mardi 14 juillet 2009 par Notre Voie

Le développement par le panafricanisme culturel ?

Alger, Tizi Ouzou, Boumerdes, Tipaza, Blida, la République démocratique d'Algérie est au rythme de la culture des 53 Etats africains, depuis le 5 juillet 2009. Et il en sera ainsi jusqu'au 20 prochain. Pour la seconde fois, en l'espace de quarante années, la culture et les arts africains sont au pouvoir. Ils sont célébrés. Plus de 8.000 participants, tous des virtuoses ou des critiques des arts, du spectacle et de la réflexion vibrent à l'unisson.

On danse - l'Afrique danse toujours et partout - au rythme des concerts donnés par les plus grands noms de la musique continentale : Youssou N'Dour, Khaleb, Mory Kanté, Magic System et peut-être Alpha Blondy qui est fièvreusement attendu à Alger. On s'extasie devant les tableaux les plus exquis, dans les cérémonies d'exposition et de vernissage. On contemple les chefs d'?uvre des stylistes-modélistes sélectionnés pour exposer. Mais on s'empoigne aussi, verbalement, à travers des colloques consacrés au bilan culturel et artistique du continent noir et l'avenir du cinéma, du livre et du théâtre africains. Heureusement !

Alors, à mi-parcours du 2ème Festival panafricain des Arts et de la Culture d'Alger (PANAF), en dehors des inévitables problèmes d'intendance que des rassemblements de cette envergure engendrent au désarroi des convives, l'Union africaine peut se féliciter d'avoir placé sa confiance, pour la deuxième fois, en l'Algérie pour organiser cet évènement. Et l'Etat algérien peut se frotter les mains d'avoir accepté de décaisser quelque 35 milliards de FCFA (5,3 millions d'euros) pour faire ?uvre utile en accueillant des milliers de personnes venues du monde entier, démontrant ainsi que l'Afrique peut se targuer d'une certaine capacité à financer et à organiser ses propres ambitions.

Le 2ème PANAF est donc source de fierté. A Alger comme dans différentes villes du pays d'Abdelaziz Buteflika, les festivaliers clament leur joie de se retrouver ensemble, célèbrent ce brasage naissant? et affirment que le développement de l'Afrique passera par la culture? ; que la clé du développement est le panafricanisme culturel? ou que c'est le panafricanisme culturel qui ouvrira la voie au développement durable de l'Afrique?. Enthousiastes, ils jettent les idées çà et là : Relations culturelles et artistiques sud-sud?, Coopération culturelle et artistique sud-sud?.

Fini le manque de fonds pour le développement des arts dans nos Etats. Les colloques consacrés au cinéma, au théâtre ou à la littérature suggèrent, courageusement?, l'option de la coproduction pour échapper au diktat de l'Occident, l'éternel bailleur de fonds qui paie et qui commande jusqu'à la réécriture des scénarii?. Des mots, encore des mots et toujours des mots. Bravo pour la danse ! Bravo pour la parole ! L'Afrique reste maîtresse en la matière et le 2ème PANAF le démontre éloquemment.

Mais à quand l'action ?

Ici, naît le doute. Comme toujours, en tous lieux et en toutes circonstances, les Africains réunis à Alger identifient clairement leurs problèmes, y proposent des solutions, mais oublient les mécanismes susceptibles de déclencher l'action qui libère et qui sauve. En une semaine de festival, le constat est net : au terme des colloques qui ont lieu dans la capitale algérienne ou ailleurs, aucun comité de suivi n'est mis en place pour prolonger les débats, réfléchir sur la faisabilité des idées, bâtir des projets à soumettre et à faire ratifier par nos Etats. Alors, à cette allure, sur un continent où nombre de régimes politiques en place considèrent les artistes, les producteurs et les réalisateurs comme des empêcheurs de détourner tranquillement et de gouverner éternellement, comment obtenir l'augmentation des budgets étatiques consacrés à la culture ? Si les bénéficiaires sont eux-mêmes incapables de prendre le taureau par les cornes, qui fera le lobbying, plaidera à leur place pour la création d'un fonds panafricain de développement de la culture et des arts ?

Le 2ème PANAF, on le voit, constitue un bon creuset pour le brassage des arts et des cultures africaines. Mais si l'on n'y prend garde, il ne sera qu'un rassemblent culturel et artistique de plus. Dans ce cas, dans quarante ans, à la question de savoir si le panafricanisme culturel a été la clé du développement de l'Afrique, il sera difficile de répondre par l'affirmative. Acteurs, réalisateurs et producteurs auront trop parlé. Comme au 1er PANAF de 1969. Pour rien !

C.E. cesaretou2002@yahoo.fr

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