Désiré Tagro ne démord pas. Celui qui a claqué la porte lors du second accord politique complémentaire entre les Forces nouvelles et le camp présidentiel n'entend pas se laisser faire. En dépit du choix de l'opérateur Sagem pour la confection des nouvelles pièces d'identité, le ministre de l'Intérieur reste sur sa position de départ. Pour lui, c'est cette structure placée sous sa tutelle qui doit être la pièce maîtresse de ce processus. Pourtant, après avoir claqué la porte des négociations à Ouaga, le Chef d'Etat lui-même l'avait désavoué en acceptant que ce soit la SAGEM qui s'en charge. "Les deux parties s'accordent sur la désignation, par le gouvernement de la société SAGEM () en qualité d'opérateur technique pour les opérations prévues aux paragraphes 1.3.3.3 et 2.1.1 de l'Accord politique de Ouagadougou du 04 mars 2007" a pourtant dit la déclaration. C'est ce texte, clair comme de l'eau de roche, que le chef de l'Etat Laurent Gbagbo a signé avec Guillaume Soro, sous les auspices du Facilitateur, le Président Blaise Compaoré du Burkina Faso. Et c'est en fonction de cela que le nouveau chronogramme d'exécution de l'Accord de Ouaga II a été rendu public le 28 novembre dernier. Et qui stipule à grands traits que "le desarment se fera le 22 décembre. La nouvelle armée, une semaine plus tôt soit le 15 décembre. La date du redéploiement de l'administration a été fixée au plus tard pour le 30 janvier. Le retour de la Douane au Nord, et enfin les élections le 30 juin au plus tard". Précision de taille de Djibril Bassolé. "Nous veillerons à ce que les délais soient tenus". Mais Désiré Tagro n'en a cure. Il continue de dire que l'INS dont on connaît la composition soit placée au c?ur de l'identification.
Or, lors de la visite de Gbagbo au Nord et précisément à l'étape de Korhogo, le Premier ministre Guillaume Soro a bel et bien déclaré dans son allocution qu'une fois de retour dans la capitale ivoirienne, il convierait les responsables de la SAGEM à une séance de travail dans le but de tracer avec eux, les sillons de la future identification. La question que les observateurs de la vie politique ivoirienne se posent est celle de savoir ce qui fait courir le ministre Désiré Tagro. Pourquoi veut-il coûte que coûte contrôler l'identification au détriment de ce qui a été décidé entre Guillaume Soro et Laurent Gbagbo ? Une attitude qui fait dire à certains que le ministre de l'Intérieur se prend peut-être pour le véritable Chef du gouvernement. Au-delà de cette "guerre" que se livrent Soro et Tagro pour le contrôle du processus, la grande inquiétude est le blocage que pourrait entraîner cet autre bras de fer.
C'est désormais connu. A chaque fois qu'un accord est signé, un des signataires, en l'occurrence le FPI, trouve toujours des subterfuges pour créer quelques blocages. La voie dans laquelle le ministre de l'Intérieur veut engager les Ivoiriens concourt à cette stratégie. Il va sans dire que cette sortie de Tagro va encore faire perdre du temps. Il faudra encore quelques jours, voire quelques semaines pour trouver des compromis au desiderata du chef de délégation du camp présidentiel. Naturellement, cela aura des conséquences ou des répercussions sur tout le reste du chronogramme. Un chronogramme qui avait été pourtant adopté et qui a l'avantage d'être précis sur les dates.
Yves-M. ABIET