vendredi 25 juillet 2008 par Nord-Sud

La compagnie nationale Air Ivoire a fait beaucoup de mécontents ces temps ci. Nord sud quotidien a investigué.









Samedi 19 juillet 2008, aéroport d'Orly à Paris. Les passagers du vol Air ivoire à destination d'Abidjan se tournent les pouces après avoir rempli toutes les formalités. L'avion devant les convoyer sur les bords de la lagune Ebrié est en retard. Convoqués pour 10h, c'est finalement à 16 heures qu'ils quitteront Paris pour Abidjan. Ce n'est pas seulement avec le long courrier que ce genre de désagréments est constaté. Sur plusieurs vols à destination de la sous-région, ce sont les mêmes retards. Le vendredi 11 juillet dernier, les passagers à destination de Brazzaville via Cotonou ont subi les mêmes problèmes. Prévu pour 19h50, c'est finalement vers 24h que le vol VU 850 de la compagnie sud-africaine Inter Air a quitté Abidjan pour la capitale béninoise. A bord, l'équipage s'adresse en anglais aux passagers. Pour une compagnie dite nationale, il y a de quoi tiquer. Les annulations de vols, elles, sont devenues monnaie courante. Plus grave et qui suscite des interrogations, ce sont les vieux Boeings qui apparaissent dans la flotte. Des vieux Boeings 727 et 737-200 dont la fiabilité inquiète certains usagers. Mais selon un expert en aviation, Ce n'est pas l'âge qui compte en termes d'avion mais l'entretien. Par exemple l'avion de Kenya Airways qui a craché l'année dernière au Cameroun n'était âgé que de deux ans . Malgré tout, il y a lieu d'être rigoureux dans la sélection des avions qu'on loue. Dans un communiqué de presse le 6 juillet, la direction de l'entreprise avait pourtant annoncé des nouvelles satisfaisantes. Parce que nous tenons à vous, nous mettons tout en ?uvre pour vous garantir une sécurité maximale. Pour les besoins de vérifications techniques approfondies, nous avons été amenées à réaménager temporairement notre programme. Cette situation a malheureusement entrainé quelques perturbations sur nos vols, trouvez ici toute l'expression de nos sincères excuses. Dans l'immédiat, des solutions appropriées ont été apportées

Quel est donc le problème ? Pourquoi ces nombreux désagréments? Un petit tour sur le site internet de la compagnie permet de constater que lui aussi n'est point à jour. Aucune note pour expliquer le vécu quotidien de l'entreprise.





La source du problème





Depuis le 19 juin dernier, à la suite d'une panne d'origine informatique, l'un des avions de la compagnie ivoirienne Air Ivoire, assurant le long courrier, le Boeing 767 (B767 200) était immobilisé à Paris. Cette panne qui semblait au départ bénigne s'est avérée plus grave que prévue au point de créer des désagréments aux passagers. Alors que cet avion était encore cloué au sol, un deuxième avion de sa flotte, l'Airbus A321, qui dessert le réseau inter Etats en Afrique, subissait lui aussi une autre panne dont les origines remontent au 24 mai dernier à la suite d'un impact important à l'atterrissage à Cotonou. Il s'agit d'un atterrissage dur survenu alors que le commandant Aubrey dirigeait l'équipage. Le constructeur Airbus, conformément au contrat le liant à Air Ivoire, à demandé l'immobilisation de l'avion afin de procéder au diagnostic des défaillances et procéder à la réparation du train d'atterrissage. Selon des sources techniques françaises, le pilote n'a pas signalé la panne et a laissé l'avion à un de ses collègues. Sous d'autres cieux, ces informations auraient donné lieu à une enquête car il s'agit de vies humaines. Les autorités françaises ont déjà pris des dispositions. Selon une source proche de la compagnie, le pilote fautif est désormais interdit de vol en France. Une mesure conservatoire en quelque sorte.

Depuis lors, Air Ivoire n'a pratiquement pas d'avion. Elle ne fait que louer des avions au coup par coup, ce qui crée beaucoup de désagréments surtout, en cette période de haute saison où l'activité est plus intense. De ce fait, le personnel navigant d'Air Ivoire est presqu'au repos. C'est plutôt le personnel navigant d'Air Inter qui se frotte les mains.





Du partenariat avec Air France





Pourquoi Air France qui est actionnaire à Air Ivoire ne vole-t-elle pas au secours de la compagnie ivoirienne en cette période de difficulté ? Ce n'est pas un secret. Air France dispose d'une flotte importante. Un regard sur l'actionnariat explique le peu d'intérêt d'Air France pour son partenaire ivoirien. Air Ivoire, faut-il le rappeler, est une société anonyme de droit privé à participation financière publique majoritaire. Elle a, en effet, démarré ses activités le 31 mars 2002 après avoir été recapitalisée à hauteur de 3.600.000.000 de FCFA. Une modification de la géographie du capital a entraîné une augmentation de la part de l'Etat de Côte d'Ivoire qui détient 51% des parts de la compagnie. Ce sont là, les chiffres non actualisés de la compagnie disponibles sur son site internet.

Mais, le compte-rendu d'une conférence de presse animée à son bureau le 25 juin 2008, par François Emmanuel, le nouveau directeur général d'Air Ivoire, révèle qu'encore une fois, le capital a été modifié. Malgré la rudesse de la concurrence qui caractérise le transport aérien, Air Ivoire dont le capital est détenu à 88% par l'Etat de Côte d'Ivoire, a su se forger, au fil du temps, une image de sérieux et de professionnalisme , rapporte notre confrère Fraternité Matin dans sa livraison du 26 Juin. Si la Côte d'Ivoire détient 88% des actions, cela infère la mise en minorité d'un partenaire aussi stratégique qu'Air France. Selon un travailleur de la compagnie qui a requis l'anonymat, le vrai problème de cette entreprise se trouve dans son directoire dont plusieurs membres sont plus préoccupés par la promotion interne que par l'avenir de la compagnie d'où les intrigues. Les pannes d'avion ne sauraient donc tout expliquer !

C'est un truisme. Les retards et annulations de vols constatés chez Air Ivoire sont symptomatiques de la maladie dont ont souffert toutes les compagnies aériennes qui ont mis la clé sous le paillasson. Cette société a conquis environ 50% des parts de trafic à Abidjan et réalise un coefficient de remplissage supérieur à 60% par mois sur l'ensemble de son réseau. Il serait donc catastrophique qu'elle suive le parcourt des défunts Air Gabon, Air Guinée, Air Mali, Cameroun Airlines et consorts. Pour éviter le dépôt de bilan, un plan d'urgence s'impose.





Comment propulser Air Ivoire en avant?





Il faut faire appel à des compétences ivoiriennes qui existent pour proposer des plans rigoureux et cohérents. Il ne sert à rien de crier au complot contre la France car là, il s'agit d'affaires. Diriger, c'est prévoir. Et prévoir même ce qu'on qualifie de coup bas du concurrent. L'Airbus A 321 immobilisé à Paris dont le train d'atterrissage est endommagé est descendu avec 6 fois son poids alors que la norme autorisée est d'une fois et demie. Ce sont là, des données techniquement vérifiables. C'est pourquoi, il faut aller au-delà et faire appel à une prise de conscience pour Air Ivoire qui doit commencer par la sanction à infliger aux personnes reconnues pour des manquements. D'ores et déjà, on peut obliger toutes les autorités dont les titres de transport sont payés par l'Etat à aller sur les vols de la compagnie nationale comme indiqué dans un décret de Laurent Gbagbo. En France, par exemple, il serait inconcevable qu'un ministre abandonne Air France au profit d'Alitalia ou d'Emirates pour une mission officielle. Il y a une série de petites mesures de ce genre qui peuvent maximiser les gains d'Air Ivoire. En aucun cas, l'ivoirisation de la compagnie en cette période de grands ensembles et les multiples changements de Directeurs généraux ne sauraient être la panacée. Il faut un plan global de sauvetage. Impérativement, les politiques et les techniciens doivent se mettre à l'ouvrage pour éviter la chute. Au propre comme au figuré.









Traoré M. Ahmed

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