jeudi 20 septembre 2007 par Le Patriote

C'est connu, la guerre a engendré et amplifié un phénomène particulièrement destructeur et meurtrier, celui des Squadrons Killers entendez par là, les escadrons de la mort. Ce phénomène né en Amérique Latine sous la dictature de Pinochet a pris pied en Côte d'ivoire durant la guerre et s'est manifesté avec une rare violence occasionnant l'élimination extra judiciaire de plusieurs responsables et militants de l'opposition. Le premier à ouvrir la longue liste des victimes de ces escadrons, Téhé Emile, leader du Parti National Ivoirien (PNI). Enlevé à son domicile de Yopougon la veille dans la nuit, son corps sans vie a été retrouvé sur le macadam dans les environs de la forêt du Banco le matin même de la première grande manifestation de rue des jeunes Patriotes le 2 Octobre 2002. Ses ravisseurs, apprend-t-on aujourd'hui, lui reprochait de vouloir organiser une marche visant à chasser Gbagbo du pouvoir. A la suite de Téhé Emile, c'est le Dr Benoit Dacoury, jeune frère de l'actuel ministre des victimes de guerre qui est retrouvé inerte, sans vie, sur l'axe menant à Anyama du côté d'Abobo N'Ndotré le 8 novembre 2002. Il avait été enlevé deux jours plus tôt, l'après midi du 6 novembre dans sa clinique de Cocody par des hommes en armes non identifiés jusque là. Que lui reprochait-on ? Certainement, ses relations de fraternité avec celui qui n'allait pas tarder à se révéler comme étant l'une des éminences grises de la rébellion qui contrôlait la moitié Nord du pays depuis le 19 septembre. Son désapparentement avec Laurent Gbagbo dont il fut durant de longues années le médecin traitant ? C'est probable. Février 2003, précisément le 2 février, le jour d'une autre grande manifestation de rue des jeunes patriotes de Blé Goudé, le célèbre artiste comédien Camarah Yêrêfê dit H , chargé de communication à la mairie d'Adjamé et militant affiché du RDR est lui aussi retrouvé mort sur le bitume dans les environs de la casse d'Adjamé, le corps marqué par des traces de torture, alors qu'il avait été enlevé la veille aux environs de 21 heures par un mystérieux commando d'hommes en armes à son domicile Yopougon Sideci devant se enfants et son épouse. On lui reprochait d'être entré en collusion avec la rébellion dont le chef est aujourd'hui le Premier ministre de Côte d'ivoire. Cette fois, la presse, aussi bien nationale qu'internationale, fait largement écho de cet odieux et lâche assassinat. La presse étrangère va, elle, jusqu'à mettre en cause des proches parents et des membres de l'entourage du chef de l'Etat. Piqué au vif, celui-ci se sentira obligé de réagir au cours d'une mémorable conférence de presse au palais présidentiel. Il se défendra sans bien convaincre. Le mal étant déjà fait. A cette liste non exhaustive des victimes des Squadrons Killers sous le règne des Refondateurs s'ajoutent les nombreuses victimes anonymes des expéditions punitives conduites par des hommes en armes contre des populations civiles sans moyens de défense aussi ici à Abidjan que dans certaines villes de l'intérieur. C'est par exemple le cas de la ville de Daloa que le chef rebelle Zakaria Koné a tenté de prendre le 13 octobre 2002 avant de buter sur la résistance des soldats loyalistes. En représailles, ceux-ci ont conduit une expédition dans certains quartiers populeux de la ville qui a occasionné plus de 200 morts, à en croire la presse à l'époque des faits parmi les populations allogènes et les ressortissants étrangers de la ville, notamment les communautés malinkés, maliennes, burkinabés et guinéennes. De riches commerçants maliens ont payé de leur vie le passage dans leurs quartiers de résidence de certains soldats loyalistes lors des opérations de ratissage qui ont suivi la tentative manquée de conquête de Daloa par Zakaria Koné. A cela s'ajoutent les charniers découverts dans les villages de Pélézi et Monoko Zohi à la lisière de la localité de Vavoua. La commune d'Abobo réputée pour abriter un fort taux de militants de l'opposition a payé le plus lourd tribut à l'action des escadrons de la mort. Des dignitaires religieux musulmans, tel l'Iman Samassi des II Plateaux ont péri du fait de ces escadrons qui ont longtemps semé la tristesse et la désolation dans de nombreuses familles. En plus, les actes d'intimidation et les perquisitions sans mandats des domiciles ciblés par ces tueurs d'un autre âge ont conduit nombre d'opposants à prendre, très vite, les chemins de l'exil, pour ne pas finir les quatre fers en l'air. Ainsi, toute la direction d'un parti comme le RDR s'est retrouvée à un moment donné, à Bamako, contraint à un exil humiliant. Les critiques de la presse et l'entrée en scène des organisations internationales de défense des droits de l'homme ont permis quelque peu de circonscrire le phénomène de escadrons de la mort mais la menace demeure en raison du fait que ces tueurs en série agissent de façon imprévisible et sans visage.
Khristian Kara

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