lundi 28 juillet 2008 par Le Nouveau Réveil

Suite aux mesures gouvernementales prises dans le cadre de la lutte contre la cherté de la vie.
L'année 2008 était perçue, à bien des égards, comme une année déterminante pour la sortie de crise en Côte d'Ivoire, avec les élections (élection présidentielle) annoncées pour le 30 novembre 2008.
Elle risque, si nous n'y prenons garde, de ressembler aux années précédentes, une année d'espoirs déçus.
L'impasse, au plan politique, persiste. Avec tous les problèmes préalables non encore réglés, tandis que les ménages, en milieu urbain comme dans l'espace rural, vivent, dans la précarité, l'insécurité et l'incertitude.
Les récentes grèves, en particulier celles des transporteurs et de l'UGTCI, sont la manifestation éclatante et douloureuse du malaise social que le PIT avait pressenti et annoncé à travers différentes conférences de presse notamment celles prononcées le 08Avril et le 10juillet 2008.
Le gouvernement, comme d'habitude, a fait la sourde oreille en ne prenant pas en compte les avertissements du PIT
Il vient de réagir, et il faut s'en féliciter, mais après coup et au coup par coup, comme à son habitude, en prenant une série de mesures ponctuelles pour atténuer les effets des décisions unilatérales antisociales et impopulaires marquant l'augmentation excessive des prix du carburant et du gaz butane.
Comme si ces graves perturbations sociales ne suffisaient pas, le Chef d'Etat et le Gouvernement évoquent, de manière récurrente, une augmentation possible du coût de l'électricité et d'autres produits sous le prétexte tout trouvé de la hausse constante du prix du baril de pétrole sur le marché international.
Dans cette ambiance délétère, des informations relatives à un éventuel remaniement ministériel circulent, donnant à la crise sociale une dimension politique, avec le risque, conscient ou inconscient, de retarder voire de paralyser le processus de sortie de crise. Le Chef de l'Etat sait bien qu'il ne tient actuellement de la Constitution, inappliquée et inapplicable, aucun pouvoir discrétionnaire ni de formation ni de dissolution du gouvernement, sa situation comme la nôtre est suspendue à l'accord de Ouagadougou avec la bonne volonté et l'assentiment des uns et des autres. Alors, que cesse ce jeu malsain d'amalgame. En cette période de crise aiguë où la cohésion nationale est déjà mal en point, nous avons tous le devoir de préserver l'unité et la concorde nationales. Alors, parlons peu et parlons bien.
S'agissant des mesures prises au plan économique et social, peuvent-elles permettent de lutter efficacement contre la cherté du coût de la vie et la pauvreté qui va grandissante ?

I- L'analyse des mesures gouvernementales.
a- Rappel des mesures
*En avril 20028, suite à la marche des consommateurs qui s'est soldée par la mort de deux manifestants tués par les forces de l'ordre qui n'ont pas été sanctionnées, le gouvernement avait pris une ordonnance pour :
- Supprimer les droits de douanes sur certains produits
- Supprimer la TVA sur certains produits de base.
Cette mesure, prévue pour 3 mois, vient d'être reconduite.
Le 20 juillet 2008, le conseil des Ministres a pris les décisions suivantes :
1- La réduction du prix à la pompe du gaz oïl de 1ooFrs/litre
2- La réduction du prix du pétrole lampant de 55Frs /litre.
3- La création des comités de contrôle des prix dans les mairies
4- La réduction de moitié des salaires de base des Ministres et des responsables des structures étatiques
5- L'augmentation de 5000Frs des primes de transport de tous les fonctionnaires.
6- La création d'un cadre permanent de concertation entre, d'une part, le gouvernement et, d'autre part, les transporteurs, les consommateurs, les professionnels de la filière des hydrocarbures.
7-La suspension des missions à l'étranger des membres du gouvernement sous réserve de l'accord du 1er ministre ou du président de la République
b- Quelle lecture faisons-nous de ces mesures?
c- La gestion de nos ressources en hydrocarbure nous place devant un triple paradoxe.

1er Paradoxe
Notre pays produit du pétrole dont la bonne qualité est reconnue; mais curieusement, l'augmentation du prix du baril sur le marché international, au lieu de nous avantager, nous pénalise.
Pourquoi la Côte d'Ivoire, " pays exportateur de pétrole ", ne voit guère s'accroître ses recettes d'exportation ?

2ème Paradoxe
Les pays voisins, de surcroît pays sans littoral, qui s'approvisionnent chez nous (MALI, BURKINA-FASO) revendent le carburant moins cher ; pourquoi ? Revenant en Côte d'Ivoire, on note (notait) une nette différence de prix du carburant à Abidjan et à Bouaké. Deux Etats, deux Capitales?
Le carburant se vend meilleur marché en zone CNO qu'en zone gouvernementale. Pourquoi et comment ?

3ème Paradoxe
Le raffinage apporte une plus-value aux hydrocarbures.
La SIR, qui est une référence en la matière dans la sous région, devait, de ce fait, constituer, par ses activités, une source de devises accrues pour notre économie, or ce n'est pas le cas.
Comment peut-on justifier les 7 milliards de francs CFA de perte que la SIR enregistre chaque année ?
Ces paradoxes soulèvent des questions angoissantes.
Quelle est la production réelle du pétrole en Côte d'Ivoire ?
Le chiffre de 49 000 barils/jour est contesté par des organisations sérieuses comme la Banque Mondiale qui évoque le chiffre de 110000 barils/jour, soit plus du double !
Où est la vérité ? Il a fallu attendre la pression de la rue pour envisager de renégocier les termes des contrats de partage?
Notre pétrole de bonne qualité, en principe, devrait se " vendre plus cher " sur le marché mondial, les prix affichés n'étant qu'une moyenne.
A combien se vend le pétrole ivoirien? Quelle est l'affectation des sommes recueillies?
Quelles sont les retombées de la manne pétrolière pour les Ivoiriens ? Le tout reste bien opaque, quoi qu'en dise le Chef d'Etat.
A quoi les Ivoiriens peuvent-ils s'attendre si le prix du baril contenue de grimper ? Va-t-on encore augmenter les prix?
Que fait le Gouvernement pour sécuriser le pouvoir d'achat des Ivoiriens quand il reconnaît, officiellement, qu'il y a une absence de contrôle de prix du fait de la nature libérale de notre régime politique?
Où est l'empreinte du socialisme des refondateurs dans ces pratiques ultralibérales ?
La réduction des traitements de base des Ministres, peut-elle, à elle seule, avoir un impact sur le pouvoir d'achat des Ivoiriens? Bien sûr que non, au surplus qu'elle en sera la réalité?
Que fait-on du traitement des nombreux conseillers de la Présidence et de la Primature ? Que fait-on des budgets de souveraineté en cette période de crise?
Quelle est la part des Institutions de l'Etat dans les sacrifices à consentir pour lutter contre la pauvreté (La Médiature, le Conseil Economique et Social, la Grande Chancellerie, la Cour Suprême, le Conseil Constitutionnel, l'Assemblée Nationale etc)?
Comment comprendre qu'aucune mesure de réduction de prix n'ait été prise pour le Gaz butane, cette denrée de première nécessité et de large consommation, alors que les ménages ont été encouragés à utiliser ce combustible pour protéger notre forêt et sauvegarder l'environnement?
Ne sommes-nous pas en train de compromettre les efforts entrepris dans le cadre du développement durable ? Le PIT s'inquiète et interpelle le Chef d'Etat et le Gouvernement de Côte d'Ivoire.
L'argument qui justifie l'importance de l'augmentation des prix par le fait que, depuis 2005, notre pays n'a pas connu d'augmentation n'est pas fondé, il devient fallacieux.
Le baril de pétrole est payé en dollar. Cette devise a connu une forte baisse depuis 2005 passant de 580F à 400F pour un dollar, alors quelles conséquences ? Les bonnes saisons ne doivent-elles pas compenser les mauvaises saisons ?
Logiquement, cette tendance devrait compenser la hausse constatée.
De toutes les manières, les mesures de réduction nous montrent bien que des solutions existent. II ne faut pas attendre les pressions de la rue pour les prendre, un Gouvernement, un Chef d'Etat doit savoir anticiper. Gouverner c'est prévoir.
En conséquence de ce qui précède, les mesures prises, pour le PIT, sont insuffisantes.
Elles n'auront aucun effet réel sur la baisse du pouvoir d'achat des Ivoiriens parce que le consommateur vit au rythme du commerce qui est lui-même lié aux échanges, donc au transport.

II Que propose le PIT?
Le PIT appelle le Chef d'Etat et le Gouvernement à faire des efforts, encore des efforts pour améliorer réellement les conditions de vie et de travail des Ivoiriens pour lutter contre le chômage et l'appauvrissement grandissants des Ivoiriens.
A la faveur de la crise, l'accent doit être mis sur la moralisation effective de la vie publique pour l'émergence de la nouvelle Côte d'Ivoire, cette moralisation que le PIT a inscrite dans son programme dès sa naissance.
Le PIT exige qu'à la suite de "l'opération mains propres de la filière café cacao", des audits soient diligentés dans la filière de production et de commercialisation des hydrocarbures, de l'énergie ainsi que les autres secteurs de production et de commercialisation.
Le PIT demande au Gouvernement de prendre en compte les justes revendications des Centrales syndicales, en allant dans le sens de l'augmentation substantielle des salaires des travailleurs pour encourager davantage la consommation et stimuler en conséquence la production, accroître les revenus liés à la fiscalité et réduire nettement la fraude et la corruption.
Le PIT constate qu'en guise de réponse aux troubles sociaux, le Gouvernement a entrepris des concertations sectorielles, se convertissant enfin à la nécessité des concertations que le PIT réclame à cor et à cri depuis des années.
Les résultats d'une telle approche n'ont toujours pas été à la mesure des attentes des Ivoiriens, parce que non globale.
Il faut changer de stratégie, en élargissant le cercle de la concertation à toutes les forces vives du pays.
Le PIT, une fois encore, en appelle au bon sens des uns et des autres et encourage particulièrement le Chef d'Etat, le Premier Ministre et le Gouvernement à comprendre et à accepter la nécessité d'organiser, de toute urgence, une concertation nationale élargie avant la tenue des prochaines élections (le 30 novembre 2008, date à tenir), afin de prévenir et résoudre, sur la base d'un large consensus national, les problèmes majeurs qui menacent gravement la paix et l'avenir de notre pays.
Abidjan le 26 juillet 2008
Pour le PIT
Le Secrétaire Général
KOUABLAN François

NB: Le titre et le surtitre sont de la rédaction

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