jeudi 6 septembre 2007 par Fraternité Matin

Lorsque le lundi 26 février, un décret du président guinéen, Lansana Conté, lu le soir à la radio et à la télévision, annonce la nomination de Lansana Kouyaté, Représentant du Secrétaire général de l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF) dans la crise ivoirienne en qualité de Premier ministre, des manifestations de joie, à travers le pays, accompagnent la bonne nouvelle. Fait politique rarissime. C'est la première fois, dans l'histoire de la Guinée, qu'un Premier ministre assumera la fonction de chef de gouvernement, rôle rempli par le chef de l'Etat depuis 1958, année de l'indépendance du pays.
Il ne pouvait en être autrement. La veille de la nomination de Lansana Kouyaté, un accord conclu sous l'égide de la CEDEAO entre le gouvernement et les deux principaux syndicats, la Confédération nationale des travailleurs de Guinée (CNTG) et l'Union syndicale des travailleurs de Guinée (USTG), prévoyait que le Premier ministre soit doté de pouvoirs élargis. Le chef de l'Etat ne devant valider que les décrets du gouvernement. Ce n'était qu'une vue de l'esprit. Puisque la Constitution, jusque-là non remaniée, donne d'ailleurs des pouvoirs élargis au Chef de l'Etat.
Le changement, la population l'a revendiqué, à travers une vague de contestations populaires durement réprimées. Et qui ont fait au moins 137 morts en janvier-février. Cette population aspirait à de meilleures conditions de vie dans un pays potentiellement riche. Mais menacé par un profond marasme économique.
Aussi, attendait-elle du nouveau gouvernement une gestion plus transparente et un soutien du pouvoir d'achat. Dans l'accord négocié avec les autorités de Conakry, les Guinéens avaient exigé la baisse du prix du carburant, la réduction du prix du riz et le relèvement des pensions de retraite. Au plan politique, il avait été conclu que l'autorité de Lansana Kouyaté, par gouvernement interposé, devait s'étendre à l'intérieur du pays. A la pratique, les choses ne sont pas aussi aisées. La preuve est venue, le mardi 24 juillet, de Dubréka, ville natale du chef de l'Etat Lansana Conté. Alors qu'un redéploiement préfectoral demande le remplacement de Mouctar Dramé dit Badra, préfet de Dubréka, par Amara Lamine Soumah, Badra refuse la passation de service.
Le Premier ministre s'en remet au Président Conté et déclare, au sortir de l'audience présidentielle, que Badra part et que Conté avait accepté ce départ. Ce passage en force tenté par Badra constitue, entre autres, une opposition au changement. De la part des forces rétrogrades qui ont été dénoncées hier par les deux principales centrales syndicales. Dans un discours dit devant des responsables de syndicats, de la société civile et du patronat, Yamoussa Touré, secrétaire général de la CNTG, cité par l'AFP, a fustigé les forces rétrogrades opposées au changement qui s'agitent et ?uvrent inlassablement à saper la mise en ?uvre des mesures salvatrices pour assurer le bonheur du peuple.
Pleinement conscient de l'enjeu, Lansana Kouyaté, juste après sa nomination, a confié au journal guinéen Le Diplomate: C'est une très lourde responsabilité que nous aurons à porter ensemble pour sortir la Guinée de sa situation actuelle. Six mois après cette nomination, l'intersyndicale note les balbutiements du changement tant attendu par la population.
Ernest Aka Simon

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