jeudi 6 septembre 2007 par Nord-Sud

Konaté Sidiki, le porte-parole des Forces nouvelles, explique dans cet entretien, les décisions prises par le Comité d'évaluation de l'Accord de Ouagadougou.


?Le Comité d'évaluation vient de se réunir à Ouagadougou sous la présidence du facilitateur, le président Blaise Compaoré. Des recommandations ont été faites, notamment sur l'identification. Il est demandé que cette identification commence fin septembre.

Effectivement, le Comité d'évaluation et d'accompagnement de l'Accord de Ouagadougou a eu sa deuxième session le 4 septembre dans la capitale, burkinabé. En présence cette fois-ci de l'organe consultatif international. Trois points étaient à l'ordre du jour : l'évaluation même du processus, la rencontre entre le Comité d'évaluation et le Comité consultatif international et bien entendu le rapport du Premier ministre présenté par lui-même. Trois rubriques ont été présentées : au niveau politique, sécuritaire et humanitaire. Sur le plan politique, nous avons abordé la question de la décrispation et de l'identification. Au niveau de la décrispation, tous les participants ont admis que, depuis la signature de l'Accord de Ouaga, un code de bonne conduite tel que stipulé par l'accord est en marche entre les deux acteurs et même au sein de la société ivoirienne. Et que la vie se décrispe de jour en jour. Au niveau de l'identification, nous avons fait le point. Pour faire l'identification, un redéploiement minimal de l'administration était nécessaire. Parce que ces agents de l'administration avaient la responsabilité du processus de l'identification. C'est ainsi que les préfets, les sous-préfets, les maires, les conseils régionaux ont été redéployés. Le cadre institutionnel pour faire une bonne identification était déjà planté. Il fallait trouver la méthode et le mode d'opération. Le Premier ministre a mis en place un groupe de travail international, un groupe de travail sur l'identification. Et ce groupe de travail a mandaté le ministre de la Justice pour lui produire, à cette rentrée gouvernementale, un mode opératoire consensuel. Lequel mode opératoire allait être publié à l'ensemble des Ivoiriens pour que chacun sache comment l'opération doit se faire. A ce jour, je puis vous dire que ce mode opératoire est trouvé. Et que dans les heures qui suivent ce mode sera annoncé par le Premier ministre lui-même à travers la réunion qu'il va organiser avec le groupe du travail sur l'identification. Au niveau sécuritaire, c'est une préoccupation. Nous sommes convenus que les audiences foraines tout comme l'ensemble du processus de l'identification et même du processus de sortie de crise devrait être sécurisé. Qui a été choisi pour faire cette sécurisation ? C'est le Centre de commandant intégré (Cci) qui doit recevoir bientôt l'effectif des deux forces, en plus des moyens qui doivent être mis à sa disposition pour accompagner le processus d'identification et l'ensemble du processus de sortie de crise.





?Pour cette identification qui, aux yeux de certains, coinçait jusqu'à présent vous donnez l'assurance qu'avant fin septembre ce sera sur les rails ?

L'opération d'identification tout comme l'ensemble du processus n'a jamais coincé. Nous mettons au défi quiconque de nous dire que le processus était coincé. Nous avons convenu qu'il fallait lancer l'opération d'identification qui commence par les audiences foraines. Mais bien entendu, on ne va pas à ces opérations comme s'il n'y avait pas de dispositions préalables à mettre en place. Nous avons travaillé sur l'ensemble de ces dispositions. D'abord que ce soit au niveau des relations de confiance qui doivent exister dans le pays, ensuite qui se retrouvait maintenant au niveau du redéploiement de tous le corps qui doit encadrer et légitimer cette opération. Sans oublier enfin la question sécuritaire qui devait permettre de lancer cette opération. Voilà les dispositions préalables. Maintenant le mode opératoire. Le Premier ministre va l'annoncer et à partir de ce mode opératoire, nous allons lancer maintenant l'opération des audiences foraines et cela se fera pour ce mois de septembre.





?On se souvient qu'une première échéance pour le mois de juillet n'a pu se réaliser ?

En juillet, le Premier ministre s'était donné comme objectif, après la première rencontre du Comité d'évaluation et d'accompagnement (Cea), de pouvoir faire l'opération des audiences foraines. C'est dans ce cadre qu'il se rendait à Bouaké lorsque son avion a essuyé un lâche attentat qui, malheureusement, a fait des morts. C'est un couac contre le processus. Et ceci nous a pris encore du temps pour réorganiser la confiance entre les Ivoiriens, pour remettre le processus qu'on a voulu arrêter. Nous n'avons fait que reconduire le programme.





Nous enlevons les 4 semaines que nous avons perdues, nous sommes dans le timing. Nous avons enregistré la mise en place de toutes les bonnes dispositions qu'il fallait pour que nous allons à des audiences foraines tranquilles. Parce que les ivoiriens veulent aller à des opérations tranquilles.





?Pour ces audiences foraines comme pour l'ensemble du processus, la question sécuritaire est fondamentale. Le Centre de commandement intégré est en première ligne. On ne peut pas s'empêcher de noter que ce centre créé il y plusieurs mois, ne dispose pas aujourd'hui d'effectif, ni de moyens conséquents. Les brigades mixtes ont du mal à être efficaces sur le terrain ?

A partir de la réunion que nous avons eue à Ouaga, cette question a été traitée. Nous nous sommes convenus de reconnaître que la seule instance qui doit se charger de la sécurité de tout le processus, c'est le Centre de commandement intégré qui sera composé des deux forces et encadré par les forces impartiales sur toute l'étendue du territoire national. C'est ce que nous avons obtenu et pour que ce centre puisse engager ces opérations, des moyens doivent être à sa disposition. Le Premier ministre a donné la confirmation de ce que les moyens humains, matériels et financiers seront mis à la disposition du centre. N'oublions pas que ce centre est celui qui va sécuriser les sites et même l'ensemble du territoire pendant toutes les opérations délicates d'identification et même électorales que nous allons avoir en Côte d'Ivoire.





?Avec quand même les deux forces présentes des deux côtés ?

Le Centre de commandement, dans son décret de mise en place, intègre les deux forces en plus des forces impartiales qui ont un rôle. Vous verrez par exemple sur un site des audiences foraines la présence du Cci qui se manifestera comme suite. Vous aurez des éléments des Forces nouvelles, des éléments des Forces de défense et de sécurité, des éléments de la Licorne et des éléments de l'Onuci. C'est ce site qui sera devant chaque site d'opération des audiences foraines, que ce soit l'identification ou d'autres types d'opération liés au processus de sortie.





?Le facilitateur lors de cette rencontre du Comité d'évaluation et d'appui a relevé la nécessité de respecter le chronogramme. N'est-ce pas rappeler à l'ordre les acteurs ivoiriens ?

Le facilitateur a félicité le Premier ministre, les acteurs. Il a également salué les progrès que l'accord de Ouaga, contrairement aux autres résolutions et aux autres accords que nous avons signés, fait sur le terrain chaque jour. Il a encouragé le Premier ministre à continuer dans cette lancée et à faire en sorte que le processus qui a failli être arrêté et qui a causé une perte en termes de timing, puisse continuer dans cette lancée. Nous avons reçu une notion d'encouragement et je pense que le communiqué le traduit bien.





?Le communiqué note également, sur la question des grades, qu'une séance ultérieure aura lieu. Qu'est-ce qui bloque sur ce dossier ?

Il ne faut pas voir les choses en termes de blocage. Ne faisons pas comme si c'est maintenant que les problèmes de la Côte d'Ivoire se révèlent à nous. Il faut être de bonne foi. Il y a un accord qui traite de différents chapitres. Il faut ajuster donc la mise en place des différents chapitres. Aujourd'hui, nous nous sommes convenus de voir comme prioritaire le lancement des audiences foraines. Nous nous sommes concentrés sur tous les contours et tous les pourtours pour aller à cette opération. C'est pour cela que les autres questions inhérentes à l'accord, seront donc traitées à d'autres étapes. Ce n'est qu'un classement des dossiers. Et personne ne nous en voudra de classer les dossiers pour être efficace dans leur traitement. La question des grades ne pose pas problème. La question des grades est très avancée et nous avons demandé au facilitateur de rencontrer les acteurs pour déjà leur annoncer les grandes lignes de ce que cette question sera. Maintenant, nous nous concentrons sur le lancement des audiences foraines.





?Les Ivoiriens en ont besoin tout comme dans les casernes au Nord et au Sud. Et récemment, il y a eu beaucoup de bruits et beaucoup de rumeurs au sujet de ces grades.

Des bruits venant de la presse. Les bruits sont venus moins des casernes que de la presse. Sinon nous nous en tenons à la sérénité qui nous guide, nous disons qui s'agit d'un processus de sortie de crise. Aucun processus de sortie de crise n'est facile dans le monde. Parce qu'il faut sortir de la crise. Cela veut dire qu'il faut changer à un moment donné d'attitude, changer de méthode, changer même de vision. Et cela peut susciter en tout lieu, en tout temps et dans toute société que nous appelons des réserves mais qui ne sont pas des réactions contre l'avancée. Ce que nous retenons c'est qu'il y a eu une rencontre entre le chef de l'Etat et les militaires. Le langage de vérité s'est imposé entre les deux et depuis nous ne constatons pas qu'il y a eu des tirs à Abidjan où que l'on a tenté de renverser le régime. Au Nord, nous avons des militaires qui sont engagés dans le même processus de sortie de crise, qui se battent chaque jour en tout cas pour gérer leur quotidien, et pour être conformes à leur engagement dans l'accord de Ouaga. C'est cela l'essentiel. Le reste, les péripéties, nous n'en connaissons pas et nous n'allons pas nous laisser perturber par tous ces bruits qu'on annonce et qui sont souvent loin de la réalité.





?Aujourd'hui dans la composante civile et militaire, tout le monde est ?il sur la même longueur d'ondes devant les avancées et les questions de cette sortie de crise?

Mais pourquoi pas ? Aucune déclaration, aucune attitude d'un membre des Forces nouvelles ne s'oppose à cet accord. Tout le monde travaille à l'application de l'accord au quotidien. Les politiques, les membres du gouvernement tout comme les militaires sur le terrain. Ce que nous notons et c'est ce que nous retenons, le reste ce sont des spéculations. Vous savez dans ce pays, on spécule beaucoup. On médit beaucoup, on raconte beaucoup de choses. Mais nous nous sommes abstenus de répondre souvent à ce que nous appelons des tentatives de diversion pour nous concentrer sur ce que les ivoiriens attendent de nous ; c'est-à-dire sortir ce pays de la crise, organiser des élections libres démocratiques et transparentes, régler la question de l'armée, régler la question de l'identification et créer en tout cas un contexte nouveau en Côte d'Ivoire, un contexte de vivre ensemble. A partir de ces objectifs, nous pensons que nous avons suffisamment à faire pour nous laisser déconcentrer par tout ce qu'on peut raconter sur notre compte. La vérité se verra le jour où le Premier ministre viendra dire aux Ivoiriens ce qu'il a fait pour sortir ce pays de la crise. En ce moment-là nous parlerons.





?Il y a eu, il y a quelques semaines, la rencontre du Cadre permanent de concertation qui avait recommandé le maintien du Haut représentant aux élections. Par la suite, l'Onu avait pris la décision de supprimer ce poste. Aujourd'hui, le Comité d'évaluation s'est réuni. Dans le communiqué, beaucoup de points sont soulevés. Qu'est-ce qui peut garantir aux Ivoiriens que les recommandations du Cea seront effectives sur le terrain ?

Nous travaillons sur la base d'un programme. Nous pensons que chaque ivoirien vit au quotidien ce programme. Le Premier ministre, Guillaume Soro, a été nommé. Il avait à mettre un gouvernement en place. Il avait à élaborer une feuille de route et engager des actions dans le sens de régler des problèmes. Il est sur cette voie. En décidant de redéployer les préfets, les sous-préfets, les maires et en mettant un groupe de travail pour régler la question de l'identification, il est dans la voie des attentes des Ivoiriens. Dans le même temps, il travaille dans d'autres chapitres pour régler la question militaire et même la question électorale. S'agissant de la question du Hre, il faut savoir que ce ne sont pas les deux acteurs qui ont demandé que M. Stoudmann ne revienne plus. Une mission de l'Onu s'est rendue en Côte d'Ivoire, a évalué par elle-même la situation, a fait des recommandations au Conseil de sécurité qui a décidé autrement, nous prenons acte. Le facilitateur a été en tout cas joint par les acteurs politiques dont le Rhdp, il a reçu leur lettre, il a même fait la réponse. La réponse se trouve aujourd'hui dans la main des responsables du Rhdp. C'est une question qui ne touche pas les deux acteurs signataires de l'accord de Ouagadougou. La garantie des élections, c'est d'avoir le Premier ministre pour nous, Forces nouvelles. La garantie structurelle d'une élection, c'est la Commission électorale indépendante. La garantie d'une bonne identification. C'est la Commission nationale de supervision de l'identification et bien entendu la garantie sécuritaire d'une bonne élection, c'est aujourd'hui le cas sécuritaire que nous avons défini dans le cadre du Cci.





?Sur la question, il y a le volet judiciaire, les hautes cours en place, le Conseil constitutionnel, la Cour suprême qui sont décriées par beaucoup d'acteurs.

L'accord de Ouaga ne vient pas faire une révolution. L'accord de Ouaga fait suite aux autres accords. Et depuis que nous avons signé des accords, aucun n'accord n'a mentionné clairement qu'il fallait dissoudre ces instances. Ne demandez pas aux Forces nouvelles de le faire. Notre présence aujourd'hui à la primature, dans le processus de paix, est une garantie suffisante de ce que ce processus se conduira de façon neutre en tout cas de façon impartiale et nous usons tout nos poids pour que le processus le soit. Jusque- là, nous ne voyons rien qui puisse nous prédire que nous sommes en train d'aller à des élections mal organisées, bâclées et anti-démocratiques. Les pas que nous posons sont des pas sûrs et les méthodes utilisées sont des méthodes consensuelles par le Premier ministre. Personne aujourd'hui ne peut venir dire que le Premier ministre est en train de jouer de façon impartiale pour, en tout cas, faire en sorte que nous n'atteignons pas les objectifs fixés par l'accord.





?La démarche consensuelle aurait voulu que l'opposition politique soit présente à cette réunion d'évaluation.

Non. Si vous lisez bien l'accord, il parle de deux cadres. Il y a le Cea et le Cpc. Et l'opposition politique se retrouve dans le Cpc et elle y joue son rôle. Le Cea est un organe pour faire le point et chacun reste dans son domaine. Je pense que dans la structuration de cet accord, tous les Ivoiriens y trouvent leurs comptes. Ceux qui veulent aller aux élections ont la garantie aujourd'hui qu'aucun candidat ne sera exclu. Ils ont la garantie aussi que les élections se mèneront de façon transparente avec un rôle accru que nous donnons à la Cei. Ils ont aussi la garantie que l'identification se fera selon les normes que l'accord de Ouaga a arrêtées.





Interview réalisée par D. Al Séni

Coll : Koffi Serges

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