mercredi 19 septembre 2007 par Notre Voie

Au moment où tous les Ivoiriens espèrent au retour de la paix grâce à l'accord de Ouagadougou, Ibrahim Coulibaly et ses amis sont pointés du doigt. On leur prête l'intention de faire obstacle au processus de paix en cours. Claude Sahi, le président de UNIR, parti créé par IB, s'en défend. Notre Voie : Comment vivez-vous ce cinquième anniversaire du déclenchement de la crise ivoirienne ?
Claude Sahi : Cet anniversaire est une rupture et doit être un moment de méditation. Les Ivoiriens qui entendaient parler de la guerre comme étant quelque chose de l'esprit, l'ont réellement vécue et cela a entraîné des traumatismes. Cinq années de guerre, en principe, nous devons nous arrêter pour méditer sur le sort de notre pays. Dans tous les cas, nous devons comprendre qu'en dépit des malheurs que nous avons connus, toutes les grandes nations, qu'il s'agisse de la révolution française, qu'il s'agisse de la guerre de sécession aux Etats-Unis, sont parties de ces difficultés pour émerger. L'essentiel, pour nous, est de tirer un avantage énorme des difficultés que nous avons connues pour faire de la Côte d'Ivoire ce que tous les Ivoiriens veulent que ce pays soit. N.V. : Tout le monde est d'accord pour aller à la paix, sauf vous UNIR et M. Ibrahim Coulibaly dit IB.
CS : Je vois l'esprit de la question. Je vous vois venir. En créant le parti politique UNIR, en nous présentant comme une force de proposition et une force de réflexion au service de la population, en créant une structure politique pour conquérir le pouvoir d'Etat, Ibrahim Coulibaly, avec ses collaborateurs civils que nous étions, venait de poser l'acte qui prouvait qu'il accordait de l'importance au suffrage universel. A partir du moment où la structure politique a été créée, nous avons officiellement, publiquement fait des déclarations, nous avons eu des prises de position sur certains sujets majeurs de la vie politique nationale sans nous cacher. Comment peut-on suspecter Ibrahim Coulibaly d'être contre l'évolution de la paix en Côte d'Ivoire ? Mais je comprends. Nous, nous comprenons que des nostalgiques du désordre veuille trouver des boucs-émissaires. Et je pense que de la position qu'il occupe, il est le bouc- émissaire idéal. N.V. : Comment expliquez-vous les accusations dont est l'objet votre mentor Ibrahim Coulibaly de la part de M. Wattao ?
C.S. : J'aurais aimé qu'à l'anniversaire de cette crise ivoirienne, on ne revienne pas sur des questions qui ont causé beaucoup de tort et continuent d'en causer. On aurait aimé qu'on parle avec beaucoup de maturité du développement de la Côte d'Ivoire, de la formation des jeunes, de la question du travail. Revenir sur les coups d'Etat permanents et inlassables, cela fait longtemps que nous en entendons parler. J'étais à Paris quand j'apprenais chaque mois, chaque semaine, que M. Ibrahim Coulibaly devait attaquer les positions des Forces nouvelles. Nous disons qu'il serait souhaitable que tout le monde soit associé au processus de retour à la paix. A partir du moment où la rébellion a eu deux pans avec des dissidences en son sein, il était important que les deux têtes soient associées à la résolution de la crise. N.V. : M. Coulibaly veut-il être ministre ?
C.S. : Pourquoi vouloir ramener tout à un poste ministériel ? Nous savons qu'il a été un acteur majeur dans la rébellion. Nous savons que par ses prises de position, il peut faire avancer les choses d'une façon ou d'une autre. Je profite pour m'interroger sur certains faits majeurs. A partir du moment où le président de la République, M. Laurent Gbagbo, a accepté de discuter directement avec le chef proclamé de la rébellion, M. Guillaume Soro et que la population du Sud, dans sa majorité, a accepté de pardonner et de se réconcilier avec les personnes qui, elles-mêmes, ont porté le fer dans le sein de la mère-patrie, comment se fait-il que le Premier Guillaume Soro, doublé de sa casquette de chef de la rébellion, ne soit pas capable de procéder à une réconciliation au son sein de son mouvement, entre frères d'arme qui ont commencé le mouvement ?
N.V. : Vous qui avez été les premiers à vous rapprocher du président de la République, n'y a-t-il pas un peu d'amertume à voir vos frères ennemis vous coiffer au poteau ?
C.S. : Nous avons été les premiers à créer une structure politique et à entrer donc dans les institutions républicaines. C'est différent de nous rapprocher du chef de l'Etat. Mais ce n'est pas de l'amertume, c'est plutôt de l'incompréhension. Nous avons décrié le fait qu'on réduise la crise ivoirienne à 3, 4 ou 5 présidents de partis politiques, qu'on a tout de temps appelés les 5 grands, qui devraient décider pour la Côte d'Ivoire. Nous avons dit que ce n'est pas normal. Mais vous conviendrez avec moi que les antagonismes qu'il y a eu avec Soro sont tellement profonds que toute prise de position de sa part peut entraîner des interpellations de l'autre côté. Vous me parlez de Wattao, je ne souhaite même pas qu'on entre dans ce débat parce que pour moi, il faut aller à l'essentiel, c'est-à-dire tout ce qui peut aider la Côte d'Ivoire.
N.V. : Et qu'est-ce qui peut aider aujourd'hui la Côte d'Ivoire ?
C.S. : Associer à l'application de l'accord de Ouagadougou, d'autres personnalités comme Ibrahim Coulibaly. Pour que la population arrête d'être traumatisée par les rumeurs. Nous devons aussi aller aux élections. Car de report en report, le doute finit évidemment par s'installer, et nous avons l'impression que l'on n'est pas pressé d'en sortir. Or, la seule façon d'y aller, c'est le désarmement. Et le Premier ministre devrait avoir autorité pour aider le président de la République à désarmer. Si le désarmement n'existe pas, comment voulez-vous qu'on aille aux élections ? Je pense que c'est un problème des politiques ou un problème de stratégie. Dans tous les cas, le désarmement ne se fait pas encore et l'on peut avoir plusieurs raisons face aux cris de loups que l'on entend tous les jours. On peut faire croire qu'on désarme, Ibrahim Coulibaly voudra un jour ou l'autre contre-attaquer. Cette raison peut être suffisante aux yeux de la communauté internationale pour que le désarmement se fasse lentement. Sinon, en réalité, il faut que les gens accordent, je pense, beaucoup d'importance à tous les acteurs politiques et militaires pour que la Côte d'Ivoire avance.



Entretien réalisé par Guillaume T. Gbato et Benjamin Koré Coll : Djè Abel

www.225.ci - A propos - Plan du site - Questions / Réponses © 2023