoir l'Asec. Je n'oublierai jamais l'année 1995 où nous n'avons pas remporté la Ligue des Champions au Félicia face à Orlando Pirates d'Afrique du Sud. Ma joie était donc plus grande quand nous l'avons remportée en 1998. Et aussi et surtout mon passage en sélection nationale où j'ai défendu le drapeau de mon pays, la Côte d'Ivoire. Malheureusement, nous n'avons pas pu participer à un Mondial comme nous l'avions tant souhaité. Mais fort heureusement, nos cadets de la sélection actuelle, après Allemagne 2006, sont encore qualifiés pour Afrique du Sud 2010. Et personnellement, cela me va droit au c?ur.

Justement, parlant des Eléphants séniors, quelles différences y a-t-il entre votre génération et celle d'aujourd'hui avec comme tête de file Didier Drogba ?
J'estime qu'il n'y a pas de différence fondamentale. C'est la continuité. A notre époque, nous avions, nous aussi, de grands talents comme Aboulaye Traoré, Gadji Celi St Joseph etc. Ils ont remporté la Can Sénégal 1992. Aujourd'hui, d'autres ont pris le relais. C'est en cela que je dis que c'est une continuité.

Comment expliquez-vous le fait que cette génération dorée avec les Kolo, Baki, Maestro, Drogba et consorts n'arrivent pas offrir à la Côte d'Ivoire sa 2e Can ?
Comme vous le savez, ils sont tous doués et sont, dans leur grande majorité, titulaires dans leurs clubs respectifs, dans les plus grands championnats européens. Mais ils manquent de chance. C'est le moment qui n'est pas encore, arrivé. Ils en ont la possibilité. Ils ont même discuté une finale à Egypte 2006. Cette année encore ils font partie des favoris et je suis certain que cette fois sera la bonne. Ils n'ont pas usurpé leurs participations du Mondial 2006 et même du prochain qui va se dérouler en Afrique du Sud, l'an prochain. C'est pourquoi, il faut continuer de les encourager. Tout le monde doit faire bloc autour d'eux à la veille de ces grands rendez-vous.

A propos de la Can et du Mondial 2010, quelles sont les chances des Eléphants ?
Actuellement en Afrique, la Côte d'Ivoire est crainte comme le Brésil dans le monde. Nous avons tous les atouts pour remporter la Can et aller très loin dans le Mondial. Ils ont 90 voire 95 % de chance de nous ramener la Can Angola 2010. Concernant la Coupe du Monde, sur le plan de la qualité intrinsèque, sur le plan technique et même tactique, nos joueurs n'ont rien à envier aux Européens. Ils jouent même mieux qu'eux. La différence se fera au niveau du mental. Mais je pense qu'ils se donneront à fond pour faire un bon Mondial. Dieu fera le reste.

Avez-vous des relations avec les joueurs de l'équipe nationale de Côte d'Ivoire ?
Oui, bien sûr. Ce sont des relations d'aînés et de cadets. Quand l'occasion se présente, je leur prodigue des conseils. Quand ils sont à Abidjan, nous nous cotoyons bien. Ils ont tous de la considération pour moi. Je prie le Tout-Puissant pour qu'il leur donne beaucoup de courage et de réussite dans leurs carrières respectives.

Etes-vous d'avis avec ceux qui estiment que Vahid n'a pas le coffre pour coacher les Eléphants ?
Non. Je ne partage pas ce point de vue parce qu'il a fait ses preuves tout au long des éliminatoires Can-Mondial 2010. Il s'est même qualifié pour le Mondial avant la fin des éliminatoires. Il faut le laisser aller jusqu'au bout. Tout le monde doit faire bloc autour de lui à la veille de ces 2 grandes compétitions.

Quelles sont vos relations avec le président Roger Ouégnin de l'Asec où vous avez évolué pendant longtemps ?
Il a beaucoup d'estime pour moi et vice versa. C'est pour matérialiser cela qu'il m'a nommé comme chargé de mission à ses côtés. Je profite de votre micro pour lui traduire, une fois de plus, ma reconnaissance. C'est un père pour moi. Je lui rends visite très souvent. Je le félicite et je lui souhaite beaucoup de courage pour tout ce qu'il fait depuis qu'il est à la tête de l'Asec depuis maintenant 20 ans. Que Dieu soit avec lui pour lui permettre de construire encore longtemps l'Asec.

L'Asec vient de remporter, avant terme, le titre 2009 après 2 ans de règne de l'Africa. Quels commentaires en faites-vous ?
(Il rit) Vous savez tout comme moi qu'un grand club ne meurt jamais. Surtout quand ce club est dirigé par un grand homme comme Me Roger Ouégnin. Il sait réagir au bon moment. Il a mis tous les moyens pour reprendre le titre. Il a tout simplement prouvé qu'en Côte d'Ivoire, la plus grande équipe, c'est l'Asec. Il y a presque 10 points entre lui et le champion en titre, c'est formidable.

Pensez-vous aussi que c'est l'?uvre du nouvel entraîneur Maxime Gouaméné et son adjoint Lucien Kassy Kouadio ?
Maxime est un garçon très intelligent. Il en est de même pour Lucien. Ils sont tous les 2 des fruits de la maison. Ils ont démontré que les techniciens ivoiriens sont bons. Je leur tire mon chapeau.

Qu'est-ce qui a milité fondamentalement en leur faveur ?
C'est le travail, la rigueur et le franc-parler. Gouaméné avait aligné les joueurs qu'il faut à chaque match. En plus, il a une belle vision du jeu.

Pensez-vous que l'équipe de l'Asec a les joueurs qu'il faut pour une bonne campagne en Ligue des Champions, l'an prochain ?
Me Roger Ouégnin qui est l'un des plus grands dirigeants africains mettra tout en ?uvre pour que l'Asec aille le plus loin possible. J'en suis convaincu. Il saura s'y prendre. Il prendra les mesures adéquates avant le début de cette compétition qui réunit les meilleures équipes africaines. Mais je suis persuadé que l'Asec ira au-delà du premier tour.

Malgré 2 titres remportés par le président Narcisse Kuyo, les vieux démons sont de retour à l'Africa. Que pensez-vous de cette énième crise qui secoue les Vert et Rouge ?
Je suis vraiment mal placé pour parler de ces troubles qui secouent l'Africa. Je ne fréquente pas l'équipe. Vous comprenez donc que je ne peux pas me prononcer de façon objective sur cette crise. Je souhaite tout simplement que l'entente revienne au sein de la grande famille de l'Africa.

Après votre génération, le public fait défection, de plus en plus, sur les stades. Comment expliquez-vous cela? Et que préconisez-vous pour y remédier ?
Quand l'équipe nationale joue, le " Félicia " est toujours plein. C'est parce que les joueurs qui y jouent sont tous talentueux. Tout le monde se bouscule pour aller les voir jouer après les avoir vus évoluer dans leurs clubs à la télé. Au plan local, il y a moins de talents. Cela est dû au fait que les joueurs quittent tôt et très jeunes la Côte d'Ivoire pour embrasser une carrière professionnelle. Ce n'est pas mauvais en soi. Parce qu'on gagne suffisamment sa vie en étant professionnel. Mais le revers, c'est la désaffection du public comme vous le dites. La Fif et les présidents de clubs doivent s'asseoir autour d'une table et y réfléchir pour prendre les dispositions qui s'imposent.

Que pensez-vous de la gestion du président Jacques Anouma depuis qu'il est à la tête de la Fif ?
Le président Jacques Anouma est à féliciter. C'est vrai qu'il n'a pas encore remporté la Can. Mais ce n'est pas de sa faute. Il a mis sur pied une très bonne politique pour gérer les sélections nationales et même les clubs qui ont désormais des subventions encore plus importantes que par le passé. Au niveau des Eléphants séniors, il y met les moyens humains et surtout financiers. Ce qui nous vaut la meilleure équipe en Afrique et 2 participations d'affilée au Mondial. Mais la chance n'est pas avec lui. La Can 2010 sera la bonne.
Interview réalisée par
Eugène Djabia
djabia05664285@yahoo.fr

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