mardi 8 juillet 2008 par Nord-Sud

Des habitants de Grand-Bassam ont attaqué en justice des maquis qui troublent leur quiétude par le tapage nocturne.



M.K, enseignant à Grand-Bassam, vit depuis 2006 un calvaire. Cet habitant du quartier Congo, secteur Epp Abley Frederic et sa famille sont soumis au bruit assourdissant occasionné par les maquis Le GP et l'ex Han's bar devenu aujourd'hui La nouvelle page. Avec ce vacarme, difficile de corriger les copies des élèves et préparer les cours. Pire, l'insalubrité est devenue son lot quotidien. Les murs de sa cour sont transformés en un véritable urinoir public. J'habite ce quartier depuis 92. A l'époque, il n'y avait pas de maquis. Mais, depuis 1999-2000, les maquis ont poussé comme des champignons. Le GP et l'ex Han's bar posent particulièrement problème , se plaint-il. Lui et d'autres habitants ont saisi la justice pour faire respecter leurs droits. L'affaire est aux mains de la justice depuis le 12 février 2008. La procédure est en cours. On ne peut même plus s'asseoir pour regarder la télévision. Mes enfants ne peuvent plus étudier, grogne M.K.

Assise à même le sol, L.K, sa femme, n'a pas fermé l'?il de la nuit. A cause des voisins encombrants qui jouent la musique de façon assourdissante, surtout les week-end. Il est difficile de dormir. Leurs clients viennent déféquer dans la cour arrière et même dans notre cour. Nous avons été victimes de vols à répétition. Ma s?ur s'est fait agresser par des quidams qui lui ont voler son argent, un soir lorsqu'elle revenait de son commerce. Le 8 mai, un gérant de cabine a reçu une balle. Ses agresseurs lui ont pris aussi son argent , témoigne-t-elle avec beaucoup de crainte. M.E entame le troisième âge. Son état de santé semble fragile et nécessite du repos. Malheureusement, la proximité avec les maquis ne le lui permet pas. C'est dur d'avoir du repos dans ce quartier. Je suis hypertendue. Une nuit, j'ai piqué une crise et j'ai été transférée d'urgence à l'hôpital. J'y ai passé deux nuits. Après des soins, mon état de santé s'est s'amélioré. Mais, j'ai très vite rechuté. Le cardiologue a diagnostiqué un manque de repos. Vous constatez-vous même, il n'est que 15 h. Nous allons subir ces nuisances jusqu'au petit matin, se lamente-t-elle. Nous sommes des personnes âgées, nous voulons nous reposer. Ils ne devraient jouer la musique que pour leurs clients. Les propriétaires de ces maquis ne dorment pas dans ce quartier, ils ne peuvent pas comprendre ce que nous vivons, conclut-elle. A quelques foulées de sa concession, habite Mme D.M. Elle aussi déplore ces nuisances sonores. Les bruits créés par ces maquis nous gênent énormément. Nous sommes allés voir le maire, mais rien n'y fit. Nous avons pris un avocat. Et la justice a dit qu'ils seront amendés de 100.0000 Fcfa par jour pour tout trouble anormal constaté. A défaut, elle va procéder à la fermeture de ces maquis. Malheureusement, il y a toujours de la musique , regrette-t-elle. A l'autre bout de la rue, habite un cadre d'une société de la place qui a requis l'anonymat. Il connaît aussi le même sort que ses voisins. Je ne dors pas, du lundi au dimanche. De ma chambre, vous pouvez enregistrer la musique qu'ils diffusent. Il est impossible de se parler, de regarder la télévision. Je suis contraint de rémunérer un répétiteur chez qui mes enfants étudient. Je m'inquiète quand ils rentrent tard. Depuis, la création de ces maquis-là, je ne connais plus la tranquillité. Quand nous nous plaignons, ils viennent nous menacer , explique-t-il d'un air soucieux. Au dire des riverains, plus de quatre-vingts personnes se sont réunies pour porter plainte, le 24 janvier 2008, contre les propriétaires de ces maquis qui troublent leur quiétude. A l'audience du 8 février, en compagnie de leur conseil, ils se sont plaints du fait que les nuisances sonores causées par les deux maquis troublaient leur repos, empêchaient leurs enfants d'étudier et constituaient un facteur de stress et de perturbation de l'organisme. Selon eux, les démarches entreprises auprès des propriétaires des maquis sont restées vaines. Et, ils ont fait constater les nuisances sonores par un huissier les 31 Août, 1er septembre et 12 septembre 2007. Après avoir écouté les deux parties, le juge a ordonné la cessation de ces troubles sous astreinte comminatoire de 100.000 fcfa par jour pour tout trouble anormal constaté. Décision qui n'a pas été suivie d'effet. Le tapage continue.





Le maire veut prendre des mesures répressives





Pour les résidents, la liberté du commerce n'est pas synonyme de libertinage. Le quartier Congo, autrefois lieu paisible, ne peut se transformer en une rue princesse . Les responsables des maquis voient les choses sous un angle différent. Selon M. Aka Olivier, le gérant, ils respectent la décision de justice qui a été rendue. Ils ne diffusent la musique que du vendredi au dimanche, et à un niveau de son assez faible. Mais, il se plaint de l'impact de ces conditions draconiennes sur leur chiffre d'affaires. Car, prévient-il, il s'agit d'une activité commerciale qui représente 17 emplois pour Le GP et 12 pour La Nouvelle page. Selon le président des Dj de la ville, Patrick alias Wesby, Le GP a vu son chiffre d'affaires quotidien chuter de 200 000 Fcfa à 20.000 Fcfa. Par ailleurs, rappelle-t-il, ces établissements jouent un rôle touristique non négligeable pour Bassam. La baisse du son de la musique limite ce rôle . Le sort des riverains du quartier Congo préoccupe le député maire de Grand-Bassam, Jean-Michel Moulod. Pour lui, la quiétude de la population de sa cité doit primer sur toute autre activité. C'est pourquoi, il annonce une réunion avec la police les jours prochains afin d'interpeller les services de l'Etat. Il prévoit aussi une rencontre avec le préfet de Grand-Bassam. Le conseil municipal devrait être saisi. Dans le pire des cas, la fermeture des deux maquis n'est pas exclue. J'ai été saisi à plusieurs reprises. Il y a quelques jours, j'ai convoqué des réunions avec les deux parties pour les entendre. Les témoignages sont poignants. Nous avons exigé qu'ils réduisent le son. Nous sommes allés sur les lieux pour nous en rendre compte. Il nous était difficile de fermer les maquis, au risque de faire perdre quelque chose à cette rue. Ils ont négocié pour diffuser la musique au son le plus bas possible. Et j'ai pu constater un léger mieux, explique le maire. Nous sommes en train de construire à Grand-Bassam des valeurs qui doivent primer sur le reste. Je veux parler de la zone franche. Je me propose dès la semaine prochaine d'organiser une grande réunion, le problème sera posé lors du conseil municipal. Les riverains ont fait preuve de patience. Il y a deux maquis qui nous posent problème. Nous les avions sensibilisés en direct. Malheureusement, les mauvaises habitudes reviennent. A nous de prendre soin de notre environnement. C'est donc un problème qui me préoccupe. Il faut passer à une autre étape , promet M. Moulod. En attendant que des solutions soient trouvées, les nuits sont trop longues pour les riverains du quartier Congo.


Emmanuelle Kanga Correspondante Régionale

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