Le processus de sortie de crise en Côte d`Ivoire initié par l`accord politique de Ouagadougou pourrait rentrer dans une nouvelle zone de turbulence au cours de cette semaine. Et pour cause, le chef de l`Etat Laurent Gbagbo qui doit s`adresser à la nation pour annoncer un important remaniement ministériel a l`intention de renvoyer tous les ministres du RHDP du gouvernement et revenir à son schéma initial d`après Ouaga, à savoir un gouvernement dans lequel tous les membres arboreront la tunique des ex-belligérants. Jupiter rend vraiment fou celui qu`il veut perdre. C`est certainement l`information politique de cette fin d`année en Côte d`Ivoire, elle n`est certes pas encore rendue publique ni officielle mais elle ne peut plus être traitée au conditionnel parce qu`ayant passé tous les tests de la certification et de la crédibilité auprès de personnes ressources bien introduites. En effet, cela faisait quelque temps que la rumeur circulait, elle était entretenue par des personnalités du CNRD et certains proches du chef de l`Etat. Pour ces derniers, il fallait rompre avec l`ordre ancien, la composition du gouvernement telle que inspirée par l`accord de Linas Marcoussis et la conférence de Kléber. Parce que l`accord de Ouagadougou est un compromis politique spécial, initié et discuté par les ex-belligérants à titre exclusif. Il faut donc pour sa mise en ?uvre une équipe gouvernementale dont la composition reflète cette donnée essentielle. Il n`est pas inutile de rappeler qu`à l`origine, au moment de la signature de l`accord de Ouaga, ce plan était celui de Gbagbo himself. C`est ce qui justifiait en partie son refus de voir le Premier ministre Charles Konan Banny continuer sa primature et sa farouche volonté de fragmenter le gouvernement en deux blocs, le camp présidentiel et celui des ex-rebelles. Quitte à chaque belligérant de coopter qui il veut à la place où il veut.
La pression exercée par les leaders du RHDP avait, en son temps, empêché la mise en l`état de ce plan qui répondait plus à un souci de mettre sous l`éteignoir ou à tout le moins d`affaiblir l`opposition et ses cadres avant les joutes électorales proprement dites. N`empêche, dans la formation de l`actuel gouvernement du 1er ministre Soro, Gbagbo garde en main les cartes essentielles, il contrôle la totalité des ministères de souveraineté. Ce qui lui permet de renforcer son pouvoir au détriment du chef de l`ex-rébellion devenu Premier ministre mais presque sans pouvoir.
Le processus de paix lui-même ne connaît pas un meilleur sort en dehors du long chapelet de symboles que les ex-belligérants se sont amusés à égrener durant près de 7 mois. Et c`est justement au moment d`embrasser l`un des volets les plus redoutés du processus de sortie de crise, en l`occurrence les audiences foraines, que le chef de l`Etat veut réactiver son vieux rêve, celui de chasser ses opposants du gouvernement. Comme si la présence des 5 ministres du PDCI, des 5 du RDR, et des 2 représentants de l`UDPCI et du MFA l`empêchait de tourner en rond, d`avancer vers la paix. Selon nos sources, c`est cette semaine que la nouvelle de la rupture devrait être annoncée. L`on ignore si ce sera à l`occasion de l`adresse à la nation sous forme d`interview déjà annoncée par la presse bleue que le chef des refondateurs rendra publique sa décision ou trouvera une autre forme beaucoup plus appropriée. Mais ce qui est une certitude aujourd`hui c`est que Gbagbo a décidé de prendre son destin en main, totalement. D`opérer un changement radical avec l`ordre actuel. La question qui se pose est de savoir si Laurent Gbagbo a cerné tous les contours de cette offensive du désespoir. A-t-il informé le Premier ministre Guillaume Soro ? Ce dernier qui n`a pas encore renié son appartenance au G7 s`est-il déjà déclaré disposé à accompagner le chef de l`Etat dans cette aventure ? Quid du facilitateur Blaise Compaoré et de la communauté internationale ? Et si cette man?uvre avait pour seul objectif de provoquer un clash pour détourner l`attention des Ivoiriens des audiences foraines ? Enfin, la classe politique et le RHDP en particulier accepteront-ils cette radiation du gouvernement sans protester ? Cette semaine nous situera.
Akwaba Saint Clair