mercredi 5 septembre 2007 par Le Nouveau Réveil

Une véritable explosion d`idées, du point de vue et d`analyses pertinentes, de révélations croustillantes pour mieux saisir cette actualité à rebondissements de la crise socio-politique ivoirienne, les frasques de certains hommes politiques à la lumière de leur cheminement, Me Ahoussou Kouadio Jeannot, Secrétaire général adjoint du PDCI-RDA chargé des affaires juridiques, conseiller juridique du président du PDCI, a décidé de parler. Des problèmes de grades, des relations entre Gbagbo et son armée, du PDCI, des élections, de la campagne d`injures du président du FPI contre le PDCI et son président, de Mamadou Koulibaly sans oublier Fologo. Une interview pleine d`enseignements. Lisez plutôt.
Depuis quelques jours, le processus de paix semble être confronté à un autre problème sérieux : la question des grades et les primes de guerre des soldats loyalistes. Malgré l`intervention personnelle du Chef de l`Etat, la grogne persiste dans les casernes
Le constat que vous faites est le même que celui fait par la plupart des observateurs de la vie politique nationale et par les Ivoiriens. Je regrette que le processus de paix, qui est porteur d`espoir pour tous les Ivoiriens, soit à nouveau plombé par cette question récurrente des grades et des primes. Je me dois là aussi de regretter le manque total de courage et de vérité dans le traitement de ces questions, hautement sensibles. Vous noterez avec moi que le Président de la République n`affiche pas toujours une attitude claire, susceptible de rassurer les acteurs. Tantôt ce sont des propos qui laissent croire que la question des grades n`est pas encore réglée, tantôt ce sont des comportements qui laissent croire que les grades des FAFAN ou "grades Soro" sont avalisés par le Chef suprême des armées. Il en va de même aussi pour la question des primes. Dès l`instant où on a déclaré solennellement la fin de la guerre à Bouaké, on doit assumer les conséquences directes: la fin des primes de guerre. C`est le flou volontairement entretenu qui risque de compliquer les choses. Il y a des questions que le temps peut régler, mais il y en a d`autres qui sont objectives et qui appellent des décisions politiques courageuses dans un dialogue franc et direct. Ce d`autant plus que le paiement des primes n`est pas inscrit au budget de l`Etat. Ou le Président Gbagbo accepte de les payer sur le budget de souveraineté mis à sa disposition, et dans ce cas, il met en place une procédure de paiement qui rassure et tranquillise les militaires ou on admet tous que la Côte d`Ivoire ne peut plus supporter cet effort de guerre parce que dans le même temps nous devons reconstruire notre pays si tant est que la guerre est terminée et que nous sommes dans un élan de paix. Je pense que nos militaires sont capables de comprendre et d`accepter des choses si on se donne la peine de leur parler avec respect et dans le bon ton. Laurent Gbagbo a voulu éteindre le feu par un langage de feu. Son discours musclé devant les FDS était-il opportun ?
Je ne jugerai pas. Je voudrais simplement constater que nulle part le feu n`a éteint le feu. Entre les audiences qu`il accordait à notre armée pour la couvrir de tous les lauriers, et la dernière rencontre où, à en croire la presse, il leur a passé le savon, c`est le jour et la nuit. Je crois personnellement qu`il a fait une mauvaise lecture de la situation en pensant que ce n`était qu`un mouvement d`humeur au sein de la grande muette que l`opposition tente de récupérer. La suite des événements lui a donné tort puisque des actions d`apaisement sont entreprises çà et là... La paix appelle la paix. L`amour appelle l`amour. La violence appelle la violence.
Cela fait quand même plus de 4 mois que le problème de grades des FN est posé. Le CCI, le gendarme du processus de Ouaga n`est lui-même pas opérationnel à cause de la non reconnaissance des grades des officiers des FN qui siègent dans cette structure. Pour n`avoir pas participé aux négociations qui ont abouti aux accords de Ouaga, il m`est difficile de me prononcer sur cette question. Mais je m`étonne qu`un tel point n`ait pas fait l`objet d`un règlement définitif. Je note que passé les temps des symboles, l`on s`attaque maintenant aux questions essentielles qui sont au c?ur de la crise ivoirienne, à savoir les audiences foraines, les élections et la question de la reconstruction de notre armée. Et c`est toujours à l`examen de ces questions essentielles que tous les accords politiques ont été mis à mal jusque-là. Pour la simple raison que tous les acteurs ne font pas preuve de bonne foi au moment d`appliquer les accords signés. Je crains que les accords de Ouagadougou ne soient grippés par ce mal bien ivoirien. Celui de renier sa signature, une fois passés les fastes des cérémonies et les flash des photographes. Le problème de l`identification et des audiences foraines est la question fétiche, tabou qui à l`expérience, une fois qu`on décide de sa mise en ?uvre, entraîne des violences suivies de mort d`hommes.
C`est dans cette ambiance de confusion que le Chef de l`Etat envisage l`organisation des élections d`ici décembre 2007. Comment analysez-vous au niveau du PDCI et du RHDP cette nouvelle approche du Chef de l`Etat?
Le Président Gbagbo l`a envisagé. Je crois que c`était un ballon d`essai pour titiller ses adversaires politiques parce qu`en l`espèce ce n`est pas à lui qu`il revient de fixer la date des élections, mais au gouvernement sur proposition de la CEI. Quand le PDCI-RDA et le RHDP seront saisis officiellement de cette question, je pense qu`ils réagiront comme il se doit. Pour ma part, je pense que la Côte d`Ivoire a besoin de vite sortir de cette situation exceptionnelle qui perdure au grand dam des populations et pour le plus grand bonheur des nouveaux pillards, prédateurs de la République. L`on assiste à une déliquescence totale de notre société, avec la corruption spectaculaire, la quasi suppression de l`école etc. ; qu`il nous faut arrêter au plus vite en restaurant l`autorité de l`Etat. Et cela ne peut se faire que par la normalisation de la vie politique qui passe par des élections crédibles et ouvertes à tous. Mais dans le même temps, il faut éviter de conduire la Côte d`Ivoire vers une autre aventure avec des élections mal organisées parce que vite faites pour ne pas dire faites à la va-vite. Les accords de Ouagadougou fixent un délai, mais aussi des étapes à franchir pour organiser ces élections. Si faire vite les élections, c`est respecter ce délai et les étapes, alors c`est une bonne chose. Mais si c`est pour ruser avec tout le monde en espérant légitimer une imposture avec un semblant d`élection, alors je dis que le pouvoir se trompe d`époque. Un Président de la République élu dans des conditions calamiteuses, c`était encore tolérable en 2000. Mais aujourd`hui, nous sommes en 2007, et les Ivoiriens ne sont pas prêts à l`accepter. Croyez-vous que M. Gbagbo a une idée derrière la tête en disant cela ?
Je ne le sais pas et je ne le souhaite pas pour l`intérêt de la Côte d`Ivoire. Je sais que certains de ses partisans sont fortement tentés par un passage en force pour maintenir leur mentor au pouvoir quoique cela coûte, même à faire face à une autre rébellion après. Je sais aussi que pour eux, l`alternance démocratique qu`ils ont tant réclamée est passée par un coup d`Etat militaire et l`usage de la force et de la violence pour s`installer au pouvoir en 2000. Je sais enfin que pour eux, le FPI doit faire 40 ans au pouvoir et que les prochaines élections ne seront qu`une simple formalité pour légitimer une dictature de la minorité préparée de longue date en s`appuyant sur la violence et la rue. Mais je compte sur la sagesse du Président Gbagbo pour éviter de se laisser séduire par un tel scénario. Ce serait catastrophique pour lui. Tous ceux, qui l`ont tenté avant lui partout ailleurs, ont quitté le pouvoir dans la honte. On sent le RHDP un peu en retrait du processus. Bédié et ADO, vos deux principaux leaders n`étaient pas à la cérémonie de la flamme de la paix à Bouaké. Et cela continue de susciter bien de commentaires.
Le RHDP n`est pas en retrait du processus puisque les partis politiques qui le composent sont au gouvernement qui est le cadre par excellence de la mise en ?uvre de l`accord de Ouagadougou. Les Présidents Bédié et Ouattara ont participé à la première réunion du CPC, le comité consultatif des accords. Ils ont affirmé leur disponibilité à ?uvrer à la réussite totale de cet accord qui doit déboucher sur les élections que l`opposition appelle de tous ses v?ux. Pour ce qui est de la cérémonie de la flamme de la paix, il faut éviter de tomber dans la surenchère comme le font certains nouveaux adeptes de la refondation, un peu trop zélés à mon sens. Vous savez qu`ils ont été invités à la dernière minute et qu`ils ne pouvaient pas matériellement préparer un tel déplacement dans le délai imparti. Mais leurs partis politiques étaient représentés par des délégations de hauts niveaux. Là aussi, vous savez le sort qui leur a été réservé une fois à Bouaké. La rencontre de Bouaké se voulait un symbole et pour le symbole, l`opposition était là. C`est cela le plus important. Le reste n`est que de la politique politicienne, et relève tout simplement de la mauvaise foi et d`une honteuse tentative de manipulation de la population. Parce que dans le même temps, on passe sous silence l`absence de Mme Gbagbo, la première Dame et figure de prou de la guerre contre la rébellion ou encore celle du Président Mamadou Koulibaly, deuxième personnage de l`Etat et reconnu comme un pur et dur du régime etc. Votre question me permet enfin de faire remarquer que dans sa configuration et de par sa nature même, l`accord de Ouagadougou met en retrait les autres acteurs de la vie politique nationale puisque les deux signataires en sont le Président de la République et le Secrétaire Général des Forces Nouvelles. Ni le PDCI, ni le RDR, ni le PIT, ni le MFA, ni l`UDPCI n`en sont signataires, contrairement aux accords de Marcoussis. MM. Bédié et Ouattara ne sont donc pas acteurs directs de cet accord, encore moins garants de sa mise en oeuvre. Ils sont observateurs et à ce titre et surtout en tant qu`Ivoiriens, ils font tout pour le retour de la paix. Qu`on ne leur demande donc pas plus qu`il n`en faut. Le PDCI et le Président Bédié acculés dans leur bastion par le FPI et son Président ces derniers temps. Affi dit que Bédié est un leader dépassé, que le PDCI est mis au garage. Le FPI doit avoir le triomphe modeste. Je comprends que face au rejet dont ils sont l`objet de la part des Ivoiriens, le président Affi ait voulu détourner l`attention de tous en s`offrant une balade dans le N`ZI Comoé. En l`accueillant partout où il est passé, les populations ont voulu tout simplement lui faire une leçon de démocratie en indiquant simplement ce que doit être le comportement d`un citoyen civilisé. Et ce message s`adresse aux militants du FPI qui exercent en permanence la violence sur les militants des autres partis dans les zones forestières. Et puisque le FPI se soit rallié quelques retraités politiques sans envergure qui mangent à tous les râteliers ne doit pas lui faire oublier la réalité. Nos populations ont le sens de l`honneur et du devoir. Je donne rendez-vous à tous lors des prochaines élections pour juger du poids du FPI dans ces zones. Maintenant, que M. Affi dise que M. Bédié est un leader dépassé n`engage que lui. On connaît Affi N`Guessan. Il n`était que chef de service à CI-Telecom. Il ne participait pas à des réunions de directions. Il s`est retrouvé Premier ministre. Il n`a pas vu venir la guerre. On ne peut pas confier la Côte d`Ivoire à quelqu`un qui n`a pas vu venir la guerre qui a endeuillé le pays. C`est un novice !
D`ailleurs, il n`en n`est pas à sa première sortie malheureuse. Et cela n`a pas empêché les militants de porter M. Bédié à la tête du PDCI-RDA. Et cela n`empêchera pas l`ensemble des Ivoiriens de le porter à la magistrature suprême très bientôt. Ce qu`oublie M. Affî, c`est qu`aujourd`hui les Ivoiriens veulent revivrent la Côte d`Ivoire du passé, celle où il y avait la paix, le développement, le progrès et le bonheur. Cette Côte d`Ivoire-là, c`est celle du PDCI-RDA, du Président HOUPHOUET et du Président Bédié. Passé les affabulations de la Refondation, les Ivoiriens sont devenus lucides et préféreront de loin un homme du passé à un aventurier qui ne leur offre pour tout avenir que la mort et le chaos. A l`allure où vont les choses, les élections ne pourront pas avoir lieu avant 2009-2010. Avez-vous une stratégie pour pousser Gbagbo et Soro à aller aux élections ou allez-vous continuer à attendre patiemment qu`ils décident le temps qui leur plaira pour organiser les élections ?
Les accords de Ouagadougou fixent un cadre auquel il faut se conformer pour l`organisation des élections. Lors de la dernière rencontre du CPC sous la présidence du facilitateur, le Président Blaise Compaoré, il a été indiqué que les élections devront se tenir au plus tard en mars 2008. Il faut faire confiance à la vigilance du facilitateur et de la communauté internationale pour ne pas que ce délai ne soit pas tenu sans raison valable. Du point de vue constitutionnel, le Président de la République a, depuis la cérémonie de la flamme de la paix, synonyme de levée des empêchements d`organiser le scrutin, 90 jours pour organiser des élections. Vous savez également qu`avec la résolution 1721 de l`ONU, le mandat de M. Gbagbo, le dernier, expire au 31 octobre 2007 sans possibilité de reconduction. Tout cet environnement n`est donc pas fait pour légitimer un report indéfini des élections au risque d`aller à un blocage politique majeur. L`opposition suit avec intérêt tous ces aspects de la question et pèsera de tout son poids pour que prenne fin cette situation exceptionnelle.
La persistance de la crise qui secoue le pays a entraîné une pauvreté généralisée au sein de la population, laquelle est accentuée depuis quelques mois par une flambée des prix sur le marché. Les Ivoiriens peuvent-ils tenir encore longtemps ?
C`est à eux et donc à chacun d`entre nous de l`apprécier. Depuis deux ans maintenant, les syndicats dénoncent cet état de fait à chaque fête du travail en disant qu`aujourd`hui le panier de la ménagère a fait place au sachet, tant les prix des produits sont en constance hausse tandis que le pouvoir d`achat ne fait que diminuer. Depuis quelques semaines, les associations de consommateurs haussent le ton sans que le pouvoir en place ne réagisse. Sans être excessif, je crois qu`une véritable bombe sociale se prépare sous les pieds des refondateurs. Les grèves des enseignants, celle des cadres supérieurs de la santé, la grogne dans l`armée traduisent tout simplement un véritable malaise social qui risque de nous exploser à la figure si des mesures courageuses et d`ensemble ne sont pas prises. Pour l`heure, on se contente de colmater les brèches, mais jusqu`à quand ?
Pendant ce temps, les refondateurs ne cessent de s`enrichir. Châteaux, immeubles, stations d`essence, grosses cylindrées, ils les achètent à la pèle. Je ne sais pas où ils trouvent autant d`argent pour s`offrir tout ce luxe, pendant qu`il devient impossible de circuler faute de route bitumée, pendant que les centres de santé sont démunis, et pendant que la misère du peuple est de plus en plus visible. Je ne sais pas aussi où ils trouvent les forces morales pour continuer à parler d`avenir aux Ivoiriens à moins qu`ils nous prennent tous pour des idiots. Les Ivoiriens en sont aujourd`hui pour leurs frais. Et la refondation n`aura été qu`un rêve sans lendemains, excepté pour un cercle de privilégiés et d`affairistes. Un mot sur la situation de l`école. Résultats catastrophiques au Bac, fraude aux concours d`entrée à l`ENA, à la Police, à la gendarmerie, aux douanes, à l`ENS, les chômeurs qu`on transforme en leaders de jeunesse. La situation de l`école est révélatrice de l`échec des refondateurs. Le pouvoir des enseignants-professeurs a tué l`école où ils étaient censés pourtant exceller. C`est la conséquence de la politisation à outrance de l`école que le PDCI-RDA dénonçait quand il était encore au pouvoir. A l`époque, on nous a accusés d`empêcher la liberté syndicale ou de violer les franchises universitaires. Conséquence, l`école est devenue aujourd`hui un nid de malfaiteurs où règnent la violence, la tricherie et l`affairisme. Les résidences universitaires sont transformées en boites de nuit, en centres commerciaux, en plaque tournantes de la piraterie et de la prostitution sans que cela n`émeuve. Les résidences universitaires sont surpeuplées, insalubres. Les amphithéâtres surpeuplés sans qu`il ne se trouve un syndicat d`étudiants ou de parents d`élèves pour rappeler à M. Gbagbo sa promesse de régler, une fois au pouvoir, la question de l`université d`un coup de baguette magique avec 10 milliards ! Et pendant ce temps, les enfants des refondateurs sont scolarisés à l`étranger, ce qui était un crime de lèse majesté quand le FPI était encore dans l`opposition. Au fond, tout se passe comme si l`assassinat de l`école avait été savamment planifié pour tuer l`intelligence en Côte d`Ivoire afin d`avoir à diriger des analphabètes abrutis dans les agoras et autres parlements. Ce nivellement par le bas, auquel on assiste est scandaleux et dangereux pour l`avenir de ce pays. Les valeurs de mérite, d`excellence sont dissoutes pour faire la promotion de la médiocrité. Je ne veux jeter l`opprobre sur personne, mais le scandale sur les concours d`accès à l`ENA, à la Police, à la Douane auxquels vous faites allusion est grave. Je m`étonne qu`il ne se trouve personne au sommet de l`Etat pour dénoncer ces faits. Est-ce parce que ces faits n`existent pas ? Personne ne pourra le soutenir. Ou est-ce une complicité passive ? On a toutes les raisons de le croire. Car tout semble indiquer que l`on veut refonder tout en Côte d`Ivoire en introduisant dans les grands corps de l`Etat, des personnes recrutées sur la base de leur militantisme, de leur appartenance tribale, et non de leur compétence. J`ai peur pour ce pays car, si la Côte d`Ivoire est restée debout pendant cette crise, c`est grâce à ses cadres compétents formés à la bonne école des valeurs, et aussi à ses fondamentaux économiques, dans le cadre des années PDCI-RDA.
Dans une interview accordée cette semaine à Jeune Afrique, M. Dona Fologo n`a pas manqué de porter des accusations très graves sur le PDCI et son président. Il estime que certaines personnes ont été ingrates et méchantes à son encontre, à commencer par le Président Bédié.
Je suis obligé de relever, par devoir de vérité, certaines informations clefs par rapport aux propos de M. Fologo. Au niveau de l`éthique et de la morale, je suis gêné par certaines sorties et déclarations du grand frère, du Secrétaire général du PDCI qui a été désigné et imposé par le Président Houphouët-Boigny face à des candidats de poids tels que Amoakon Edjampan, Akoto Yao Paul au congrès de 1991. Mais à la vérité, M. Fologo a été désigné Secrétaire général du PDCI par la volonté du Président Henri Konan Bédié. Je peux citer des témoins qui sont encore vivants : MM Kindo Bouadi, Mel Eg Théodore, Bamba Siaka (ex-CEI), Lenissongui Coulibaly, Me Ahobaut Claude. En effet, au début des années 90, face aux mouvements sociaux, à la fronde des soldats, le Président Houphouët-Boigny s`est pratiquement retrouvé seul à gérer ces problèmes. Recevant à son domicile les soldats révoltés, il s`est rendu compte que le Comité exécutif du PDCI était devenu inopérationnel. M. Fologo venait de sortir du gouvernement. Et nous sommes un certain nombre de jeunes cadres du PDCI qui avions jugé utile de l`approcher afin de relancer le PDCI-RDA qui semblait perdre du terrain face à la furia et à l`agressivité des opposants de l`époque. Une conférence de presse a eu lieu à Bingerville et M. Fologo a lancé le concept de "Renouveau du PDCI". A partir de là, une série de conférences animées par M. Fologo et d`autres militants se sont succédé jusqu`au congrès d`octobre 90 qui a vu, au plan structurel, le retour du Secrétariat général dans les organes du parti.
Au cours de ce congrès de 90. M. Fologo présidait la commission de politique générale. Paix à son âme, Michel Atchinkwassi Kanga en était le vice-président, Djidji Kadjo, le rapporteur général, et moi-même, son adjoint. Je rappelle cela pour dire que nous étions dans une logique de porter Fologo au poste de Secrétaire général. Et lorsqu`à la tête d`une délégation, conduite par feu Atchinkwassi, nous étions allés voir le Président Houphouët-Boigny, le rendez-vous avait été organisé pour nous par l`ambassadeur Georges Ouégnin, pour parler de la candidature de Fologo comme Secrétaire général du PDCI. Le Président Houphouët-Boigny nous avait plutôt renvoyés vers le Président Bédié. Il fallait que le Président de l`Assemblée nationale de l`époque qu`il était donnât son accord. Je rappelle au passage que le ministre Lamine Fadika, également candidat, cherchait la caution de M. Bédié. Mais le choix du Président Bédié pour Fologo était déjà fait.
Au congrès d`octobre 90 à Yamoussoukro, nous occupions un "QG" de campagne financé par le Président Bédié pour Fologo. Certains témoins sont encore vivants. C`est ainsi qu`au congrès de 91 à l`Ivoire, prolongation du congrès de 90, le Président Houphouët a déclaré que lui le chef de l`Etat était Akan, le Président de l`Assemblée nationale étant Akan, il fallait un ressortissant du nord pour tenir le parti. C`était Fologo. Je parlais tantôt d`éthique et de morale parce que quand on a été très intime dans la joie et dans la douleur, le bonheur comme dans le malheur, on ne jette pas l`anathème sur un frère, un ami de cette manière. Il faut reconnaître à Fologo son courage en décembre 93 lorsqu`il a pris position pour l`application de la Constitution face au président Yacé (paix à son âme) qui militait pour la création d`un organe de gestion de la succession du Président Houphouët. Mais, c`était le rôle assigné à M. Fologo. Il n`a fait que son travail pour lequel il était payé. Il était l`un des premiers gardiens du temple. C`est de son vivant que le Président Houphouët lui a confié le parti. Les tribulations de l`histoire appellent à une responsabilité morale et historique de M. Fologo par rapport au PDCI en tant qu`institution et aux jeunes militants que nous sommes en tant que ses jeunes frères. L`échec de Bédié est aussi l`échec de Fologo et de toute la direction du PDCI, du gouvernement. Vous ne comprenez donc pas Fologo ?
Non. Pourquoi, alors qu`il était ministre d`Etat chargé de la Solidarité, Secrétaire général du PDCI, n`a-t-il pas démissionné si tant est que M. Bédié s`était éloigné de la ligne originelle de l`houphouétisme ? Ou à tout le moins a-t-il saisi l`opinion de cette dérive comme Akoto Yao l`a fait pour d`autres raisons ? Pourquoi, c`est seulement maintenant qu`il en parle, 8 ans après le coup d`Etat, pour découvrir l`ingratitude de son frère Bédié ? De quelle gratitude avait-il encore besoin lorsqu`on sacrifie Edjampan, Akoto Yao pour lui ? Quelle est cette manière de faire dans ce pays où lorsque quelqu`un perd une situation, on lui trouve tous les péchés d`Israël ? Je ne comprends pas que ceux, qui ont partagé la fraternité, des intimités, se répandent dans la presse pour étaler leurs états d`âme. Les laudateurs de Gbagbo aujourd`hui seront les premiers à lui lancer la pierre demain. Même s`il n`y a pas de morale en politique, on a besoin de moral pour faire de la politique. Fasse Dieu qu`au moment où nous parlons de paix et de réconciliation, que M. Fologo, militant dignitaire du PDCI, figure emblématique de ce parti, puisse humblement contribuer à rapprocher Gbagbo, Bédié, Ouattara, Anaky, Mabri et Soro. Telle devrait être sa mission en tant que président du RPP. J`ai de la peine à voir ces aînés pour qui nous avions toujours voué du respect et une considération profonde, affective, jeter des pierres dans le jardin du PDCI pour des problèmes de personne. Que devons-nous retenir d`eux, nous, les jeunes ? Ils ont le devoir de nous restituer la Côte d`Ivoire telle que le Président Félix Houphouët-Boigny leur a laissé. Le président du FPI, Affi N`guessan, ne ménage pas le président Bédié depuis un moment.
Affi N`guessan, je crois a un problème. Il se promène dans la région pour se proclamer "nouveau roi du N`Zi-Comoé". Tout son programme de campagne rime avec "Bédié est dépassé, Bédié est au garage". Mais, il ne nous apprend rien de nouveau. On sait que le coup d`Etat de 99 a mis le PDCI et Bédié au garage. Mais, comme il existe de très bons mécaniciens au PDCI, la locomotive PDCI a été retapée avec un nouveau moteur turbo qu`on appelle Henri Konan Bédié. Bientôt, ils verront ce dont Bédié est capable.
On parle de l`âge de M. Bédié. Mais j`invite Affi, Bédié et Gbagbo à rentrer dans un cabinet médical pour faire un bilan de santé. Et vous serez surpris qu`Affi et Gbagbo seront hospitalisés. Etre vieux n`est pas un handicap. Ce qui compte, c`est la compétence, l`expérience. Ce n`est pas sûr que ceux qui parlent de l`âge de Bédié atteignent cet âge avant de mourir avec le train de vie déluré et dépravé qu`ils affichent. La Côte d`Ivoire a fait l`expérience du coup d`Etat militaire. Elle est en train de faire celle de la refondation. Qu`on me dise haut et fort, depuis 99, quel est le bonheur que les Ivoiriens ont trouvé ? Au temps du PDCI, on parlait de corruption de certains individus. Cela était corrigible. Mais aujourd`hui, nous assistons à la corruption des institutions. Cela est incorrigible. Qu`on arrête de faire de notre pays un site d`expérimentation de la doctrine socialiste. Le socialisme est mort depuis longtemps. Vous êtes donc d`accord avec le Pr. Mamadou Koulibaly ?
Je rejoins en cela le président de l`Assemblée nationale qui a mis le doigt sur cette prévarication, cette pollution généralisée de la société ivoirienne dans toutes ses composantes : violation des droits de l`homme, le régime de la refondation a été épinglé par l`ONU, mauvaise gouvernance, épinglée par la Banque Mondiale et l`Union européenne, insécurité générale, vol, vandalisme, tricherie, destruction de la Côte d`Ivoire, humiliation de notre pays. En son temps, pour l`affaire des 18 milliards de l`UE, des cadres de la santé ont été arrêtés, le ministre de tutelle lui-même a été contraint à la démission pour pouvoir répondre devant la justice, le Directeur général du Trésor a été arrêté et jugé dans l`affaire Nasra. Aujourd`hui, on détourne à tour de bras dans la filière café-cacao. Combien de cadres convaincus de malversations sont-ils passés devant les tribunaux ? Il y a eu le scandale du riz et du sucre indien, des crimes contre l`environnement, la déforestation sauvage, les déchets toxiques. Tous ceux qui, hier, étaient éligibles aux fonds sociaux de Bédié sont aujourd`hui des multimilliardaires. Allez-y comprendre quelque chose. C`est sous les tropiques que l`on peut voir des enrichissements vertigineux qui donnent du tournis à leurs bénéficiaires.

Interview réalisée par Akwaba Saint Clair

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