mercredi 21 octobre 2009 par Le Temps

Des véhicules de transport en commun représentent un véritable danger pour la vie des usagers à Abidjan.

"Gbaka", c'est le nom généralement attribué aux minicars de transport en commun d'Abidjan. Ils sont autorisés à desservir les communes d'Abobo, de Bingerville et de Yopougon. Leur existence sur le marché du transport à Abidjan, a été accueillie comme un soulagement par de nombreux usagers, qui refusent d'attendre les autobus tout le temps, bondés de monde. Mais, cette existence est, au fil du temps, devenue un cauchemar pour les Abidjanais et surtout pour les usagers qui n'ont d'autres moyens de déplacement qu'en ces " Gbaka". Chaque matin, la ruée des usagers vers ces minicars a amené leurs propriétaires à augmenter le nombre de leurs véhicules, sur le marché du transport en commun. Mais, la qualité n'a pas suivi cette augmentation souhaitée et appréciée par la population. Ainsi, les transporteurs qui, le plus souvent, sont en même temps des propriétaires de ces Gbaka, n'hésitent pas à mettre en circulation, de véritables épaves roulantes. Avoir une recette journalière importante, est le leitmotiv qui guide les propriétaires. A yopougon où le problème de transport se pose avec acuité, la majorité des "Gbaka" mis en circulation sont en état de déliquescence avancé.

Des cascadeurs comme chauffeurs de Gbaka

Le dimanche 5 juillet dernier, un Gbaka desservant la ligne Adjamé-Gesco, a failli déverser son chargement sur l'autoroute du Nord au niveau de la baie du Banco. Le conducteur du véhicule en question, roulant à vive allure, a effectué un dangereux dépassement pour embarquer un usager au niveau " du pont ferraille" (le 1er pont à Adjamé). Surpris, le chauffeur tente d'arrêter son véhicule pour éviter de tomber dans le ravin. Manque de pot, les freins du Gbaka ne tiennent pas. C'est l'amorce d'une descente de pente. Le chauffeur a du mal à maîtriser son véhicule. Les autres engins qui se trouvent devant, s'efforcent de lui céder le passage. Il a fallu une bonne dose de chance et surtout le sang froid du conducteur pour arrêter le Gbaka in-extrémis. Les passagers, paniqués et apeurés, ont refusé de reprendre le même Gbaka pour poursuivre leur voyage. Cette mésaventure a été aussi vécue par Mme Lasme, vendeuse de " poisson fumé ", au marché d'Adjamé. Pour se rendre à son lieu de travail, elle emprunte ce mercredi 19 août 2009, un Gbaka. Ce jour-là, raconte-t-elle, " c'est Dieu qui a voulu que je reste encore en vie". Le véhicule qui la conduisait à Adjamé est plein comme un ?uf. Mais, le chauffeur qui veut vite aller à Adjamé roule à tombeau ouvert. Les protestations des passagers ne l'émeuvent point. Le souffle coupé, Mme Lasme confie son sort à Dieu et s'agrippe à son siège. Pendant ce temps, la grogne des occupants du Gbaka se fait de plus en plus vive. Mais le chauffeur n'y prête pas attention. Dans sa folle course, le pneu arrière gauche du minicar s'arrache. Le Gbaka tangue pour finir sa course dans une fosse sur la route de Mossikro, un sous quartier dans la commune d'Attécoubé. Sur le tronçon Bingerville-Adjamé, un autre minicar, communément appelé " Badjan ", chargé d'usagers et branlant, s'est écrasé avec tout son monde tout récemment, au niveau de l'échangeur de l'Indénié. Parce que tout simplement, les pneus du véhicule trop usés n'ont pu supporter le poids à charge. Deux des pneus en question ont éclaté dès que le véhicule a amorcé le virage de l'Indénié pour prendre la direction de la gare d'Adjamé par Saint-Michel. Il y a eu de nombreux blessés. Le samedi 10 octobre dernier, en pleine journée, un Gbaka qui dessert le tronçon Riviera II-Adjamé, s'est retrouvé les quatre roues en l'air dans le bas-fond, non loin de l'échangeur des II-Plateaux. Là aussi, la vétusté du véhicule est mise en cause. Les Gbaka ne sont pas les seuls véhicules de transport en commun à mettre en péril la vie des usagers. A cette inquiétude, viennent s'ajouter les taxis communaux communément appelés " Wôrô wôrô ". Ces taxis sont eux-aussi, de véritables " cercueils " qui circulent. Ils sont à l'origine de la plupart des embouteillages que les usagers de la route vivent au niveau du District d'Abidjan.

Des véhicules "âgés" en circulation

Dans la commune de Cocody, des centaines de véhicules non identifiés, parce que ne portant pas la couleur jaune officielle, circulent librement. Hamed est chauffeur de taxi "Wôrô-Wôrô". Sa voiture n'est pas peinte en jaune comme indiqué. Mais, il dessert la ligne Cocody / II-Plateau. Son taxi, à vue d'?il, est sérieusement en état d'épave. La portière gauche est condamnée et les deux vitres des deux portières en arrière sont bloqués. " Je me débrouille avec ça. Lorsque la police me coince, je réussis toujours à m'en sortir ", a soutenu Hamed. En effet, le taximan réussit toujours à passer à travers les mailles du filet de la police lorsqu'il y a un contrôle en glissant un billet de 1000 Fcfa. Ils sont nombreux, ces taximen qui n'ont ni assurance, ni autres papiers pouvant leur permettre de faire normalement leur travail. Mais qui le font tout de même de manière clandestine. Ce sont ces conducteurs qui font le plus de mal à leurs usagers. Il y a quelques jours, sur le tronçon Cocody / Adjamé, un chauffeur de " Wôrô Wôrô ", voulant fuir la police en patrouille, a terminé sa course dans un ravin. Ses pneus, trop usés, n'ont pas résisté à la vitesse que lui impose son conducteur. Ainsi, le pneu avant droit a crevé. Il y a eu plus de peur que de mal ce jour-là, parce qu'il n'y avait qu'un seul usager à bord. Un autre collègue de Hamed, lui, dessert la ligne Cocody Saint-Jean-Plateau. Pour éviter des ennuis avec la police, il refuse de rouler pendant la journée. Alors, il a choisi de fonctionner la nuit. Parce que le contrôle des taxis " Wôrô Wôrô " selon lui, n'est pas trop efficace. " J'ai de bons phares avec un bon moteur. La nuit, je peux rouler à toute vitesse pour faire une bonne recette ". Il y a deux semaines, un taxi " Wôrô Wôrô ", qui fait la ligne Treichville -Cocody, s'est complètement " désagrégé " de retour de son voyage. Le capot de la voiture ainsi que la portière droite sont tombés d'eux-mêmes. La rouille ayant " achevé " de ronger ce véhicule âgé. A cette catastrophe, vient s'ajouter l'indiscipline des chauffeurs, toutes tendances confondues. Très caractériels, ils n'ont de respect pour personne. Mais contre toute attente, ce sont eux qui sont prompts à faire la leçon de morale aux usagers. Maurice est conducteur de " Wôrô Wôrô ". Il est grand fumeur de cigarettes. Il aime fumer sa cigarette au volant de son taxi. Toutes choses que les usagers n'apprécient pas. Mais, dès que quelqu'un lui fait la remarque à bord de son taxi alors qu'il fume sa cigarette, il pique une crise, entre en transe et au besoin, fait descendre la personne. Pis, il accélère et roule à tombeau ouvert. La situation devient très critique pour les usagers lorsqu'il y a dans les environs, un contrôle de routine des policiers. Les taximen, pour échapper à ce contrôle, empruntent des itinéraires échappant aux contrôles, sans penser aux risques pour les passagers. Il arrive que le taximan, qui provoque un grave accident, abandonne les usagers et prend la poudre d'escampette. Tel est le vécu quotidien des usagers qui empruntent le taxi à Abidjan.


Jean-Baptiste Essis
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