samedi 23 août 2008 par Nord-Sud

Le Mouvement ivoirien des droits humains organise du 27 au 29 août un colloque sur la justice transitionnelle. Son président, Me Traoré Drissa explique le contenu de ce programme dans cette interview.

Le Mouvement ivoirien des droits humains (Midh) organise du 27 au 29 août un colloque sur la justice transitionnelle. De quoi s'agit-il ?

La justice transitionnelle est un mécanisme mis en place pour réfléchir et penser à l'après crise dans le cadre des pays qui ont connu des conflits ou qui passent de la dictature à la démocratie. Ensemble, les populations décident de trouver des solutions pour gérer l'héritage qui relève de la période de crise. Les violations des droits humains, les exactions commises pendant cette période et qui n'ont pu être jugées avant, peuvent être traitées sous plusieurs axes. Notamment au plan pénal où on peut permettre aux uns et aux autres de saisir les juridictions pénales de la Côte d'Ivoire ou bien la mise sur place de juridiction internationale permettant de juger les auteurs des violations des droits humains. On peut permettre dans ce mécanisme également de faire éclater la vérité, c'est-à-dire de mener des enquêtes. Cela peut prendre la forme de la commission Vérité et réconciliation comme en Afrique du Sud, Vérité et équité comme au Maroc pour permettre de savoir ce qui s'est passé. Mais surtout permettre aux générations présentes et futures de tirer les leçons des actes qui ont été posés pour éviter que la Côte d'Ivoire retombe dans la guerre. Il faut se pencher sur le volet réparation qui tient compte de l'intérêt des victimes. La réparation peut prendre diverses formes : elle peut être symbolique, compensatrice etc. Il importe aussi de pouvoir réfléchir sur les reformes institutionnelles pour qu'on puisse avoir un nouveau cadre qui permette d'éviter de tomber dans les travers que nous avons connus.



?Les lois d'amnistie ne constituent-elles pas un obstacle à la justice transitionnelle ?

Nous ne le pensons pas. L'amnistie peut même intervenir dans le cadre de la justice transitionnelle. Les lois et les ordonnances d'amnistie dans le cadre de la crise ivoirienne excluent de leur champ d'application les violations graves des droits humains et des crimes économiques. Ce qui veut dire que ces crimes, commis pendant la crise, pourront être jugés. Dans le cadre de la justice traditionnelle, nous allons analyser les lois d'amnistie mais aussi la possibilité de poursuite éventuelle concernant les crimes graves des droits de l'Homme.





?Quel est l'objectif du colloque ?

Il s'agit de réfléchir sur un certain nombre de mécanismes à proposer à l'Etat. Parce qu'avant tout, la justice transitionnelle est une ?uvre étatique. L'Etat de Côte d'Ivoire doit pouvoir poser des actes et y réfléchir dans un certain sens pour que la paix soit durable. Le colloque va nous permettre de montrer l'importance de la justice transitionnelle en Côte d'Ivoire. Cette rencontre veut montrer aux Ivoiriens qu'à côté de l'accord de Ouagadougou, que nous saluons, dont l'objectif est de sortir de la crise par l'organisation des élections, il faut prendre en compte l'aspect justice pour que la paix soit durable et définitive. Nous disons aux autorités qu'il faut commencer cet acte dès maintenant. Parce que si le président élu après les élections du 30 novembre décide d'engager des réflexions sur la justice transitionnelle, on pourrait l'accuser de chasse aux sorcières. Or si nous réfléchissons tous pour trouver des cadres pour une sortie de crise apaisée dès maintenant, le président élu ne fera qu'appliquer ce que les Ivoiriens auraient choisi avant les élections. Ce colloque nous permettra de dégager des solutions qu'on va proposer à l'Etat de Côte d'Ivoire à qui il appartient de les approfondir et les mettre en ?uvre.





?Quels sont ceux qui vont participer à ce cette rencontre?

Nous aurons la participation de la Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme (Fidh) ; Amnesty international va déléguer un expert qui a vécu l'expérience au Bénin ; Le Centre international pour la justice transitionnelle sera présent avec deux experts, l'un venant de New York et l'autre du Liberia. Nous aurons la participation du président de l'Union interafricaine des droits de l'Homme (Uidh). Vont également participer au colloque les Ong nationales, les experts ivoiriens mais nous souhaitons la participation des autorités étatiques.

Interview réalisée par Nomel Essis

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