mercredi 26 septembre 2007 par Le Patriote

La récente concertation sur la sécurisation et la fluidité du corridor de transit a levé un coin de voile sur les chiffres et les responsabilités du racket en Côte d'Ivoire.

Tous coupables. En effet, c'est ce qui ressort d'un document de l'Office ivoirien des chargeurs (OIC), qui pointe un doigt accusateur vers les militaires des Forces de défense et de sécurité de Côte d'Ivoire (FDS-CI) et les Forces armées nationales des forces nouvelles (FAFN). M. Marcel Gossio, directeur général du Port autonome d'Abidjan (PAA), s'appuyant sur un pan du rapport de l'OIC, a évoqué l'ampleur que prend le phénomène du racket et ses conséquences sur la bonne circulation des marchandises en provenance et à destination des pays sans littoral. Selon le rapport, les structures privées qui ont été agréées par l'Etat-major des armées pour faciliter les mouvements des biens et des personnes en temps de guerre, dans le cadre de l'Action civilo-militaire (ACM), s'arrogent les missions de l'OIC qui pourtant bénéficie d'un service public concédé par l'Etat de Côte d'Ivoire. Situation qui entraîne un véritable désordre occasionnant toutes sortes d'abus et de tracasseries au détriment des honnêtes opérateurs. M. Koné Abdoulaye Blacky, représentant le directeur général de l'OIC, après avoir indiqué que l'Etat de Côte d'Ivoire a confié à cet office, entre autres, la mission relative à la fluidité routière à travers la convention de concession pour le financement, l'organisation et l'exploitation de l'escorte groupée des camions de transport et de marchandises en 2001, a abondé avec chiffres à l'appui, dans le même sens que M. Gossio.

Aujourd'hui, il est regrettable de constater ce qui se passe sur le terrain après la célébration de la flamme de la paix à Bouaké, le 30 juillet 2007. Dans cette situation de crise sans précédent, l'état des lieux se caractérise essentiellement par, le nombre pléthorique de barrages et points de contrôle, des extorsions de fonds, des pertes de temps, la multiplicité des agréments délivrés par l'Action civilo-militaire, la dégradation très avancée du réseau routier. S'agissant des barrages et points de contrôle, l'OIC révèle une prolifération du nombre de barrages et points de contrôles dans les villes et sur les axes routiers de l'ensemble du territoire national. En zone Fds-CI, à Abidjan : de Vridi au corridor Gesco distant d'environ 23 km, 13 barrages et points de contrôle, soit un barrage à chaque 1 770 m ont été repertoriés. Du corridor de la Gesco à Tiébissou, long de 285 km, on compte 22 barrages et points de contrôle, soit un barrage tous les 13 km. D'Abidjan à Noé à la frontière avec le Ghana, long de 120 km, l'opération ticket unique de traverse lancée en mars 2006 a permis de réduire le nombre de points de contrôle à 06. La même opération du ticket unique qui a limité le nombre de points de contrôle à 22, en dehors des corridors, rencontre beaucoup de difficultés dans le respect de cette directive avec la hiérarchie des Forces de défense et de sécurité.

En zone des Forces armées des forces nouvelles, de Djébonoua à Ouangolo, long de 256 km, l'on dénombre 24 barrages et points de contrôles, soit une barrière tous les 10 km.

Aussi bien sur les axes routiers nationaux qu'inter Etats, les usagers sont victimes de rackets et de tracasseries. Au titre des corridors de transit, il y a plusieurs types de frais payés. En zone Fds-CI, l'on note les frais d'enregistrement à l'ACM/CPCO, frais d'escorte et de convoyage, extorsion de fonds aux barrages et points de contrôle. Chaque point de contrôle est un lieu de racket des conducteurs routiers. Les frais varient entre 500 et 5000 Fcfa en fonction de l'humeur des agents. Il y a aussi des frais de signature des documents douaniers. Tous les camions dont les marchandises sont en suspension des droits de douane sur le territoire ivoirien signent leurs documents à la Direction régionale des douanes de Yamoussoukro. Cette signature qui devrait être sans frais est obtenue par les opérateurs contre le paiement d'une somme qui va de 3000 à 15 000 Fcfa selon la nature de la marchandise. En zone Fafn, les frais payés pour la traversée du corridor de transit ivoirien se chiffrent selon la nature du produit transporté et de la destination aux montants figurant dans les tableaux présentés.

Ajouté à cela, la multiplicité des structures agréées. En zone Fds-CI, l'ACM/CPCO délivre des agréments moyennant 100 000 Fcfa à des démarcheurs pompeusement appelés opérateurs économiques pour organiser le convoyage des camions de transport de marchandises au détriment de l'OIC. Pour l'année 2007, ces structures agréées par l'ACM/CPCO sont au nombre de 58. Ces agréments doivent être renouvelés tous les six mois au même tarif de 100 000 Fcfa. En zone Fafn, la Centrale délivre également des agréments à des personnalités physiques pour l'activité de transport de marchandises à des coûts variant de 500 000 Fcfa à plusieurs millions de Fcfa. S'agissant des pertes de temps, au niveau de Tiébissou, un désordre et une lourdeur dans la prise en compte des camions règnent. A titre d'illustration, des camions vides en provenance des pays de l'hinterland et en partance pour le Port d'Abidjan arrivent à Tiébissou entre 7h et 9h. Ils en repartent au plus vers 16h, à cause des formalités de prise en compte pour le convoyage à l'ACM de Yamoussoukro (enregistrement, regroupement des agents d'escorte, affrètement d'un véhicule d'escorte). Aujourd'hui, tout le monde est d'avis que la levée de toutes ces entraves sera une contribution significative du repositionnement de la Côte d'Ivoire sur l'échiquier sous régional.

Jean Eric ADINGRA

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