lundi 19 novembre 2007 par Le Nouveau Réveil

L'affaire Guy André Kieffer connaît un nouveau rebondissement avec l'arrestation à Paris du capitane Tony Oulaï, déserteur de l'armée ivoirienne, et l'activisme nouveau de son ex-épouse Osange Kieffer. Pendant ce temps, le principal mis en cause Michel Légré s'offre une nouvelle vie à Abidjan, loin des regards indiscrets.
Il y a environ deux ans que la Côte d'Ivoire vibrait au son d'une affaire scabreuse et ambiguë, devenue finalement une énigme : l'affaire Guy-André Kieffer, Le principal, mis en cause, Michel Légré, témoin et non auteur, a payé un peu plus d'une année d'emprisonnement pour avoir été la dernière personne à voir le journaliste avant sa disparition. Aujourd'hui, revenu de prison, alors qu'il a rompu les amarres avec le pouvoir d'Abidjan et qu'il s'est éloigné du cercle des ivoirophiles, Michel Légré semble avoir retrouvé la sécurité et le confort existentiel qu'il n'avait pas au moment où se déclenchait cette brumeuse affaire.
En effet, travaillant aussi bien pour les réseaux français en Côte d'Ivoire que pour certains tenants du régime ivoirien, il avait réussi par un imbroglio dont lui seul a la maîtrise à créer une situation dont les réels bénéficiaires ont pu en tirer le profit qu'ils escomptaient. Après sa libération, Michel Légré semble avoir reçu la récompense pour l'effort fourni. Au point où il s'est débarrassé de la vieille Renault 25 qu'on lui connaissait, pour s'accrocher désormais au volant d'une Mercedes "C - CLASSIC" gris-métallisée flambant neuf. Entre sa résidence "privée" des II-Plateaux et la résidence familiale de Yopougon, l'homme arbore désormais un luxe qui ne dit pas son nom. Et pourtant, les événements vécus par Légré dans le cadre de cette affaire ne lui auguraient guère des lendemains si meilleurs. D'ailleurs, une incursion un peu plus attentionnée dans "le scandale Kieffer " permettrait à la Côte d'Ivoire de comprendre qu'il ne s'agissait que d'une affaire de droit commun que les révélations intentionnelles, avec un but politique déstabilisateur, de Michel Légré, ont transformé en une affaire d'Etat. En effet, le 16 avril 2005, Guy-André Kieffer est porté disparu à Abidjan. 5 Jours plus lard, soit le 21 avril, Atta Efua Kieffer, de nationalité ghanéenne et épouse du journaliste (il vivait avec elle à Abidjan) porta plainte contre x pour la disparition de son mari. Les 18 et 19 mai, le juge français Patrick Ramaël est dépêché en Côte d'Ivoire pour entendre Michel Légré sur ses propres déclarations et témoignages qu'il avait faites volontairement sans aucune pression ni contrainte, au quotidien Fraternité Malin. Le 26 mai, Michel Légré est arrêté et la Justice ivoirienne ouvre une information judiciaire. Le juge français revient un peu plus tard, suivi par Osange, l'autre épouse que Kieffer avait abandonnée en France. A partir de cet instant, la batterie déstabilisatrice se met en marche. Malheureusement pour les acteurs de ce plan funeste contre le régime ivoirien, Légré ira de contradictions en contradictions dans ses dépositions. Sont cités, tour à tour, Koré Moïse, Aubert Zohoré, Bertin Kadet, les capitaines Gouaméné et Séka Séka, Lia Sery de la Garde républicaine et maître Patrice Bailly.L'enlèvement selon lui avait été planifié par Séka Séka dans l'optique de réduire au silence Guy-André qui en savait beaucoup sur divers détournements de fonds et blanchiments d'argent du régime. Plusieurs incohérences ont été décelées dans ses dépositions. Notamment, le fait de dire d'une part que, l'enlèvement ait été fait à partir de 3 véhicules 4 x 4 de couleur verte et aux vitres teintées appartenant à l'équipe de Séka Séka et aux ordres de la Première Dame, et d'autre part, que l'enlèvement ait été fait par les hommes de Patrice Bailly, sans que ce dernier lui -même ne soit impliqué dans le coup. Bizarre !!! Ensuite, ses sources d'information seraient le capitaine Gouaméné (un nom qui n'existe pas dans les fichiers des FDS) et Lia Sery, un membre de la Garde républicaine, qui se trouvait au Libéria au moment de l'inculpation. Tant de mystères donc dans une affaire qui aura volontairement ou involontairement omis les activités mafieuses de Guy André Kieffer, qui étaient déjà pour lui, source de menaces au moment de la survenance de cet événement. S'il est vrai que Guy-André Kieffer, dans ses missions de dénigrement du régime Gbagbo dans la presse française, avait le soutien du français Jean Garnault, pourtant Conseiller du Président Laurent Gbagbo et spécialiste des écoutes téléphoniques, il ne faut pas perdre de vue ses relations mafieuses avec les réseaux financiers locaux qu'il fréquentait avec son ami Michel Légré,
En effet, Guy-André Kieffer et Michel Légré étaient en relation d'affaires avec Jean Michel Aaron-Brunetière, un homme d'affaires français qui était copropriétaire d'un cabinet de consultants opérant dans différents domaines dont celui du café-cacao. Employé en qualité de chargé de communication de ce cabinet, Guy-André Kieffer avait pour tâche de conclure, pour le compte dudit cabinet, un contrat avec l'Etal de Côte d'Ivoire pour la réforme de la filière café-cacao, en s'appuyant sur ses relations au sein du pouvoir d'Abidjan, notamment au niveau du ministère de l'Economie et des Finances, dirigé alors par Paul Antoine Bohoun Bouabré. Mais à partir de 2002, les relations entre Guy-André Kieffer et Jean Michel Aaron -Brunetière prennent un sérieux coup, suite à un différend né d'une incompréhension liée à la conclusion d'une affaire où l'une des parties s'est sentie lésée et trahie par l'autre. L'homme d'affaires français qui n'en pouvait plus des chantages de Guy-André, menace alors de lui faire la peau. Mais il faut souligner à ce niveau que Jean Michel Aaron-Brunetière n'était pas à son premier forfait. Déjà, le 20 janvier 2004, il avait fait arrêter abusivement et de la manière la plus violente, Walter Hagemann, un ressortissant allemand propriétaire du restaurant. "Le Bavarois", qu'il accusait de lui devoir la somme de 26 millions de francs, après l'avoir plusieurs fois menacé de mort Guy-André Kieffer était lui aussi sous le coup des mêmes menaces. Notamment, à son retour de Malabo en Guinée Equatoriale, où il avait conduit une délégation d'hommes d'affaires. L'animosité entre les deux hommes avait atteint un niveau tel que Guy-André s'est cru obligé d'enregistrer un CD où il a fait état de son assassinat que planifiait Jean Michel Aaron-Brunetière. Ensuite, il a fait publier un article dans le quotidien l'intelligent d'Abidjan, où il dénonçait Jean Michel Aaron Brunetière comme étant le patron d'un groupe des "escadrons de la mort". Les jours qui ont suivi ont donné ce que tout le monde sait : la disparition de Guy - André Kieffer. Quel rôle a bien pu jouer Michel Légré. L'ami commun des deux frères ennemis ? Nul ne peut le dire. Ce que l'on sait, c'est qu'il a été le dernier témoin à le voir vivant, à le voir sur le lieu de son enlèvement... à la station Ivoire Oil du supermarché Prima Center. Et après, bla bla blatout le monde est "tourné en bourrique. Et à sa sortie de prison, Michel Légré est devenu subitement riche ; très riche. Ceci explique-t-il cela ?
In "Le Temps N°1365 du mercredi 15 novembre 2007

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