samedi 12 septembre 2009 par Le Temps

L'accès à l'eau potable est une préoccupation pour les autorités ivoiriennes. Le Professeur Couakou Djah, Directeur général de l'Office national de l'eau potable (Onep) explique les efforts consentis par l'Etat et la participation certaine des consommateurs dans les années à venir.
Quelles sont vos impressions après les assises sur l'eau potable ?
C'est très heureux et satisfait de la qualité des participants et du niveau des échanges que nous avons eus, que nous partons de Yamoussoukro. Surtout, ceux de l'administration et ces démembrements, des consommateurs, des Ong. Mais aussi et surtout des opérateurs privés. En plus, les débats qui ont eu lieu ont été des débats profonds, instructifs et diversifiés.
Nous avons senti une petite bataille autour de la ré- domiciliation du fonds de développement de l'eau qui est logé à la Sodeci. Qu'en est-il exactement ?
Nous n'avons pas eu cette impression. Nous savons que les choses se passent très bien. La Sodeci et nous sommes, deux entités face à une même réalité. Donc nous travaillons toujours en parfaite symbiose et toujours en harmonie. Les fonds sont pour le moment domiciliés à la Sodeci, par le fait de nous-mêmes, c'est-à-dire l'Etat et nous ne voyons aucun inconvénient. Il y a eu des analyses et des discussions et les choses se passent bien. De ce point de vue au niveau du secteur, nous pensons pouvoir améliorer ce qui peut l'être. L'Onep a certes, beaucoup à faire. Mais, on ne peut tout faire. Nous entendons travailler de façon séquentielle. Pour que tout se passe très bien.
L'Onep qui représente l'Etat joue en même temps le rôle de régulateur. Certains trouvent un peu gênant ce double rôle.
C'est une bonne remarque. Vous savez que nous sommes dans une situation où les ressources publiques sont rares. Nous sommes en relation avec les bailleurs de fonds et la création de plusieurs structures en même temps n'est pas facile. C'est pourquoi, nous allons par étape dans la création des structures. Il n'est pas inopportun d'envisager la création d'une autre structure qui pourrait prendre plus de recule pour être l'arbitre et le juge de tous ceux qui sont acteurs dans le secteur de l'eau potable.
Quelle garantie donnez-vous aux ivoiriens pour la réalisation des résultats des états généraux en projets concrets ?
Les états généraux, ce sont des assises où, tous ceux qui sont parties prenantes d'une préoccupation se retrouvent pour en débattre, faire des analyses, trouver des solutions et les appliquer. Quand vous demandez quelle garantie nous donnons, je vous rétorque que nous sommes tous parties prenantes d'une même chose. Nous avons donc tous intérêt que les choses bougent. Nous sommes dans une situation de crise. Cela nécessite que chacun au niveau de la réflexion, au niveau conceptuel apporte sa part de contribution et de mise en ?uvre. Bien entendu, tout cela doit être orchestré par l'Etat. Il ne faudrait pas l'oublier, les états généraux de l'eau potable se tenaient au moment où l'Onep, une structure centrale au niveau de l'Etat était portée sur les fonts baptismaux.
Désormais pour le règlement des problèmes, les consommateurs ivoiriens doivent-ils s'adresser à l'Onep ou continuer à se rendre à la Sodeci. ?
Dans notre première analyse, nous avons au niveau des exposés qui montrent qui sont les acteurs du secteur de l'eau potable et qui fait quoi dedans. Parce que, la population a tendance à croire qu'il y a un seul acteur, c'est-à-dire la Sodeci qui est un peu plus ancienne et qui fait beaucoup de choses. Tout ce qui se passe dans le secteur, on rend la Sodeci responsable. Il n'en est rien. Il y a beaucoup de responsables. Maintenant, avec la création de l'Onep qui par délégation est une société de patrimoine, il y a des problèmes qui peuvent être réglés à notre niveau sans oublier la Sodeci qui n'est pas toujours le premier responsable.
Quelles sont les urgences du moment que les acteurs du secteur doivent attaquer ?
Nous avons deux types de programmes. Nous avons un retard de près de 15 ans d'investissements du fait de la crise qui perdure et qui ne date pas seulement de 2002. Avant cette date, nos investissements ne répondaient plus aux besoins de la population. En plus, Abidjan qui avait environ trois millions d'habitants se retrouve aujourd'hui, à 5 millions d'habitants et même plus. Ce qui n'avait pas été prévu. Conséquences : Nos installations sont non seulement surexploitées, mais elles sont de façon permanente sous tension. Ce qui crée souvent des problèmes de rupture face à la demande qui est très forte. Aujourd'hui à Abidjan, il existe un gap entre la demande et l'offre de l'ordre de 150000 m3 par jour. Des actions sont en cours et l'Etat est en train de chercher les moyens pour, par exemple, amener l'eau dans le château qui est en construction à la Djibi (Cocody). Il faut faire donc des forages. Il ne faudrait pas aussi oublier la construction de stations productions à Niangon (Yopougon). Rien que sur Abidjan, il y a près de 32 milliards de Fcfa qui sont débloqués par l'Etat ivoirien pour réduire de 2/3 le déficit d'approvisionnement d'ici quelques mois. Sur le court terme, il faut 60 milliards de Fcfa et l'Etat est en train de se battre pour mobiliser ce montant là. D'ici quelques mois, il y aura un grand soulagement à Abidjan et à l'intérieur du pays au niveau de l'approvisionnement en eau potable. A l'intérieur du pays, les besoins sont évalués à 40 milliards de Fcfa.
Comment travaillez-vous avec le ministère de la construction, de l'urbanisme et de l'habitat parce que la ville d'Abidjan ne cesse de grandir, et avec le manque d'eau ?
Le problème de la conservation des ressources en eau est une préoccupation tout à fait justifiée. Le ministère de la construction, de l'urbanisme et de l'habitat et celui des infrastructures, coopèrent dans ce sens-là. Parce que des fois, pour des raisons qui échappent au ministère de la construction, il y a des gens qui vont s'installer sur des sites réservés aux infrastructures d'hydraulique humaine, et donc mettent en danger l'existence même de ces ouvrages. Il n'y a pas longtemps, les deux ministres concernés, le directeur général de la Sodeci et moi-même, étions à Yopougon, dans un quartier où les gens construisaient sur un champ captant. Il y a une véritable politique à mener en vue de protéger ces champs captants. Aussi, en matière d'urbanisation, il y a une politique rigoureuse à mener pour que le renouvellement de la nappe phréatique d'Abidjan, puisse se faire de façon correcte. Faut-il préciser que c'est grâce à cette nappe réputée de bonne qualité et moins coûteuse à l'exploitation que nous arrivons à faire de la péréquation sur toute l'étendue du territoire national. C'est grâce à elle que l'Etat fait payer partout 424fcfa en moyenne le mètre cube.
Peut-on s'attendre à une augmentation du prix de la consommation de l'eau ?
Ce qu'il faut savoir, c'est que la Côte d'Ivoire dispose de ressources assez importantes. Les réserves sont estimées à 77 milliards de mètres cubes. Mais, pour qu'elles deviennent produit consommable, il faut la transformer. Ce qui a un coût. Si on veut continuer à avoir de l'eau en qualité et en quantité, il faudrait qu'on maintienne nos efforts de mise en place de maintenance et de construction d'infrastructures. Dans ce domaine, ceux qui peuvent faire l'effort, c'est bien l'Etat et les bénéficiaires. Que les efforts de l'Etat soient soutenus par ceux des consommateurs. Contrairement à ce qu'on dit, l'adduction d'eau potable coûte moins cher en Côte d'Ivoire, qu'au Burkina Faso. Tout comme au Sénégal et en Afrique du Sud. En France, le mètre cube d'eau coûte en moyenne 1960 Fcfa contre 424 Fcfa en Côte d'Ivoire. Après ce développement, il faut que nous soyons dans la disposition d'esprit de faire un peu d'effort. Car, depuis 2003, le prix de l'eau n'a pas augmenté. Il faut donc s'attendre dans un court délai à participer un peu. Dans tous les cas, il faudra trouver des formules tarifaires pour ne pas pénaliser les petits ménages.
Bamba Mafoumgbé
bamaf2000@yahoo.fr

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