vendredi 7 septembre 2007 par Notre Voie

Nommé préfet des Lagunes, Sam Etiassé a décidé de nettoyer l'Etat civil à Bingerville et à Anyama. Dans cet entretien, il dit pourquoi. Notre Voie: Dans quel état d'esprit avez-vous pris la tête de la préfecture d'Abidjan, quelques années après sa suppression?
Sam Etiasé: Il n'y a pas eu de suppression puisque les ex-compétences de la préfecture d'Abidjan étaient transférées à la Direction générale de l'administration du territoire (DGAT). C'est donc une continuité du service. Il n'y a donc pas eu de rupture, ou de fermeture à proprement parler, dans la mesure où le directeur général exerçait les fonctions de préfet. N.V.: Quelle est la répartition des compétences entre vous et la DGAT?
S.E.: La DGAT est la structure qui est au dessus de l'ensemble des différentes préfectures. C'est notre hiérarchie. Je rends compte à la fois au ministre de l'Intérieur et à la DGAT. N'oubliez pas que, je suis préfet d'Abidjan, préfet de la Région des lagunes qui compte sept départements. Abidjan, Dabou, Jacqueville, Grand-Lahou, Alépé, Sikensi et Tiassalé. J'ai les attributions à la fois du préfet de région et du préfet du département d'Abidjan. A ce niveau là, nous avons en charge la coordination de trois sous-préfectures : Anyama, Bingerville et Songon. N.V.: Vous avez placé votre service sous le signe de la loyauté et la fidélité au président de la République. Vous avez surtout interpellé les populations sur ce que vous appelez les anciens réflexes. Est-ce que vous pouvez être plus explicite?
S.E.: J'ai été nommé par le chef de l'Etat, sur proposition du ministre de l'Intérieur. Il faut mériter la confiance du chef de l'Etat. J'ai demandé aux populations de venir à la préfecture pour qu'ensemble, nous réglions les problèmes. Si nous n'y arrivons pas, à ce moment-là, nous allons rendre compte au ministre de l'Intérieur. Comme, je l'ai dit, je n'accepterais pas que pour des problèmes qu'on peut gérer à la préfecture, on aille déranger le ministre ou même le chef de l'Etat. C'est une mauvaise habitude que de profiter d'une certaine position pour aller déranger le chef de l'Etat. Chacun, à son niveau, doit faire son travail. N.V.: Cet ancien réflexe que vous condamnez n'est-il pas né à la suite de la suppression de la préfecture d'Abidjan?
S.E.: Il appartient au service de la préfecture de tout faire pour créer de nouveaux réflexes, pour faire connaître la préfecture. Les problèmes qu'on doit régler à la préfecture doivent se faire ici. Il appartient aux services de la préfecture de s'organiser de telle sorte que les gens ne partent plus voir directement le chef de l'Etat. C'est pourquoi, je dis que nous allons travailler dans la loyauté et la transparence. En extirpant de nos rangs, ceux qui ont tendance à jeter le discrédit sur la préfecture. N.V.: Le préfet est le représentant de l'Etat dans sa circonscription. Vous êtes à Abidjan où tout le gouvernement est représenté. Comment allez-vous organiser votre travail?
S.E: C'est une histoire de parkings partagés. A Paris par exemple, il y a le préfet de l'île de France et le préfet de Paris. Pourtant, tout le gouvernement français est bien-là. Il n' y a donc pas de problème. Puisque les compétences sont définies par la loi.
N.V.: Avec le problème de la chefferie dans les villages ébrié, peut-on dire que vous avez du pain sur la planche?
S.E.: Nous avons des problèmes à Abidjan. Il y a le problème de la chefferie traditionnelle mais aussi de la gestion du foncier et de l'Etat civil. Il y a des villages où nous avons deux, trois ou quatre de chefs de village. Il y a un bicéphalisme au niveau de certains villages. Ce sont des problèmes qu'il faut régler en amont. Il n'y aura plus de problèmes quand on saura à qui on s'adresse. C'est ce que nous sommes en train de faire. Chaque jour, tous les villages défilent ici pour des séances de travail sur le problème de la chefferie. N.V.: Ces séances de travail sont-elles fructueuses?
S.E.: Nous avons un atout, c'est que la société tchaman est bien organisée. En effet, au niveau d'Abidjan, nous avons 60 villages. 20 villages à Songon autant à Abidjan et à Bingerville. Ces 60 chefs de villages ont crée une fédération, dirigée par un responsable. La gestion de la chefferie en pays atchan se fait par génération. Il y a quatre générations. Aujourd'hui, ce sont les Dougbo qui sont au pouvoir. Ils ont une Constitution atchan-dougbo à laquelle le préfet se réfère pour régler les problèmes de chefferie. Dans un premier temps, il faut éliminer tous ceux qui ne sont pas de la génération atchan-dougbo mais qui veulent être chefs de village. Ceci étant fait, j'ai demandé aux Dougbo de me trouver un chef. Et ça marche. N.V.: Il est fait cas de fraude sur l'Etat civil à Anyama. En avez-vous connaissance? Si oui, quelles mesures envisagez-vous de prendre?
S.E.: Effectivement, nous avons remarqué qu'au niveau d'Anyama et surtout de Bingerville, il y a problème dans la gestion de l'Etat civil. Tout récemment, je lisais dans les journaux que des agents de la mairie d'Anyama ont été interpellés et gardés à vue pour fraude sur l'Etat civil. Celui qui veut diminuer son âge, un étranger qui veut se faire établir des papiers, se rend tout simplement à Anyama. Cette pratique doit prendre fin. Il faut nettoyer l'Etat civil. Pour que, avec les audiences foraines, les Ivoiriens comme les étrangers puissent avoir leurs papiers. Les sous-préfets d'Anyama et de Bingerville ont été instruits. Nous avons fait une mise en garde aux agents indélicats. Si nous prenons un fraudeur, il n'y a pas de négociation. On ne peut pas se permettre de créer une nouvelle crise que d'autres ont appelé une crise identitaire. Nous n'allons pas jouer avec l'Etat civil. La première mission des sous-préfets est de nettoyer l'Etat civil. Ils devront se mettre en rapport avec le procureur quand il y a un doute sur les pièces d'une personne. N.V.: Pour les audiences foraines qui s'annoncent, des consignes spécifiques ont-elles été données aux sous-préfets?
S.E.: Nous sommes allés plus loin. Nous avons fait une tournée dans les trois sous-préfectures. Et bientôt, nous allons entamer les communes d'Abidjan. Nous voulons faire la sensibilisation sur les audiences foraines. Pour mener à bien cette opération, il faut faire en sorte qu'à la tête de chaque village, il y ait un chef à qui nous donnons des consignes. La mission est de mettre à la disposition de la Justice, ceux qui veulent frauder sur la nationalité. Seuls les Ivoiriens doivent faire l'enrôlement et avoir les cartes d'électeur. N.V.: La gestion du foncier rural pose également problème dans certains villages. Etes-vous saisi de ce problème?
S.E. : Pour voir clair dans cette affaire, nous avons décidé de suspendre tout. Aussi bien au niveau de Bingerville, que d'Anyama. A Anyama, tous ceux qui ont des plantations au bord de la route prennent un géomètre privé qui fait un morcellement. Puis le lotissement est approuvé par le ministre de la Construction. La suite, ce sont des constructions anarchiques. Sans plan d'urbanisation. Au niveau des lots, ce sont des attributions à trois ou quatre personnes. Cela crée des conflits. Afin de préserver l'ordre public, la sécurité, la salubrité publique, le préfet à décidé, en attendant de rencontrer les autorités concernées, de suspendre les lotissements à Anyama et Bingerville.

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