vendredi 9 octobre 2009 par Le Temps

Les mendiants d'Abidjan ont l'imagination fertile. Ils écument à longueur de journée les rues et grugent d'honnêtes personnes qui ne pensent qu'à rendre service aux plus démunis.

A Abidjan, tout est bon pour gagner de l'argent. Il suffit de s'armer d'une bonne dose de courage pour arriver à ses fins. Les truands l'ont si bien compris qu'ils n'ont aucune peine à se procurer facilement de l'argent. Tous les matins, Fatou vient s'installer entre les deux feux tricolores non loin de l'Agence ivoirienne de Presse. Elle est infirme. Et pour s'attirer de la pitié, elle n'hésite pas à exhiber son membre amputé aux passants et surtout aux usagers de la route, en réclamant quelques piécettes. Les automobilistes le plus souvent, épris de compassion, lui jettent quelques pièces de monnaie en guise de consolation. Pour les passagers récalcitrants qui se font tirer les oreilles, elle les hèle et les harcelle. Pour ceux qui hésitent à s'exécuter, elle s'approche davantage des véhicules en stationnement aux feux et avec insistance réclame son argent. " Tonton donne l'argent ; tonton donne-moi 100F ", en exposant son handicap pour forcer la demande. Dans les encablures de l'hôtel de ville d'Abidjan, une autre vieille femme, flanquée d'un garçonnet, expose ses jambes enflées. Elle réclame avec insistance, de l'argent aux passants qui feignent de ne pas la voir. Pour se faire remarquer, elle pousse des fesses jusqu'à occuper une bonne partie du trottoir. Les passants, gênés, la contournent pour poursuivre leur chemin. Au carrefour du Chu de Cocody. Un groupe de femmes physiquement assez bien portant, a pris en otage ce lieu pour en faire leur zone de racket. Dès qu'un véhicule s'arrête au panneau stop, elles s'attroupent et encerclent le conducteur pour lui réclamer de l'argent. " Mon fils donne-moi l'argent. Pardon, donne un peu d'argent à ta maman pour manger, pitié ", ne cessent de chanter ces vieilles femmes. A Wassakara, ce sont les filles pleureuses qu'on rencontre. Au détour d'une ruelle, il est très fréquent de voir surgir une fille en pleurs vous suppliez de lui rendre un service. La technique qu'elle adopte est la suivante. Pour rentre plus cruel son sort, elle raconte une histoire rocambolesque. " Mon frère est dans un coma très profond dans un centre hospitalier. Je voudrais m'y rendre mais je n'ai pas de transport. " Elle expose le problème en pleurant à chaude larme pour faire davantage pitié. Mais elle s'arrange de la sorte que, l'endroit où elle doit se rendre soit à Abobo, ou à Cocody. Une stratégie pour se faire un peu d'argent au cas où la personne éprise de pitié doit donner quelque chose. Mais comble de malheur, cette même fille, par stupidité, change seulement de ruelle mais ne quitte pas le quartier pour recommencer à pleurer, dès le passage de quelques personnes. Les victimes de cette jeune fille sont le plus souvent des femmes responsables et très émotives et surtout les dragueurs de circonstance. De nombreuses personnes se sont fait arnaquer par cette nouvelle race de truands qui passent leur temps à écumer les passants. Cheick est un cadre dans une grande entreprise de la place. Il a eu cette malchance de croiser cette pleureuse un soir, non loin de sa demeure. " Une fille d'une vingtaine d'années m'a abordé en pleurant pour me dire que son frère est dans un coma profond. Cheick, affolé, a cru à l'histoire de cette fille et lui a donné une somme de dix mille francs tout en s'inquiétant et se méprenant, de n'être pas sorti avec suffisamment d'argent ce soir-là. A la Riviera II, non loin de la station Pétro Ivoire, un adulte se poste au petit carrefour pour jouer à ce même jeu de racket. Au début, il a réussi à éplucher beaucoup de victimes. Mais son stratagème a été découvert. Dès que les passants le voient venir avec son tissu de mensonges, on lui tourne poliment le dos. Aujourd'hui encore, des personnes se font avoir par des gens très subtiles qui mettent en pratique leur intelligence au service du mal.

Jean-Baptiste Essis
Jbessis06525881@gmail.com

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