jeudi 6 novembre 2008 par Le Nouveau Réveil

Dans un article intitulé " La candidature unique au RHDP n'est pas opportune " paru dans "Le Nouveau Réveil n° 2052 du mercredi 22 octobre 2008, le professeur Vakaba Touré donnait sa position sur ce sujet que l'on croyait définitivement évacué. Si nous comprenons ceux qui s'inquiètent de ne pas voir le RHDP s'unir autour d'un candidat unique face à l'adversaire, l'on ne doit pas oublier de considérer l'existence même de cette structure comme étant une très grande victoire en soi. Parce qu'il se situe politiquement à la limite du seuil critique, le RHDP est très sensible à toute suggestion de modification à l'avantage de tel ou tel de ses géniteurs. Vu sous cet angle, le contexte qui l'a vu naître et les règles de son fonctionnement offrent une autre perspective d'appréciation. On se rend alors compte de l'étroitesse de la marge de manoeuvre et du long chemin qui nous séparent de l'idéal rêvé qu'est la candidature unique. En effet, un court retour en arrière montre que c'est au détour des différentes négociations pour le retour à la paix en Côte d'Ivoire que les acteurs politiques se réclamant d'Houphouët Boigny ont convenu de s'entendre pour parler d'une même voix et faire front en toute circonstance contre les tenants du pouvoir. Depuis, malgré les multiples tentatives de déstabilisation dont il a été constamment l'objet, le RHDP a tellement bien fonctionné qu'on en oublie presque les efforts consentis pour parvenir à sa formation. L'on imagine aisément, la dure rétrospection à laquelle chaque acteur a dû soumettre sa conscience pour évaluer son niveau de responsabilité dans l'écriture de l'histoire récente de notre pays, l'intensité des débats au sein des différents états majors sur le bien-fondé d'un rapprochement avec l'autre et surtout le dépassement de soi pour franchir la barrière de l'amour propre afin de construire cette structure commune. Sur leur lancée, on aurait voulu en obtenir plus des signataires. Malheureusement " La politique est la saine appréciation des réalités", et elle ne saurait éviter de concilier volonté commune de conquérir le pouvoir suprême et ambition personnelle mais légitime pour chaque parti d'en être aux commandes. Ces deux objectifs apparemment contradictoires ont été heureusement réglés dès le départ par les parties contractantes, à savoir que chaque formation politique présente son candidat au premier tour, l'union se faisant autour du mieux placé au second. La cohésion de la plate-forme ne tient que parce que les choses sont ainsi. Dans son développement, le professeur Vakaba Touré a énuméré les points saillants de l'inopportunité d'une candidature unique. Sans les reprendre ici, nous retenons que son exposé a su suggérer au lecteur les aspects très politiques que renferment les non dits. Comme lui, nous nous demandons s'il est raisonnable et sans péril pour l'alliance, de demander à l'UDPCI dont chacun connaît l'histoire ou au RDR qui s'est battu avec tous les moyens en vue de conquérir le pouvoir, d'enterrer son ambition présidentielle au profit d'un partenaire alors même que ses partisans, à tort ou à raison , le croient tout près du but? Sur la base de quels critères, va t-on opérer la désignation du porte flambeau? Comment contenir la réaction de militants prêts à faire payer le prix de " la trahison " à celui des chefs qui renoncerait à sa candidature, à " leur candidature " au profit d'un autre? Et puis, on a beau être objectif, on ne manque pas de lorgner du côté son propre leader lorsqu'on aborde le chapitre du choix. On l'aura compris, le sujet est vraiment loin d'être une simple question de fraternité et de qualification où joueraient l'âge et l'expérience acquise; encore moins un problème de programme de gouvernement. Si c'était le cas, le schisme et autres évènements préjudiciels au PDCI n'auraient jamais dû exister. Au sein d'un même parti, le consensus n'a jamais été évident, d'où l'arbitrage par le biais des primaires. Alors, avec quels arguments va t-on convaincre les hommes de messieurs Mabri Toikeuse et d'Alassane de suivre M. Bédié ou inversement, ceux de ce dernier de faire bloc derrière Mabri ou Alassane ? On pourrait peut-être essayer celui-là: le président Bédié est votre grand frère, reconnaissez que vous ne l'avez pas aidé à préserver le pouvoir. Aussi, nous vous demandons d'accepter au nom de la mémoire d'Houphouët qu'il soit le candidat unique du RHDP face au FPI. On pourra toujours tenter l'essai avec des sages qualifiés qui existent certainement quelque part en Côte d'Ivoire, mais nous faisons remarquer qu'en dehors des appels lancés çà et là par des militants du PDCI et de ceux insistants du leader du MFA, aucun écho de voix bien introduite n'a été entendu, venant du RDR et de l'UDPCI qui trahirait la germination d'une telle idée en leur sein. Dans ces conditions, tout leader devrait avoir conscience que tout choix qui n'émanerait pas de la volonté populaire de toutes les bases du RHDP serait un bien mauvais cadeau pour son bénéficiaire. En réaction à un espoir de victoire déçu, les militants des partis alliés lui feraient perdre ce qu'un quelconque bénéficiaire aura gagné en empruntant le raccourci d'un deal entre chefs. Ce qui pourrait se traduire par un ralliement au camp adverse ou un refus de prendre part au vote. Politiquement, il se trouve des questions qui étalent à l'évidence leur réponse avant même qu'elles ne soient confrontées au verdict de la réalité. Et celle qui semble constituer la préoccupation du moment en est une. En toute objectivité, nous pensons que la meilleure stratégie pour faire chuter le FPI, sans créer de frustrations à effet boomerang est celle arrêtée par le RHDP. D'abord parce que même si le FPI dispose d'un trésor de guerre, il ne reste pas moins qu'il a déçu les Ivoiriens par ses méfaits et sa mauvaise gouvernance, si bien qu'il lui sera difficile de conserver l'intégralité de sa base électorale de 2000. Et ce ne sont pas les nouvelles adhésions, fruits de chantage qui compenseront les retournements dans ce parti traversé par les frustrations de tous ordres. Ils seront nombreux, les Ivoiriens qui " boufferont " l'argent du FPI, sans lui donner leur voix. Tout autant seront ses propres militants qui attendent de lui faire payer son ingratitude, ses mensonges et les souffrances infligées à la Côte d'Ivoire. Ensuite parce qu'en matière d'audience, le RHDP renferme des partis qui, à l'occasion des législatives et municipales passées, ont démontré à travers le nombre de députés et de maires obtenus, leur poids sur l'échiquier politique nationale. Le tableau politique ivoirien est l'inverse des modèles déjà connus en Afrique où des partis de l'opposition comptant individuellement peu voulaient chacun ravir le pouvoir à un parti d'assise national. C'est pourquoi, à moins d'une manipulation du scrutin, il sera impossible au FPI, un parti minoritaire, d'obtenir la majorité absolue au premier tour. Ses dirigeants en ont conscience, d'où leurs hésitations et l'usage du dilatoire pour ne pas aller aux élections. Ce faisant, l'occasion rêvée pour ce parti serait que le RHDP commette l'erreur de lui opposer une candidature unique. M.Gbagbo et les siens n'attendent qu'une telle aubaine pour se proclamer vainqueurs au premier tour. Devant les conséquences d'un tel choix tactique, les marges de man?uvre seront quasi inexistantes et les recours nuls. En effet, que pourra-t-on opposer à une argumentation du genre: M. Gbagbo l'a emporté au premier tour parce qu'il a engrangé les voix des frustrés du RHDP qui n'ont pas apprécié que leurs leaders se soient mis de côté pour un autre. Certes, il n'est pas dit que les reports de voix seront automatiques au second tour, mais le comportement humain étant lié aux sentiments et circonstances du moment, notre conviction est que les données du premier tour constitueront les fondements d'une dynamique nouvelle pour la victoire des Houphouëtistes au scrutin final. En effet, lorsque chaque composante du RHDP aura fait le test de sa valeur à cette occasion, les dirigeants non retenus auront moins de mal à convaincre leurs membres de suivre le mieux placé au nom de l'engagement commun. L'enjeu du second tour devra vite éclipser les traces qui résulteraient des piques de campagne. Entre demeurer dans la situation indescriptible actuelle et choisir le changement pour se délivrer mutuellement et sauver la Côte d'Ivoire, les alliés du RHDP sauront ensemble trouver les ressources nécessaires pour vaincre le FPI. Ils le feront d'autant plus naturellement qu'ils auront évacué tous les doutes avec le premier tour. A moins que les différents appels à la candidature unique ne cachent des réalités que nous ignorons, nous pensons que les efforts doivent être concentrés ailleurs, sur l'identification des militants et leur sensibilisation à se rendre massivement dans les différents bureaux de vote, le jour venu. Au demeurant, il nous semble que le président Bédié a définitivement clos le débat au cours d'une sortie publique en déclarant sans ambages que la candidature unique n'était pas à l'ordre du jour. Cela a eu pour effet d'apaiser ses partenaires, leurs militants et de raffermir le RHDP. Il n'est pas inutile de rappeler la justesse d'une telle déclaration, laquelle est intervenue à un moment où nombre de personnes en dehors du PDCI commençaient à penser que l'idée avait été suscitée par ses soins pour en tirer un avantage inavoué. Une autre attitude de sa part aurait provoqué certainement la fragilisation, voire la dislocation de la plate-forme. Alors pourquoi ne pas s'aligner ? Bien évidemment l'embarras des uns et des autres aurait été grand face à la question, s'il s'était agi d'un scrutin à un seul tour. Vaincre ou périr au second tour, telle nous semble être la meilleure alternative pour le RHDP, toute autre voie nous paraissant suicidaire.
Dr Kra Yao Georges
F.U.A.P

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