mercredi 1 juillet 2009 par Le Nouveau Réveil

M. Francis Wodié, juriste émérite, président du Parti ivoirien des travailleurs, candidat à l`élection présidentielle, met en doute l`impartialité du Conseil constitutionnel, organe institutionnel chargé d`arbitrer la légitimité du processus électoral. Dans cet entretien accordé à la Radio de la paix Onuci-Fm, il donne les raisons qui fondent son inquiétude.

Evoquant les élections à venir, vous avez déclaré que la Cour constitutionnelle n`a pas la légitimité qu`il faut pour valider les résultats de ce scrutin. On voudrait savoir si c`est le juriste qui s`exprime ainsi ou est-ce la vision de l`homme politique qui est mise en exergue ?
De manière plus précise, je m`interrogeais sur l`attitude du Conseil constitutionnel à jouer son rôle qui est celui d`examiner ou de trancher en toute impartialité le consensus lié à l`élection. A la fois du point de vue de l`éligibilité et de l`élection. Les contestations qui pourraient surgir des résultats des élections. Parce que le Conseil constitutionnel est une instance constitutionnelle qui est chargée d`examiner l`application de la Constitution. Il doit s`agir d`un organe indépendant et impartial. Ce qui veut dire que la composition du Conseil constitutionnel, telle qu`elle est comme aujourd`hui sans remettre en cause les compétences de certains, n`est pas de nature à renforcer l`indépendance et l`impartialité du Conseil constitutionnel.

Qui doit jouer le rôle de l`arbitre si jamais des contestations se faisaient jour au lendemain des élections ?
Justement, c`est à ce Conseil constitutionnel qu`il revient en étant saisi de trancher le contentieux lié aux élections. Donc en cas de contestation, il revient au Conseil constitutionnel de proposer la solution et rétablir les élections dans la régularité. Mais cela suppose que le conseil soit indépendant de tous les partis politiques et de tous les candidats. Or, le Conseil constitutionnel a ses membres désignés par le Président de la République. Et ces membres, pour certains d`entre eux, ne présentent ni les garanties de compétence ni d`indépendances nécessaires. Alors, est-ce que le Conseil pourra jouer son rôle ? Est-ce que le Conseil ne risque pas d`être à la dévotion du chef de l`Etat lui-même candidat comme nous autres ? Est-ce que le principe d`égalité de traitement sera présenté ? C`est la question que je me pose et je pense que même si on ne peut pas fournir les réponses immédiates et formes, il y a lieu de s`interroger.

D`autres chapelles politiques ne jurent que par la Constitution et pourtant à vous entendre, en cas de conflit, elle ne pourra pas trancher de manière impartiale.
C`est la question que nous nous posons. Nous, nous sommes de ferme partisan de la Constitution. C`est ce qui explique les positions que nous avons adoptées en 1993 contrairement à d`autres lors du décès du Président Félix Houphouët-Boigny. Et en 1995, lors du boycott actif. Nous voulions voir la légalité respectée. Mais elle ne le sera que si ceux qui appliquent la Constitution, en connaissent les termes et respectent les dispositions de la Constitution. Si ceux qui sont chargés de trancher le contentieux lié à l`application de la Constitution en ont conscience et jouent pleinement leur rôle c`est-à-dire en toute indépendance et impartialité. L`impartialité et l`indépendance de la Cour constitutionnelle dépendent en grande partie du mode de désignation de ses membres. Et nous avons évoqué le cas du Niger qui a pu s`opposer jusqu`à présent victorieusement à la volonté du chef de l`Etat à prolonger son mandat. Cette décision a pu être prise du fait de la manière dont ce qui a été constitué, ne dépend pas de la volonté du chef de l`Etat. Les membres sont désignés par différents corps. Et c`est ce qui explique en partie l`impartialité de cette Cour constitutionnelle. Je dis que l`indépendance d`une Constitution dépend à la fois des règles prévues par les textes mais également des hommes, de leur état d`esprit et leur volonté d`indépendance et d`impartialité. Ces conditions sont-elles réunies ? C`est la question pour que nous puissions tous y réfléchir. Il faut que l`institution chargée du contentieux électoral par sa constitution soit crédible et reconnue comme telle par tous.

La loi donne autorité à la Cour constitutionnelle d`invalider tout scrutin dès lors que les élections venaient à être entachées d`irrégularités. Vous remettez en cause là aussi cette disposition de loi fondamentale ?
Non, je ne remets nullement en cause les dispositions de la loi. Je m`en tiens au niveau de l`application des dispositions de la constitution. A savoir si le rôle d`arbitre doit être suivi d`organe tel que le Conseil constitutionnel, sera pleinement respecté. Est-ce que les influences politiques ne seront pas telles que le Conseil puisse perdre son impartialité, son indépendance ? C`est la question que je me pose. Nous avons l`expérience de deux villes avec le contentieux électoral, peut-être de l`éligibilité des décisions prises qui sont en partie à l`origine de la crise que nous connaissons aujourd`hui. Donc tirant les leçons d`une telle décision, il y a lieu pour chacun de prendre ses responsabilités. Au niveau du Conseil constitutionnel, comme au niveau de la Commission électorale indépendante, comme à tous les niveaux, que chacun prenne ses responsabilités et toutes ses responsabilités de manière à ce que le scrutin soit régulier, crédible pour que ces élections ne soient pas à l`origine d`une nouvelle crise.

Propos recueillis par Jean Prisca
Sources : ONUCI-FM

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