jeudi 27 septembre 2007 par Notre Voie

Pour sa première intervention à la tribune de l'Assemblée générale des Nations unies, le président ivoirien, Laurent Gbagbo a livré hier un discours d'espoir, essentiellement tourné vers l'avenir. Ci-dessous, l'intégralité de son adresse.

Excellence Mesdames et Messieurs

Mesdames et Messieurs les Chefs d'Etat et de gouvernement,
Monsieur le président de l'Assemblée générale,
Excellences Mesdames et Messieurs,
Permettez-moi, tout d'abord, de saluer notre secrétaire général de l'ONU M. Ban Ki-Moon pour la qualité du travail abattu en si peu de temps à la tête de l'Organisation des Nations unies. Je voudrais sincèrement le féliciter et l'encourager pour sa bonne lecture des problèmes actuels du monde. C'est la première fois que je prends part à l'Assemblée générale des Nations unies, depuis sept ans que je suis à la tête de la Côte d'Ivoire. Comme vous le savez, je me suis pleinement consacré au règlement de la crise qui secoue mon pays et qui a tant mobilisé la communauté internationale, ces cinq dernières années. Ma présence aujourd'hui à New York à cette tribune, est la meilleure illustration du climat d'apaisement qui règne aujourd'hui en Côte d'Ivoire. Après la signature de l'accord politique de Ouagadougou issu du dialogue direct entre l'Etat et l'ex-rébellion. Cet accord a été entériné par le conseil de sécurité des Nations unies qui a adopté à l'unanimité de ses membres la résolution 1765.
Je voudrais saluer et remercier au nom du peuple de Côte d'Ivoire tous ce qui ont aidé à cette évolution positive. Les pays membres du conseil de sécurité des Nations unies, les pays membres du conseil de paix et sécurité de l'Union africaine. Tous les pays de l'Union africaine. Les pays membres de la communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO). Je remercie particulièrement les chefs d'Etats dont l'implication personnelle a été décisive dans le règlement de cette crise ivoirienne. Le président Tabo Mbeki, médiateur de la crise ivoirienne désigné par l'Union africaine. Le président Blaise Compaoré, facilitateur du dialogue direct inter-ivoiriens en sa qualité de président en exercice de la CEDEAO.
Nous avons constaté que malgré les efforts déployés durant quatre années par la communauté internationale, le processus de paix était bloqué et le pays se trouvait dans l'impasse. C'est pourquoi le 19 décembre 2006, j'ai proposé à mes compatriotes un plan de sortie de crise articulé autour de 5 points :
-l'instauration d'un dialogue direct avec la rébellion, en vue du désarmement et de la réunification du pays :
-La suppression de la zone de confiance ;
-La création d'un service civique national ;
-l'amnistie générale ;
-la mise en place d'un programme d'aide au retour des déplacés de guerre.
Ce plan qui était fondé sur l'expérience des solutions envisagées jusque-là et partait d'une approche différente en vue d'obtenir l'appropriation complète du processus de paix par les Ivoiriens eux-mêmes. J'ai donc engagé le dialogue direct avec la rébellion. Nos discussions, placées sous la facilitation du président Blaise Compaoré, se sont déroulées au Burkina Faso le pays voisin, le pays de l'Afrique de l'Ouest qui a les liens les plus forts de point de vue de l'histoire et de la sociologie avec la Côte d'Ivoire. Elles ont abouti à la signature, le 4 mars 2007, de l'accord politique de Ouagadougou. Conformément à cet accord, un nouveau gouvernement a été formé. Il est dirigé par le chef de l'ex-rébellion, Monsieur Guillaume Soro. Avec ce gouvernement, nous avons enregistré d'importants progrès en peu de temps. Un centre de commandement intégré. Regroupant des militaires des forces armées nationales et ceux de l'ex-rébellion a été créé le 16 mars 2007. Il a pour mission de mettre en place une force mixte chargée d'assurer la sécurité et la libre circulation des personnes et des biens sur tout le territoire national. Une ordonnance d'amnistie générale a été prise le 11 avril 2007. Le désarmement a effectivement commencé avec le bûchet de la paix, organisé le 30 juillet 2007 à Bouaké. Le redéploiement de l'administration et la réinstallation des magistrats sur l'ensemble du territoire sont effectifs. Un plan de retour des déplacés est mis en place. Les audiences foraines en vue de l'identification des populations et la mise à jour des listes électorales ont démarré hier mardi 25 septembre 2007. Ainsi donc nous faisons de grands pas sur la voie de la paix, depuis l'accord de Ouagadougou. La leçon que je tire de cette expérience du dialogue direct entre les autorités étatiques et la rébellion m'amène à inviter la communauté internationale à privilégier les solutions de terrain dans le règlement des conflits. L'ONU à New York devait s'organiser pour veiller à l'application des solutions retenues par les parties en conflit.

Excellences Mesdames et Messieurs,

La Côte d'Ivoire va sortir de la crise. La Côte d'Ivoire est en train de sortir de la crise. Elle a besoin aujourd'hui plus que jamais du soutien de la communauté internationale pour construire la paix et la stabilité à l'intérieur de ses frontières et dans la sous-région ouest-africaine. Dans ce contexte, compte tenu du climat d'apaisement qui règne dans le pays, je souhaite que les Nations unies revoient à la baisse l'indice de sécurité. La phase 3 ne correspondant plus à la réalité. Dans le même esprit, avec la mise en ?uvre de l'accord de Ouagadougou, la Côte d'Ivoire est aujourd'hui réunifiée. Il appartient donc à l'Etat d'assurer l'ordre et la sécurité publique sur toute l'étendue du territoire nationale. L'accord prévoit explicitement dans le cadre du redéploiement de l'administration, les forces de l'ordre accompagnent le processus, en sécurisant le personnel de l'administration ainsi que les populations civiles. Je voudrais donc plaider ici solennellement la levée ponctuelle de l'embargo sur les armes afin de permettre à l'Etat ivoirien de remplir sa mission de protection de personnes et des biens. Par ailleurs, et toujours dans le contexte actuel de la réconciliation nationale, les Ivoiriens demeurent préoccupés par le maintien des sanctions individuelles infligées à certains de nos compatriotes. Depuis l'accord politique de Ouagadougou, ces jeunes gens s'impliquent corps et âme dans la recherche de la paix. C'est pourquoi, je demande formellement à l'ONU, et cela dans l'esprit et la lettre de l'accord politique de Ouagadougou entériné par la résolution 1765, la levée des sanctions infligées à Blé Goudé Charles, Eugène Djué et Fofié Kouakou.

La Côte d'Ivoire est certainement un pays solide. Et notre gestion des finances publiques a permis de faire fonctionner l'Etat ivoirien et d'assurer le minimum de bien-être aux populations. Mais la persistance de la crise a fini par réduire les ressources financières de l'Etat et par mettre en mal son équilibre financier. Je demande l'aide aujourd'hui, pour me permettre de financer les actions liées directement au règlement de la crise : le Service civique, les audiences foraines, les élections générales, le retour des déplacés de guerre et, de façon générale, la consolidation de la paix. Mais au-delà des actions à court et moyen termes, la Côte d'Ivoire a besoin de l'aide internationale pour renforcer les bases d'une reprise économique plus vigoureuse sur le long terme. Nous avons à réhabiliter et à renforcer nos infrastructures communautaires. Nos écoles, nos centres de santé ont subi les dégâts de la guerre. Nous devons réhabiliter et renforcer nos infrastructures économiques. Les routes, les voies ferrées, les installations électriques et l'adduction d'eau, durement éprouvées par la crise.

Excellence Mesdames et Messieurs,

Tous les observateurs et tous les acteurs de la crise ivoirienne s'accordent à dire que les élections constituent la finalité du processus de sortie de crise en Côte d'Ivoire. La tenue d'élections transparentes, libres et ouvertes à tous est non seulement une exigence de ma culture politique, mais aussi et surtout une nécessité démocratique. Les élections sont un moyen de bonne gouvernance. J'ambitionne de faire de mon pays, la Côte d'Ivoire, un Etat moderne. C'est-à-dire un Etat dans lequel le peuple désigne ses dirigeants au moyen d'élections justes et transparentes. Les élections démocratiques constituent donc pour nous une nécessité pour la modernisation de la vie politique de notre pays. Les élections constituent aussi une nécessité pour la relance de notre économie. Nous devons absolument organiser les élections prochaines en Côte d'Ivoire et les réussir pour redonner confiance aux opérateurs économiques du pays et d'ailleurs. Les élections constituent encore une exigence pour la stabilité de notre pays et de la sous-région. Il convient d'organiser rapidement les élections pour conférer la légitimité politique permettant à ceux qui exerceront du pouvoir d'Etat de stabiliser le corps social en Côte d'Ivoire et de garantir la relance économique en Afrique de l'Ouest. Les élections constituent, enfin, un impératif constitutionnel. Selon notre Constitution, en effet, lorsque les circonstances exceptionnelles rendent impossible l'organisation des élections comme c'était le cas avant la réunification du pays, toutes les institutions de la République ne fonctionnent plus qu'en vue des élections. C'est pourquoi, il nous faut rapidement organiser les élections pour sortir d'une situation, certes constitutionnelle, mais exceptionnelle. Pour toutes ces raisons, j'invite de cette tribune des Nations unies, tous nos amis à travers le monde, mais aussi et surtout les hommes et les femmes politiques de mon pays, les Ivoiriens et toutes les populations vivant en Côte d'Ivoire à s'engager dans le processus de paix. Je les invite à s'investir entièrement dans le processus électoral en cours, à contribuer chacun à son niveau, à la réconciliation nationale et à la consolidation de la paix.

Que Dieu nous bénisse !
Je vous remercie.

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