Pour la succession de Charles Konan Banny à la tête de la BCEAO, la Côte d'Ivoire avait sa liste officielle conduite par le chef de l'Etat. Il semble qu'elle comportait deux noms : Bohoun Boubré et Dacoury-Tabley. A côté de ce qui était officiel, il y avait, selon des sources très proches du dossier, une liste rebelle proposée par Charles Konan Banny. Celle-là comportait un seul nom : Kablan Sahi. L'ancien Premier ministre ivoirien a mené une campagne tambour battant pour son poulain. Il était tellement sûr d'y arriver, tellement d'avoir posé le bon tacle à l'adversaire (par derrière) que, la veille de l'ouverture du sommet des chefs d'Etat, il a cru bon d'accorder une interview à une radio étrangère pour faire diversion. Son poulain Kablan Sahi, qui a eu toutes les assurances de son ex-patron, est arrivé dans la capitale du Faso après avoir fêté? sa nomination à la tête de la BCEAO. Le directeur national de la banque sous régionale a dit ses adieux à tous ses proches, avant de prendre son avion pour Ouagadougou. Comme s'il ne connaissait plus les règles de désignation du gouverneur de la BCEAO. Comme si c'est Banny qui était à ses yeux le président de la République de Côte d'Ivoire qui, seul, a le droit de choisir un Ivoirien pour diriger cette institution. En tout cas, à l'annonce du résultat final, l'homme était particulièrement méconnaissable. Il était tout malheureux. Et son humeur du moment n'a pas échappé à un confrère burkinabè qui était sûr que c'est Kablan Sahi qui allait être choisi par les chefs d'Etat. Eh le pauvre ! il est tout seul en plus. On nous a pourtant dit que la France ne voulait pas d'un proche de Gbagbo. Hier, l'information était que les chefs d'Etat demanderont à Gbagbo de choisir entre Kablan Sahi et Ahoua Ndoly. Ce matin, une source généralement bien informée nous a dit que c'est finalement sur le premier nom que sont tombés d'accord les hôtes de Compaoré par voie diplomatique?.
Maintenant que le coup de Banny n'a pas porté, que vont devenir ceux qu'il a entraînés dans cette aventure ? Qu'elles soient proches de la présidence burkinabè, togolaise ou malienne, toutes les sources interrogées se demandent encore pourquoi Charles Konan Banny a fait une telle campagne contre le candidat officiel de la Côte d'Ivoire. Il a même fait mieux ou pire. Non seulement il se battait ouvertement contre Bohoun Bouabré, mais il a même positionné son poulain contre le candidat du chef de l'Etat. Mais ces sources ont eu la réponse à cette interrogation. Elles ont compris que Banny luttait pour sa propre survie. Le trou de 20 milliards de FCFA révélé par l'audit interne de la BCEAO ne lui offre aucune minute de sérénité. Il lui fallait absolument trouver un fidèle, un pion qui pourrait passer l'éponge sur ce trou béat. Malheureusement, Dieu a décidé autrement. Parce que, disent les Zouglou, quand tu te courbes pour regarder le postérieur de ton voisin, tu offres en spectacle le tien. N'est-ce pas ?
Abdoulaye Villard Sanogo