lundi 3 août 2009 par L'expression

? La Côte d'Ivoire est violemment ramenée face à elle-même. Et l'interpellation faite le vingt huit juillet 2009 par les résultats assommant du baccalauréat pose le problème de la prise en charge des grandes questions nationales. Les vingt pour cent d'admis à la dernière session de cet examen sont la sanction sans appel des turpitudes et des laissez-aller qui ont marqué les deux dernières décennies. Ce n'est un secret pour personne, l'école a été le grand théâtre de la lutte politique pour le retour de la Côte d'Ivoire au multipartisme. Les enseignants et leurs étudiants d'alors dont plusieurs gèrent aujourd'hui officiellement où officieusement le pouvoir d'Etat ont fait monter la moutarde de la contestation sociale dans les amphis et les salles de classe en 1990. C'est de là que l'ensemble de la société ivoirienne est entrée dans la danse et a contraint le régime du Pdci à ouvrir le jeu à d'autres
partis. Berceau de l'évolution politique du pays, l'école en est restée cependant la victime. Depuis avril 1990, les lycées, les collèges et bien entendu les facultés ont vécu au rythme des mouvements de revendications et de la contestation permanente. Les maîtres, les deux pieds dans la politique se sont servis à satiété de cette main d'?uvre abondante, disponible et toujours prête au service. Les étudiants et élèves à travers leur principale organisation, la Fédération scolaire et estudiantine de Côte d'Ivoire, la Fesci, se sont montrés à la hauteur de la tâche. Tout à l'école était tendu vers la politique. Rien ou presque ne portait sur la raison d'être du secteur à savoir : dispenser et acquérir savoirs et compétences. Le contrôle de l'espace scolaire et estudiantin lui ayant échappé, le pouvoir Pdci aux affaires a observé la situation pourrir. Par des réformettes, on donnait de temps à autre
l'impression de vouloir endiguer la dégringolade du système scolaire. L'arrivée des opposants aux affaires, en 2000, n'a pas changé grand-chose. Au contraire ! ceux là mêmes qui ont instrumentalisé les étudiants et élèves, et en ont fait l'escalier d'accès au pouvoir vont permettre, on peut les accuser de l'avoir suscité, une gangstérisassion des élèves et étudiants. Les énergies et les intelligences sont orientées vers les opérations mafieuses et les soutiens aux parrains. Un investissement beaucoup plus lucratif que le temps consacré aux cahiers et aux livres. Résultats, on a assisté à la naissance d'une classe d'étudiants nouveaux riches et intouchables. D'éternels étudiants qui, exhibant leur réussite et leur impunité, sont devenus la référence sur les campus. Pouvoirs publics, enseignants, parents d'élèves, syndicats du milieu, tout le monde par intérêt du moment, complaisance et choix de
l'irresponsabilité a abdiqué. Et c'est cette incurie collective que la catastrophe du bac 2009 vient sanctionner au grand jour. Et rappeler que la politique de l'autruche ne peut prospérer. En tout cas pas en ce qui concerne l'école. Les quatre vingt pour cent d'échec au bac témoignent de l'état de déliquescence de l'école ivoirienne. Tous les ordres d'enseignements confondus. Une semaine après une telle catastrophe, c'est le silence radio. Le gouvernement a d'autres chats à fouetter que de s'expliquer sur les mauvais résultats à un examen même s'il a pour nom le bac. L'opposition politique, elle aussi, s'est barricadée à triple tour. Pas un seul mot sur la catastrophe. Le parti du chef de l'Etat tout comme les Forces nouvelles fortement impliquées dans le fonctionnement de l'école dans les zones centre, nord et ouest observent la même posture. La leçon à retenir : une question d'intérêt national
comme la dégradation avancée de l'école, au fond, n'intéresse personne. Pouvoir et opposition clament cependant à tous vents leur volonté d'?uvrer pour le bonheur du pays et son développement. Ce développement peut-il se réaliser avec une école éclopée ? Pour l'heure, le constat est là : l'avenir du pays, l'école, est orphelin.
D. Al Seni

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