mercredi 17 juin 2009 par Nord-Sud

Le textile asiatique inonde le marché ivoirien. Quand les prix deviennent préférentielles, les populations ne s'occupent plus de la qualité et foncent sur ces articles appelés chintoques .

Etre bien habillé à l'occidentale est devenu un luxe. Avoir simplement un vêtement est à la portée de presque toutes les bourses grâce à la chinoiserie . Mélange de satin et de pagne, confectionné en modèle de bustier court et long souvent sexy, taillé et orné de n?uds, le prêt à porter chinois fait son chemin en Côte d'Ivoire. Des plus démunies qui s'habillent ainsi à bon marché aux plus coquettes qui changent fréquemment de tenue y trouve son compte. Tout le monde porte chinois, les pauvres comme les classes moyennes, note Bakary Sow, grossiste au marché d'Adjamé. Étudiantes, fonctionnaires, chefs de famille, patrons ou modestes salariés, personne ne rechigne à s'habiller des vêtements venus de l'Extrême-Orient. Les Asiatiques ont compris ce vif intérêt des populations ivoiriennes pour leurs marchandises. Partout, ils installent des magasins. Aucun quartier d'Abidjan n'est oublié. L'intérieur du pays non plus. Les Chinois sont partout. Parfois, ils s'attachent les services de revendeurs à la sauvette. Ceux-ci sont à tous les carrefours de la capitale économiques. Je vends des habits d'enfants. Ce sont des vêtements venus de Shanghai ou de Ghuandzou. On ne se plaint pas , reconnaît Sibiri, un revendeur posté aux feux de l'Indénié. Il s'approvisionne chez un importateur à Koumassi non loin du boulevard du Gabon. Celui-ci Lee Xing est propriétaire d'une dizaine de bâtiments. Les affaires, ça marche à merveille. Il arrive que je fasse deux tours par mois. C'est exceptionnel, se gargarise-t-il. Bernadette N'dri infirmière que nous apercevons se faufiler dans les rayons bondés, ne tarit pas d'éloges pour les produits proposés. J'achète presque tout chez les Chinois. Ils savent qu'il y a la crise parce qu'ils tiennent compte du portefeuille des populations défavorisées, argumente la praticienne. Pour elle, les prix bas sont le premier facteur de cet engouement. Mais chacun a ses raisons. Selon Mariam Traoré, étudiante en gestion, c'est l'illusion de porter des grandes marques inabordables en original. Les marques occidentales sont généralement inaccessibles à cause du prix. Pour s'en offrir, il faut que la tirelire soit bien garnie. Dans ces conditions, on ne peut que se contenter de la contrefaçon chinoise , dit-elle. En effet, les Asiatiques imitent les grandes marques comme Levis, Lacoste, Wrangler et autres. Et ces imitations volent souvent la vedette aux authentiques.
Qualité, on s'en fout

Ils sont compétitifs non pas pour la qualité mais pour le prix. Que voulez-vous ? On est en crise et on a besoin de s'habiller, ajoute Vincent Koffi. Ces habits viennent parfois du Nigeria où selon un commerçant du pays de Mao, la législation est plus tolérante sur la contrefaçon. C'est le cas, des pagnes dits Hirtaget. Ils sont à la mode aujourd'hui et la filière nigériane fait un tabac. A la zone industrielle où des unités sont installées, la plupart des usines locales s'adaptent à la nouvelle donne. S'adapter ou périr, elles préfèrent la seconde option. Malheureusement, les Hirtaget Made in Côte d'Ivoire n'ont pas pignon sur rue. Beaucoup de femmes estiment que les Chinois offrent une gamme diversifiée de motifs. Il y a beaucoup de variétés. Ici, on n'a pas trop de choix. C'est presque les mêmes couleurs toujours , explique Fanta Diakité, commerçante au forum des marchés d'Adjamé. Quant aux vêtements en prêt à porter, le plus souvent, ils sont confectionnés à la va-vite dans des ateliers installés ici comme à l'avenue 21 à Treichville. Pour les personnes interrogées, c'est le seul moyen de s'habiller à un prix raisonnable. L'arrivée des pagnes chinois nous aide beaucoup , renchérit Christian Dodo, responsable marketing dans une usine à Vridi. Une pièce de Fancy (12 yards) sort à environ 6.000 Fcfa de l'usine ivoirienne contre 3.000 Fcfa pour une pièce chinoise. Cet écart de prix sensiblement équivalant pour le wax est un véritable tapis rouge déployé sous les pieds de la contrebande. Dans le cas du wax, on estime que les pagnes chinois que ce soit sous le label nigérian ou ailleurs représente près de 60 % de la consommation locale. Cette percée des produits de l'empire du milieu n'est pas du goût des industriels du pagne. Ils dénoncent une concurrence illégale. Ce sont eux qui mettent les entreprises à genoux. D'autant plus qu'ils font de la contrefaçon des motifs de nos pagnes., se plaint Irène Viera, magistrate et vice-présidente de l'Institut de droit communautaire (Idc). Dans une dizaine de jours, un important séminaire est d'ailleurs prévu à la chambre de commerce d'Abidjan pour débattre de la contrefaçon. En attendant les populations s'accommodent à souhait de leurs chinoiseries.

Lanciné Bakayoko

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