samedi 27 juin 2009 par Fraternité Matin

Les textes qui régissent le barreau ivoirien vont connaître un dépoussiérage. Le Président de la République l'a promis.



Dans les jours à venir, les avocats de Côte d'Ivoire auront un nouveau statut. Cette promesse leur a été faite jeudi dernier à la Fondation Félix Houphouet-Boigny de Yamoussoukro, par le Président Laurent Gbagbo. C'était à l'occasion de la cérémonie officielle d'ouverture des festivités marquant les 50 ans du Barreau ivoirien. Pour en savoir davantage sur ce nouveau statut et les raisons qui fondent cette mue, nous avons approché Me Jean Jacques Allouko, responsable de la commission communication de ce cinquantenaire et membre du conseil de l'Ordre des avocats. Qui a bien voulu lever un coin du voile sur les raisons profondes de cette mutation tant souhaitée par le Barreau de Côte d'Ivoire.



Toute loi est prise en fonction des circonstances du moment. La loi qui nous régie date de 1981 et elle a donc été prise en fonction des circonstances de 1981. Aujourd'hui nous sommes en 2009, soit 28 ans après. Les choses ont donc évolué. Il y a eu beaucoup d'innovations, il y a eu de nouvelles règles qui sont entrées en vigueur, et il importe d'adapter donc les statuts. On parle d'un nouveau statut parce que celle-ci est postérieure à l'ancienne de 1981. Sinon en réalité, il s'agit d'une adaptation car il faut tenir compte des nouvelles règles qui sont en vigueur aujourd'hui, a précisé d'entrée Me Allouko, avant d'étayer ses propos à des exemples concrets. Depuis 2006, il y a une directive de l'Uemoa qui prescrit la libre circulation et le libre établissement des avocats, ainsi que ceux des professions libérales, notamment les architectes, sur l'espace Uemoa. Ce qui veut dire qu'un avocat ivoirien peut aller s'installer, à titre principal, au Bénin et réciproquement sans qu'on lui oppose le principe de la nationalité. Pourvu qu'il remplisse les conditions fixées par les textes, les conditions académiques. De même, un avocat ivoirien installé en Côte d'Ivoire peut ouvrir des cabinets secondaires dans tout l'espace Uemoa, au Mali, au Bénin, au Burkina Faso, au Sénégal comme il veut. Ce sont des règles qui n'existaient pas avant Nos statuts locaux n'ont pas prévu ces règles, a indiqué Me Allouko. Avant d'expliquer également que l'une des innovations majeures contenues dans le nouveau statut est le principe du salariat.



La directive de l'Uemoa établit en outre le salariat. L'avocat n'est pas un salarié. C'est un libéral qui travaille en toute indépendance, soit individuellement, soit en association, soit sous forme de société professionnelle d'avocats. Les directives de l'Uemoa prescrivent le principe du salariat. Ce qui veut dire qu'on peut avoir aujourd'hui un avocat qui travaille dans un autre cabinet d'avocat comme salarié. Il est soumis au même régime juridique qu'un salarié. Et nos textes ne prévoient pas cette nouvelle donne, a révélé le responsable de la commission communication, avant de poursuivre que ce sont des grandes innovations qui sont venues après 1981 et qu'il faut nécessairement adapter dans le nouveau statut soumis au Président Laurent Gbagbo. Car il s'agit, selon lui, de mettre l'ancien statut au goût du jour.



Et Me Jean Jacques Allouko d'ajouter : Si à un moment donné, les textes sont dépassés, il faut faire une réadaptation. Nous avons donc passé en revue tous les textes et nous avons fait des modifications ou des substitutions quand c'est nécessaire.



La récente perquisition du cabinet de Me Assi et qui a révolté tous les avocats, a également amené les gens de robes à introduire des dispositions qui garantissent leur sécurité. Le nouveau statut y a pensé comme il l'explique ici.



En fonction de la situation du moment, nous prenons comme je l'ai dit, les dispositions qu'il faut. Ainsi, nous avons renforcé dans ce nouveau statut, la procédure à mettre en ?uvre lorsqu'un avocat est mis en cause dans une affaire pénale. Nous n'avons jamais dit que l'avocat bénéficiait d'une immunité quelconque. Il est clair que dans l'exercice de sa fonction, il est libre de dire ce qu'il veut, mais dans le respect des règles qui régissent la corporation. Cependant, vu l'activité qu'il mène et le travail qu'il accomplit, nous estimons qu'il lui faut un minimum de protection. Non pas pour le soustraire de toute poursuite, mais il est nécessaire de le protéger, de protéger ses clients et ses dossiers. C'est ainsi qu'on ne peut pas descendre dans un cabinet d'avocats pour une perquisition, sans un minimum de précaution. On ne peut pas débarquer à son cabinet et le mettre aux arrêts, sans un minimum de précaution. Nous estimons qu'en tant qu'auxiliaire de la justice, il y a un minimum de collaboration et de courtoisie que nous avons les uns envers les autres. Avocats et magistrats, oeuvrons tous à l'oeuvre de justice. C'est pourquoi nous estimons qu'il faut un minimum de courtoisie dans les procédures. L'ordre des avocats est une institution, qu'on le veuille ou non. C'est pourquoi lorsqu'un avocat fait l'objet d'une poursuite pénale, on peut passer par le bâtonnier et joindre cet avocat, l'appeler là où il le faut, soit chez le procureur, chez le juge d'instruction, soit à la gendarmerie ou à la police pour qu'il s'explique. De sorte que si les faits sont avérés, à défaut d'une autre solution, il soit passible de poursuite. Mais il faut éviter les procédures spectaculaires qui ne servent à rien.



Le nouveau statut insiste aussi sur le principe de l'inviolabilité des cabinets d'avocats : C'est un principe reconnu de façon universelle par la loi à travers le monde. Il faut éviter que ce principe de l'inviolabilité soit violé et bafoué. Car il est inadmissible que l'on descende dans un cabinet et emporte ce qu'on veut, à l'occasion de la perquisition du cabinet d'un avocat. Cela doit se faire à certaines conditions. Par exemple que cette perquisition soit faite par le procureur lui-même ou son substitut ou par une personne qu'il désignera. Et celle-ci doit être assistée par le bâtonnier ou par une personne qu'il aura désignée. Ce sont donc l'ensemble de ces dispositions qui ont été prises dans le nouveau statut que nous avons soumis au Président de la République, a conclu Me Jean Jacques Allouko.



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