jeudi 14 août 2008 par Notre Voie

Marcel Ackah est un planteur natif de la région de Grand-Lahou. Il est aussi un homme d'affaires prospère. Esprit indépendant peut-être parce que financièrement autonome, il a toujours évolué en marge des politiques. Depuis quelque temps, il a décidé de se rapprocher de l'arène politique pour apporter un soutien fort au candidat Laurent Gbagbo. Parce que, explique-t-il, quand tu as le choix entre Pokou et Drogba pour faire l'équipe nationale et que tu choisis Pokou, c'est suicidaire (). Il s'agit de Drogba aujourd'hui, pas de Pokou?.
Notre Voie : On vous a connu homme d'affaires prospère. Vous n'étiez pas très proche des politiques. Aujourd'hui, on apprend que vous êtes directeur local de campagne du candidat Laurent Gbagbo à Grand-Lahou. Qu'est-ce qui a motivé cet engagement ?
Marcel Ackah : C'est d'abord la guerre, parce que j'ai trouvé injuste qu'on attaque quelqu'un qui a été élu démocratiquement (quoi qu'en disent les détracteurs). Ce monsieur mérite qu'on soutienne son action. Il va briguer un deuxième mandat et je lui apporte mon soutien. Et puis, les choix ne sont pas tellement multiples ; il ne reste que lui dans ma vision des choses. Je reste apparenté au FPI sans être FPI. Mes amis et frères de Grand-Lahou m'ont demandé d'être directeur local de campagne (DLC) du candidat Laurent Gbagbo par amitié. Je jouerai pleinement mon rôle.

N.V. : Vous auriez pu jouer votre rôle en dehors des partis politiques ?
M.A. : Oui ! mais il y a tellement longtemps qu'on me dit : Oui, voilà un FPI qui ne veut pas se démasquer. Je pense que la supercherie (s'il y en a) a assez duré. Et puis, je ne pense pas que le FPI soit une tare. En tous les cas, je ne suis pas un militant de parti dans l'âme. Mais, comme pour mener l'action, on préfère que je m'inscrive dans la logique de parti, je le ferai le temps de la campagne, même si je ne suis pas dans une logique de parti. Parce que je suis un esprit indépendant et ingérable.

N.V. : Que comptez-vous faire réellement sur le terrain pour que, justement, votre candidat arrive à la victoire ?
M.A. : Porter le message. Vendre le produit Laurent Gbagbo. Excusez le mot, mais c'est un produit aujourd'hui en terme de marketing. Rétablir la vérité.

N.V. : Laquelle ?
M.A. : Mais que la Côte d'Ivoire a été victime d'un complot. Que Gbagbo ne s'est pas autoflagellé en créant la guerre. Voilà la vérité. Que les problèmes de nationalité d'Alassane Ouattara existaient avant l'arrivée de Gbagbo au pouvoir. Qu'à propos de la filière café-cacao, il a donné effectivement le pouvoir aux paysans. Maintenant que les paysans n'aient pas été à la hauteur, ça va se corriger. Ce sont des promesses tenues. Quand on me dit qu'il est boulanger, je dis que votre grâce, c'est que vous ne l'écoutez pas quand il parle. Parce que vous le méprisez tellement que vous ne faites pas attention à ses subtilités. Alors quand même, ne lui imputez pas vos incohérences.

N.V. : Il nous revient que la zone dans laquelle vous allez travailler pour la réélection de votre candidat est très difficile
M.A. : Oui, on peut l'affirmer, vu d'Abidjan. Vous savez, les populations, quoi qu'on dise, même si elles s'expriment mal en français, perçoivent la réalité. Il y a quelque endoctrinement qu'on va se charger de balayer du revers de la main. Par exemple, faire croire qu'une ligne de haute tension peut-être attribuée à un village par un conseiller de Zadi Kessy, c'est de l'affabulation. Car ce conseiller n'a aucun poste opérationnel à la CIE. Cette ligne de haute tension est une ?uvre commune de Mme Françoise Morokro, qui est directeur de cabinet du ministre des Mines, du député et du président du conseil général de Grand-Lahou. C'est ensemble qu'ils ont décidé, alors que Usher Assouan était encore vivant, de lui confier ce projet pour essayer de le remercier de son action dans Grand-Lahou. Mais quand un individu fait aujourd'hui croire que c'est lui qui a fait venir la ligne de haute tension, c'est des mensonges qu'il faut dénoncer et je les dénoncerai.

N.V. : En dehors de cela, avez-vous d'autres actions à mener ?
M.A. : Le contact physique, la proximité. Il faut aller dans les campements, parler aux gens qui sont réceptifs. Actuellement, malgré la crise, sur l'axe Tiassalé-Grand-Lahou en passant par Bacanda, le Fonds de garantie du café-cacao (FGCC) est en train d'investir 800 millions de FCFA pour réhabiliter la route parce que c'est une zone de cacao. Nous nous battons pour obtenir une dizaine de kilomètres supplémentaire, mais c'est une réalité que les paysans voient malgré la guerre. Ça, c'est du concret. Il faut leur montrer que s'ils s'organisent bien en coopérative et gèrent parfaitement leurs gains, ils seront fortunés. Leur expliquer que leur malheur vient d'eux-mêmes ; c'est le refus de faire la qualité. Mais ça, ce n'est pas un président de la République qui va le faire pour eux. C'est eux-mêmes, et c'est pour cela que je suis président de coopérative. Leur montrer ce que c'est que le cacao, parce que je suis planteur.

N.V. : Est-ce que votre arrivée dans la famille politique FPI ne vous a pas créé des problèmes ?
M.A. : Je ne suis même pas arrivé au FPI, je collabore avec les militants FPI. Mais mon arrivée a créé de petits problèmes. J'ai senti dans certains propos à Grand-Lahou que nous étions des profiteurs. Non, je ne suis pas un ça profite à? et je n'attends rien du FPI. Je suis financièrement autonome, parce que je gère mes plantations et mes terres. Je vois qu'ils n'aiment pas le sang nouveau. Mais je les comprends, puisque je ne suis pas ancien combattant. Je n'ai pas fait la guerre avec eux.

N.V. : Quelles sont, selon vous, les chances de vaincre de votre candidat dans votre région et au niveau national ?
M.A. : En démocratie, il suffit de gagner 51%. Ensuite, on se battra pour les députés. Mais je pense qu'il peut gagner largement. Et les premiers convaincus, ce sont ses adversaires.

N.V. : Comment le savez-vous ?
M.A. : J'analyse quand même, je regarde la scène politique. Je disais à quelqu'un (pour rigoler un peu) que quand tu as le choix entre Pokou et Drogba pour former l'attaque de l'équipe nationale et que tu choisis de classer Pokou, c'est suicidaire. Ça ne veut pas dire que Pokou n'a pas été un grand joueur. Mais le temps a fait son ?uvre. Il s'agit de Drogba aujourd'hui, pas de Pokou !

N.V. : Pensez-vous que votre candidat l'emportera à tous les coups ?
M.A. : Je souhaite qu'il gagne au premier tour par paresse, puisqu'on risque de continuer la campagne. Comme c'est sur un terrain où les hommes ne sont pas fiables, on est préparés pour le deuxième tour, mais il va gagner au premier tour. Parce que quelqu'un qui a fait 20% contre Houphouet-Boigny, quand il est au pouvoir, il faut quand même mettre un coefficient démultiplicateur.

N.V. : Par combien ?
M.A. : Disons que je lui donne entre 70 et 75% des voix, parce qu'il y a des gens qui votent par réflexe de fétichisme. Ils se disent : Je suis PDCI. Je suis d'accord avec le président Gbagbo, mais je vote PDCI. Ou Moi, je suis RDR, je suis d'accord avec le président, mais je vote RDR?. Il faut tenir compte de ceux-là. J'estime leur nombre à 25% de la population. Ça, ce sont les relents de notre culture. On n'abandonne pas ce qu'on a adoré. Mais moi, je suis réaliste. Mon devoir de cadre, c'est d'apporter le développement à Bacanda. Et ça passe par un régime qui associe le pays. Voilà ce que je peux dire.






Propos recueillis par Abdoulaye Villard SanogoAbdoulaye Villard Sanogo Coll. : Madeleine Yao

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