dimanche 17 août 2008 par L'intelligent d'Abidjan

Nous avons perdu la bataille économique mais c'est à nous de faire en sorte de ne pas perdre la bataille culturelle . Cette allégation du ministre de la Culture et de la Francophonie, Augustin Komoé, trouve tout son sens dans l'initiation du projet du Festival International La Route des Reines et des Rois . C'est fort heureusement cet appel qu'a compris le professeur Amoa Urbain de l'Université Charles-Louis de. Montesquieu depuis 2003 jusqu'à cette année. Matérialisé par une caravane itinérante, la 6ème du genre, du Festival qui a conduit du 03 au 09 août 2008, les festivaliers d'horizons divers à découvrir la zone Est de la Côte d'Ivoire, précisément les régions de l'Agnéby, du Moyen-Comoé et du Zanzan.

Un richissime patrimoine culturel découvert

En Afrique, l'accueil des hôtes se pose comme un phénomène découlant d'un véritable rituel. Les civilités sont rendues au moyen d'objets précis (eau et/ou alcool). La moindre erreur est considérée comme une offense qu'il faut nécessairement réparer. Tel a été le cas à l'étape de Bondoukou et à Bouna, où les porte-cannes des rois Adingra Kouassi Adjoumani des Brons et le Bouna Issiè Zagassida Dandiré ont été obligés de donner en compensation des zébus (b?ufs) et des bouteilles de liqueur. En outre, la royauté ou la chefferie est toujours accompagnée de la sécurité métaphysique : les Komians ou prêtres traditionnels. Leur rôle est d'autant plus complexe que vaste. Les prêtresses traditionnelles ont pour fonction d'exorciser ou de conjurer les mauvais sorts. C'est ce à quoi, les festivaliers ont assisté dans la nuit du mercredi 6 au jeudi 7 août 2008 . Pouvoir de la parole, des chants et danses suivis de séances d'exorcisme et de purification de la Côte d'Ivoire ont meublé cet instant. En sus, les différentes délégations ont découvert des parures, des objets antiques, des tenues et des attributs royaux. A savoir le Zézé bia ou tabouret royal et les Atto n'volè qui sont les miss awoulaba de la cour royale et des esclaves à Bouna. Au niveau des danses traditionnelles, il faut noter une variété de chants et rythmes traditionnels, accompagnés par le Kinian pli (en Agni ) ou le Bin go (en Bron) pour dire Tambour-parleur. L'Akindé , danse originaire de Dabou, et l'Afoukédjé ont été exécutées à Adzopé ; le Fon Kouê , une danse guerrière enregistrée à Akoupé, puis l'Abo dan que l'on retrouve dans les royaumes de l'Indénié et Djuablin ; et enfin le Sacrabo , le Biwalogo et l'Abouri issues du royaume de Bondoukou.

Les leçons du Festi-Rois 2008

Au niveau de la typologie, il faut savoir qu'aujourd'hui et eu égard à l'histoire des rois dans les Etats post-coloniaux, les chefferies et royaumes ont un caractère très différencié. Au Burkina Faso, il y a une structure pyramidale dont les rois, les chefs de cantons ou de provinces et les chefs de villages. Idem pour le Bénin où l'on rencontre les empereurs, les rois, et les chefs de villages. Au Cameroun, la classification administrative met en évidence les chefs de 1er degré (plusieurs villages sous leur règne), de 2è degré (sous l'autorité des chefs de 1er degré) et de 3ème degré (chefs de villages plus ou moins grands). En Côte d'Ivoire, la structure est faite, selon les régions, avec tout à fait au sommet de la hiérarchie les rois ou les chefs de cantons et, au bas de l'échelle, les chefs de villages plus ou moins importants. S'agissant du code de bonne conduite des rois et chefs traditionnels, les festivaliers ont découvert que le bon roi ou chef traditionnel est celui qui cumule, à la fois, sagesse et exemplarité. Ces deux vertus ne doivent, surtout, souffrir d'aucune attitude vulgaire (alcoolisme) ou tout autre forme d'aisance coupable..

L'Oscar royal de l'Est ivoirien

La zone Est ivoirien regroupe trois (3) royaumes dont celui de l'Indénié dirigé par le roi Nanan Boua Kouassi III, le royaume du Djuablin avec pour autorité politique le roi Annibilé II, Nanan Adingra Kouassi Adjoumani du royaume Bron et le Bouna Issiè peuple Koulango, sa majesté Zagassida Dandiré de Bouna. La palme d'or de meilleure organisation et de la mobilisation est revenue à la localité de Bouna. La palme d'argent a été attribuée à la petite localité de Nianda (12 Kilomètres d'Agnibilékrou) et le bronze à Bondoukou. Des sketchs, des récitations poétiques et danses traditionnelles exotiques ont été présentés par les étudiants du Ghana et du Nigéria. L'on a assisté à un véritable échange culturel et une parfaite intégration culturelle par la pluralité dans la diversité.

Des communications très enrichissantes issues des différents colloques

Prononçant sa communication sur le thème ?'Intégration Africaine : une approche royale'', le mouvement Raëlien par la voix du conférencier Boni Yao a invité les autorités coutumières à une assemblée continentale pour créer les Etats Unis d'Afrique avec une monnaie africaine commune dénommée l'Afro . Mme Konan Née Ohoulo Kouassi Brah Juliette, Sous-préfet d'Akoupé, s'est, par ailleurs, appuyée sur le thème chefferie traditionnelle, administration territoriale et gestion de l'autorité de l'Etat , pour partager la vision de l'Etat ivoirien qui impose, depuis 1995, le village comme une unité de base de l'organisation administrative et le chef comme le seul intermédiaire entre l'administration et les populations. Outre cela, le secrétaire général adjoint de l'Union nationale des journalistes culturels de Côte d'Ivoire, Serges Grah, a fait savoir - sur la base du sujet Livre et Paix : le cas de la Paix par l'Ecriture - que le livre a un rôle fondamental à jouer dans la consolidation de la conscience citoyenne, dans la promotion d'un comportement civique et dans l'amélioration des relations entre Ivoiriens. Il a aussi fait comprendre l'urgence de l'intégration des peuples comme solutions à beaucoup de problèmes ou conflits en Afrique. Exposant sur le thème Culture et Paix : pour une conscience fraternelle des cultures et des peuples africains , Docteur Andrédou Pierre Kablan du département de philosophie de l'Université de Bouaké dira que la paix ne sera possible que si, par l'entretien et la pratique du devoir fraternel, les Africains appréhendent la splendeur spirituelle et morale à travers la beauté de la diversité culturelle.

Des difficultés rencontrées dans le déroulement du Festi-Rois 2008

Au niveau de la logistique, les journalistes culturels ont eu beaucoup de difficultés à faire parvenir leurs comptes rendus à leurs rédactions respectives. Ils ont été hébétés de savoir qu'une localité telle Abengourou, chef-lieu de région du Moyen-Comoé, ne possède pas plus de trois (3) cybercafés et pire, qu'il existe jusqu'à présent des cybercafés sans logiciel World. Au plan organisationnel, il faut signaler l'abandon des différentes autorités politiques et administratives des villes d'Agnibilékrou et de Bondoukou qui ont fait faux bond aux organisateurs. Mention spéciale au roi Adingra Kouassi Adjoumani de Bondoukou qui, ayant constaté la défection des élus et cadres de son royaume, a pris la lourde charge de se mettre aux petits soins de la délégation des festivaliers. Au fond, le ?'bébé'' du professeur Amoa Urbain vient une fois encore de connaître une autre expérience.

Amoa Urbain, plus qu'un Ivoirien, un ?'fils de l'Afrique''

C'est très satisfaits que les festivaliers, en l'occurrence sa majesté Adjahouto Dodo, roi des Aïzo -la plus ancienne des tribus du Bénin dont le père de Toussaint Louverture était un prince héritier du trône royal- ont fait comprendre l'importance de la rencontre africaine qu'est le Festival International La route des Reines et des Rois . Durant mon séjour en Côte d'Ivoire et au travers de la caravane du Festival International La route des Reines et des Rois 2008 , j'ai compris que ce fils est déterminé pour la valorisation de l'Afrique par l'Afrique. Ce genre de rencontre, plate-forme d'échanges culturels, de promotion des valeurs traditionnelles nationales, n'existe pas au Bénin. Je voudrais vous dire tout sincèrement que si vous ne voulez pas de cet enfant de l'Afrique, nous (Nldr : Béninois), avons besoin de lui. Je suis prêt à retourner avec lui au Bénin. Aujourd'hui, je me rends compte que Amoa Urbain n'est plus un Ivoirien mais un fils de l'Afrique. Il n'est pas n'importe quel fils, mais un Africain. S'il reste ici (ndlr : en Côte d'Ivoire), je vous demande d'en prendre soin, parce que l'Afrique a besoin des enfants comme lui pour pouvoir renaître , s'est réjoui sa majesté Adjahouto Dodo, roi des Aïzo du Bénin.

KDM, envoyé spécial

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