samedi 22 septembre 2007 par Le Nouveau Réveil

Réagissant à nos articles de mardi dernier sur la réforme de l'impôt général sur le revenu qui devait entrer en application à partir du 1er janvier 2008, la direction générale des Impôts s'est cru fort obligée de se livrer à une gymnastique intellectuelle des plus ardues pour tenter de démontrer que notre interprétation de l'article 11 de l'ordonnance N°2007-488 du 31 mai 2007 était erronée et qu'en réalité cette reforme entraînait une économie d'impôt pour le salarié. Pure diversion pour endormir la masse laborieuse
Pour des raisons qui lui sont propres, la direction générale des Impôts a eu, dans le cadre de cette affaire, une attitude pour le moins suspecte. Elle a en effet choisi pour la publication de son "démenti officiel" des supports qui n'avaient pas traité de la question. Elle a préféré payer des espaces, 2 pages pleines, plutôt que de nous adresser comme il est d'usage en la matière, un droit de réponse que la loi sur la presse nous obligeait à publier dans les mêmes conditions que les articles qui ont suscité ces mises au point. Mais hier matin, la surprise fut encore plus grande lorsque nous découvrons dans notre lot de courriers du jour un droit de réponse formulé exactement dans les mêmes termes que les fameuses "précisions" que la DGI avait fait publier le même jour par des confrères. Une telle méprise d'une structure étatique aussi importante que la DGI nous déliait ipso facto de notre obligation de publier ce droit de réponse signé de M. Feh Kessé. L'autre remarque que l'on peut relever sur la forme du communiqué publié par Fraternité Matin et Soir'Info, c'est qu'il est inutilement long. La réponse de la DGI ne précise vraiment rien, ne démontre rien, mais se contente d'affirmations et d'allusions vagues.
Nous l'avons lu et relu, nous avons même approché certains spécialistes du droit fiscal et de la comptabilité. Leur jugement.

L'avis des spécialistes
"Je crois que c'est de la diversion pure et simple. Je lis là plus des propos pour apaiser des gens que l'Etat ne s'apprête pas à effectuer une opération chirurgicale sur leur salaire qu'autre chose. Dans ce que la DGI a publié, il n'y a pas de démonstration fiscale claire qui puisse permettre aux salariés de comprendre le sort qu'on leur réserve. On veut rassurer en entretenant le flou. Et pourtant, ce que vous avez écrit est très clair, la réforme a été rédigée en des termes sans équivoque, c'est écrit en français. Quand l'article 11 point 17 dit par exemple que les salariés, qui se trouvent dans la tranche de 2,2 millions à 5,2 millions de francs, annuel, sont assujettis à un impôt sur le revenu de 22%, qu'est-ce que ça peut vouloir dire d'autre que si le cumul annuel du salaire du travailleur subira ce taux de 22% s'il se trouve dans cette catégorie ? Je pense qu'il faut éviter de prendre les Ivoiriens pour des idiots. Les choses sont claires et on n'a pas besoin de faire le droit fiscal pour comprendre, faisait remarquer hier un spécialiste du droit des affaires que nous avons consulté.
Pour lui en effet, la fameuse précision de la DGI relève plutôt de la moquerie. C'est une injure à l'intelligence des Ivoiriens. Car, comment peut-on parler d'économie d'impôt pour un salarié qui a moins de 600.000F par mois alors que si l'on prend le cas d'un travailleur qui a un revenu mensuel de 500.000F, celui-ci se trouve dans le cadre de la réforme, dans la tranche d'imposition de 24% de l'IGR ? Parce que son revenu annuel qui est de 6 millions se trouve dans la tranche de 5,2 millions à 9,6 millions de francs. Le comble du ridicule, c'est quand l'on insiste pour dire que "pour les salaires supérieurs à 600.000F, il a été démontré par nos services que le nouveau barème n'entraîne qu'un effet marginal sur leur contribution habituelle". Alors même que le taux de l'IGR ne cesse de grimper jusqu'à atteindre 36%. Car si le travailleur qui touche 600.000F paye 24% au titre de l'IGR seulement (c'est important de le rappeler car il existe d'autres impôts et prélèvements sur les maigres salaires), celui qui a un salaire mensuel de 2 millions et qui a donc un revenu annuel de 24 millions subira l'IGR à hauteur de 36%. Calculez 36% de 2 millions et vous verrez ce que les impôts prélèvent sur votre salaire.
Chose bizarre, le DG des Impôts aurait demandé à la Confédération générale des entreprises, conduite par son président, de faire effectuer par les entreprises, grandes et petites, des simulations afin de relever les insuffisances éventuelles et de proposer les corrections appropriées". On va donc corriger, si l'on en croit M. Feh Kessé, une ordonnance qui a déjà été signée par le chef de l'Etat, promulguée, publiée au Journal officiel comme loi de la République et qui n'attend que le 1er janvier prochain pour entrer en vigueur. C'est comme si avant l'application d'une loi régulièrement votée par les députés, on va demander à ses destinataires s'ils ont des observations à formuler sur cette loi. Ça s'appelle le médecin après la mort, tout simplement. Et les travailleurs de Côte d'Ivoire ne souhaitent pas être les victimes de cette bombe à fragmentation fiscale qui se trouve dans les tiroirs de M. Feh Kessé.
Nous y reviendrons plus en détails la semaine prochaine.
Akwaba Saint Clair

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