C'est connu, l'opération d'identification des populations en vue des prochaines élections générales s'est achevée le 30 juin dernier, après quasiment 9 mois de rebondissements. Malgré les cris d'indignation des magiciens du camp présidentiel, qui réclamaient à cor et à cri la prolongation de cette opération, force est de reconnaître qu'aujourd'hui, la cause sur cette question semble entendue. Et c'est même le chef de l'Etat qui a mis fin au débat au cours du conseil des ministres de la semaine dernière en affirmant clairement qu'il n'y aura plus de prolongation. Pris de court, le chef de la galaxie dite patriotique, Charles Blé Goudé, est monté au créneau pour affirmer que sur les 6.500.000 personnes enrôlées, 4,5 millions sont des patriotes. Ne demandez pas comment il fait pour le savoir, c'est lui qui les a fait enrôler, donc il le sait. Quand on ajoute au chiffre de Blé Goudé, les vrais militants du Fpi et de tous les militants des partis politiques regroupés dans le Cnrd, de même que les membres de tous les mouvements de soutien au chef de l'Etat et de tous ceux dont la conscience sera achetée le jour des élections, on se demande ce que le président Bédié, candidat du Pdci et le premier ministre Alassane Ouattara, candidat du Rdr, vont faire dans cette élection présidentielle ! Pourquoi Blé Goudé a-t-il alors rué dans les brancards quand la fin de l'opération a été annoncée pour demander sa prolongation ? Bref le débat sur l'ultime prolongation de l'opération est donc définitivement clos. Place donc à présent, au croisement des données pour arrêter les listes électorales consensuelles pour aller aux élections. A première vue et si on s'en tient aux déclarations pour le moins optimistes des responsables de la Cei, cette étape de croisement des données ne prendra qu'à peine 6 semaines. Mais à y voir de près, les choses apparaissent moins prosaïques. Car en réalité, la phase de croisement des données provenant de l'identification apparaît de loin comme l'opération la plus délicate tant elle comporte une charge politique énorme et qu'elle risque, pour cette raison, de déboucher sur un véritable conflit qui risque de réveiller tous les vieux démons qui nous ont conduits à la situation dans laquelle nous sommes depuis 2002. De quoi s'agit-il ? Tous les Ivoiriens ont encore en mémoire, les cris des responsables du Fpi et de la galaxie dite patriotique, dès le lancement de l'opération d'identification, accusant le Rdr d'organiser des fraudes massives sur l'identité. Au point de bloquer par endroits, la poursuite de l'opération en arrachant des valises techniques de la Sagem. Il fallut que les responsables de la Cei et dans une certaine mesure, le premier ministre Soro Guillaume déploient un véritable trésor de communication pour que le camp présidentiel fasse contre mauvaise fortune bon c?ur, afin que l'opération se poursuive, remettant à plus tard, son combat contre les "fraudeurs" du Rdr. Et le temps de ce combat semble arrivé avec le croisement des données pour "expulser" tous ceux qui se sont fait enrôler sans y avoir droit. De sources très proches du Fpi, la réunion du secrétariat général de ce parti tenue hier 15 juillet, a été extrêmement décisive quant à la stratégie à mettre en place pour contrer les "fraudeurs." Et le Fpi fait de ce combat, un combat personnel qui détermine sa survie. C'est donc, comme les responsables de ce parti ont coutume à le dire, "une question de vie ou de mort". C'est pour cette raison que le rapport du secrétaire national aux élections, M. Martin Sokouri Bohui, dont on sait qu'il ne peut faire aucune phrase sur l'identification sans accuser le Rdr de frauder sur la nationalité ivoirienne, était très attendu à cette réunion. On imagine déjà ce qu'il a pu dire. Il n'y aura aucun quartier pour le Rdr dont les militants vont être à coup sûr, indexés comme des fraudeurs qu'il faudra absolument expurger de la liste des inscrits, à coups de déclarations nationalistes et patriotiquement médiatisées. Le Rdr, de son côté, n'est pas, alors là pas du tout prêt à accepter l'exclusion d'un quelconque militant de son bord. Et pour cela, il est déjà prêt à donner la réplique au Fpi, sans transiger sur aucun détail. Encore moins sur des histoires de consonance de noms. D'où l'inévitable clash vers lequel nous courons et qui pourrait durablement hypothéquer la tenue de l'élection présidentielle à la date du 29 novembre. Les questions que tous les observateurs se posent aujourd'hui sont de deux ordres : Jusqu'où le Fpi est prêt à aller dans son combat contre ceux qu'il considère comme les "fraudeurs du Rdr ?" Et quelle sera l'attitude du Pdci qui est l'allié du Rdr devant cette "guerre" inévitable ? Soutiendra- t-il son allié ? Ce serait logique, vu l'accord qui les lie et qui les rassemble dans le Rhdp. Dans tous les cas, les jours à venir qui s'annoncent houleux nous situeront
Après "il n'y aura pas d'élections tant que le dernier ivoirien ne sera pas enrôlé" qui s'est achevé en eau de boudin, on va assister à "il n'y aura pas d'élections tant que le dernier fraudeur ne sera pas expulsé des listes". Et dire que Blé Goudé a 4 millions d'enrôlés sur les 6, 5 millions
PAUL KOUDOU