mardi 5 août 2008 par Fraternité Matin

Si illustre qu'il soit, on ne commente pas la disparition d'un ami si proche, depuis quelque 40 ans, qu'il était devenu comme un parent. Le coeur est la tombe des amis morts, l'accès n'en est pas public?. Ces mots de Claude Durand, agent mondial de l'oeuvre d'Alexandre Soljenitsyne? et PDG des éditions Fayard, dans un communiqué, sont tout un témoignage sur le disparu ; surtout sur celui dont il eut le privilège de publier l'essentiel de l'?uvre et qu'il considère encore comme le géant des lettres russes, héros de la lutte antitotalitaire, exigeant censeur du matérialisme occidental, entré de son vivant dans l'Histoire qu'il avait contribué à faire par son combat solitaire. La disparition d'un tel homme qui appartient tout à fait à l'histoire ne peut guère échapper aux souvenirs non éteints de ceux qui, aujourd'hui et demain, écriront l'histoire toujours en marche, écrira enfin, celui qui publia, en 1974, la version française de L'archipel du goulag?, l'oeuvre majeure de l'écrivain russe. Elle a d'ailleurs valu à son auteur, la même année, en février, son expulsion d'URSS. Ecrivain-symbole de la période de la guerre froide, marquée par les rivalités irréconciliables des blocs (communiste-capitaliste), figure de la dissidence soviétique, enfant-chouchou de l'Occident capitaliste, sa mort ne laisse personne indifférent. Tant dans le monde que dans son pays. Les temps ont bien changé
Le président et le Premier ministre russes, Dmitri Medvedev, Vladimir Poutine peuvent, respectivement alors, rendre hommage à un des plus importants penseurs, écrivains et humanistes du XXe siècle, dont la mort constitue une perte irréparable pour toute la Russie et pour le monde entier ; la perte () d'une personnalité forte, courageuse, d'une grande dignité. L'ancien président soviétique, Mikhaïl Gorbatchev, père de la Perestroïka, a salué cet homme au destin unique qui fut l'un des premiers à dénoncer à voix haute le caractère inhumain du régime stalinien dont furent victimes, comme l'illustre disparu, des millions de citoyens du pays. D'autres voix, et non des moindres, se sont ajoutées à ces premières. Comme celles, tour à tour, de la chancelière allemande, Angela Merkel, qui voit dans la disparition de l'homme au long visage de prophète, celle d'un grand et important écrivain, un citoyen engagé (...), un moraliste, un combattant de l'arbitraire qui n'avait pas peur et qui s'est engagé pour les droits de l'Homme ; de Jacques Chirac, ancien Président de la France, qui estime, non seulement que la Russie perd aujourd'hui un grand combattant pour la vérité qui aura oeuvré à la réconciliation des Russes avec leur passé, mais aussi le monde,une figure de la liberté. Le nouveau locataire de l'Elysée, Nicolas Sarkozy, a salué, entre autres, cet homme du refus refusant de quitter son pays pour mieux dénoncer les agissements du pouvoir et qui a fait paraître, au péril de sa vie Le Pavillon des cancéreux puis L'Archipel du goulag, qui sont autant d'actes de résistance à l'oppression. C'est Alexandre Soljenitsyne qui ouvre les yeux du monde sur la réalité du système soviétique, en conférant à son expérience une portée universelle. Mieux encore, pour le Président français, Son intransigeance, son idéal et sa vie longue et mouvementée, font d'Alexandre Soljenitsyne une figure romanesque, héritière de Dostoïevski. Il appartient au Panthéon de la littérature mondiale Qui aura révélé la réalité du totalitarisme stalinien et du monde concentrationnaire, ajoutera, pour sa part, François Fillon, Premier ministre de la France.
Christine Albanel, ministre française de la Culture, aura ces mots, pour cet homme, hier, expulsé d'URSS, privé de sa citoyenneté soviétique, condamné à l'exil : (C'est) l'un des plus grands écrivains que la Russie contemporaine ait donné au monde. Avec Alexandre Soljenitsyne, () s'éteint une voix qui s'éleva il y a plus de soixante ans, dès la fin de la seconde guerre mondiale, pour dénoncer les crimes du stalinisme, et que rien ne put ensuite éteindre. Il appartient à l'histoire et à la philosophie politique de discuter de ce qu'il pouvait y avoir dans cette voix d'archaïque, voire, parfois, de réactionnaire. Mais une chose, selon elle, est sûre, cette voix fut celle de la liberté. Qui aura su incarner l'âme russe et européenne et cet idéal humaniste qui est à la source de tout universalisme, ajoutera la secrétaire d'Etat, Rama Yade. Pour Hélène Carrère d'Encausse, spécialiste de l'histoire de la Russie, Soljenitsyne s'inscrit, (entre autres) dans la tradition d'une très grande littérature russe. Par l'ampleur de l'oeuvre, le souffle épique, il est assez proche de Tolstoï, et par cette revendication morale, c'est Dostoïevski. Pour lui, c'est l'homme qui compte avant tout, la dignité de l'homme. C'est l'avis aussi de la chancelière allemande, Angela Merkel : (Il a été) un moraliste, un combattant de l'arbitraire qui n'avait pas peur et qui s'est engagé pour les droits de l'Homme. Quand une figure de cette envergure vient à mourir, il appartient à ceux qui savent d'en témoigner. Car, comme le dit si bien la ministre française de la Culture, répétons-le, Il appartient à l'histoire et à la philosophie politique de discuter de ce qu'il pouvait y avoir dans cette voix d'archaïque, voire, parfois, de réactionnaire. Mais une chose, selon elle, est sûre, cette voix fut celle de la liberté




Michel Koffi
Source AFP

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