La Fédération nationale des commerçants est traversée depuis quelques jours par des accusations de toutes sortes. Dans cette interview, l'accusé répond à ses détracteurs sur toutes ces rumeurs de détournement de fonds, d'abus de confiance et d'escroquerie. Pour lui, c'est plutôt la Fédération qui lui doit près de 50 millions de F CFA et ceux qui s'agitent sont des pions du mentor du RDR qui veulent caporaliser la corporation pour déstabiliser le Président Laurent Gbagbo. Les vérités crues de Doukouré Vazoumana.
Des articles de journaux font état de ce que sous la contrainte des commerçants qui vous ont élu, vous avez démissionné. On vous reprocherait beaucoup de choses: abus de confiance, détournement de fonds et escroquerie.
Je vous remercie. Je n'ai jamais démissionné de la tête de la Fédération. Vous vous souvenez que le 26 février 2007, j'ai convoqué une assemblée générale qui a statué sur le renouvellement des mandats des secrétaires généraux et du président national. Puisque notre mandat de 5 ans arrivait à expiration le 31 mars 2007 pour les secrétaires généraux et le 31 mai pour le président national. Et à cette réunion qui a eu lieu à la Bibliothèque nationale, les commissaires au compte ont fait leur rapport et de façon unanime, les secrétaires généraux venus de l'intérieur, environ une centaine, ont reconnu les engagements du président à leurs côtés et ont renouvelé le mandat du secrétaire général et du président pour quelques années ou de quelques mois. Tout cela est lié aux élections présidentielles en Côte d'Ivoire. Puisque nos élections se font avec le concours des préfets, les maires etc. En ce moment-là, l'administration n'était pas encore redéployée quand nous avons pris cette décision. Donc à la suite de cela, j'ai mis en place un bureau exécutif constitué de 35 membres en vue de redynamiser la fédération. Ce qui veut dire que nous sommes toujours en poste par rapport à l'Assemblée générale qui a eu lieu. Quand j'ai renouvelé le bureau exécutif, j'ai écarté certains membres récalcitrants et malhonnêtes dont le secrétaire d'Adjamé, Farikou Soumahoro, qui a détourné tous les fonds des semaines commerciales et des cartes qu'on lui a confiées. Il les a vendues aux commerçants et a gardé l'argent par devers lui. J'ai aussi écarté Diakité Issouf de Port-Bouët qui a géré l'aéroport. Et qui a engrangé près d'une soixantaine de millions, mais qui les a aussi détournés. Il n'a versé que 100 000 F CFA dans les caisses de la fédération. Le secrétaire d'Attécoubé, M. Bamba, trésorier de son état a fabriqué des cartes, il les a vendues sans rendre compte au bureau exécutif national. Celui de Bonoua a commis aussi des malversations. J'ai écarté un certain nombre de membres qui ont été accusés de malversations et de diffamation à l'égard de la fédération. Je suis tranquille. Ce sont ceux qui ont été écartés qui ont créé un collectif appuyé cette fois par des opérateurs économiques libanais et certains hommes politiques qui leur ont donné de gros moyens. Pour dire que Doukouré Moustapha serait à la solde du président de la République. Et qu'il faut à tout prix le destituer parce qu'il fait la campagne du président Laurent Gbagbo. Il serait même devenu FPI parce que le commerce, c'est une affaire de dioula. Voilà la question qui est posée. Mais je suis imperturbable. Le commerce en Côte d'Ivoire ne peut pas évoluer sans une volonté politique. Il ne peut pas non plus évoluer sans la caution du chef de l'Etat. Et je persiste et je signe. Je suis pour la mouvance présidentielle. Parce que je dirige près d'un million deux cents mille commerçants, et on ne peut évoluer que si nous sommes en harmonie avec le chef de l'Etat. Donc je ne peux pas utiliser la fédération à des fins politiques. Le président de la République est notre garant. Souvenz-vous qu'il nous a donné un siège au CCIA et qu'il était prêt à répondre à notre requête concernant la banque des commerçants, l'assurance des commerçants et un certain nombre de projets de développement que j'ai mis en place. Donc c'est vous dire que ceux qui s'agitent sont membres de partis politiques. Farikou est membre du bureau politique du RDR. Diakité Yssouf, Bamba et autres, tous seraient membres du RDR. C'est vous dire que c'est trop facile d'accuser les gens pour des choses qu'ils n'ont pas faites. Le marché de Yopougon est une affaire privée de M. Doukouré Vazoumana. J'ai eu ce marché par appel d'offre quand je n'étais même pas encore à la fédération. Et aujourd'hui avec un partenaire de notre choix, nous avons réuni des fonds pour reprendre ce marché début 2008. Donc c'est dire que je n'ai aucun reproche à me faire à ce niveau. J'ai lancé ce projet, les mêmes l'ont boycotté. Ce projet a été boycotté et ceux qui ont cotisé près de 4 millions ont été remboursés par le notaire. Il n'y a aucun problème de ce côté-là. La fédération elle-même depuis que je suis à sa tête, elle n'a jamais pu réunir plus d'un ou deux millions dans ses comptes. C'est moi qui finance la fédération. Pour votre mémoire, avant d'être président de la fédération, j'ai dû payer à l'ancien président N'Sikan, la somme de 5 millions que cette Fédération lui devait. Et jusqu'à présent, je n'ai même pas encore été remboursé par ladite fédération. Et le dernier rapport du commissaire au compte qui a été établi le 26 février dernier fait état de ce que la fédération me doit à ce jour près de 40 millions.
Vos détracteurs vous collent aussi une affaire de détournement de fonds.
C'est ce que j'explique. Les commissaires aux comptes ont fait un rapport en février 2007 à l'Assemblée générale pour dire que la fédération doit près de 40 millions à M. Doukouré Vazoumana. C'est moi qui paye ma secrétaire, qui paye le bureau et assume un certain nombre de charges. La fédération ne me rapporte rien à l'heure actuelle. Et comme je vous le dis, avant d'être président, j'ai remboursé les 5 millions de l'ancien président N'Sikan. Donc si s'ajoute cela aux dépenses effectuées, c'est près d'une cinquantaine de millions que la fédération me doit. Demandez au commissaire aux comptes si aujourd'hui la fédération ne me doit pas. Je n'ai jamais géré les sous de la fédération puisqu'il n'y en a pas. Je les ai tous écartés parce qu'ils ont dilapidé des sous. Donc c'est trop facile de verser dans des accusations infondées. Je leur demande d'apporter les preuves de leurs accusations. Et s'ils n'apportent pas les preuves, je les traduirai pour diffamations, dénonciations calomnieuses devant la justice. J'avais déjà entrepris des démarches dans ce sens au mois de janvier dernier. Mais l'esprit de sagesse m'a animé et je me suis dit que nous sommes en période de paix. Et que ce n'était pas la peine de créer d'autres situations. Mais comme ces accusations reviennent, mon avocat, Me Diarrassouba va s'en charger. Je lui dirai de les traduire en justice pour dénonciations calomnieuses.
Il n'y a pas que les détournements de fonds. On vous accuse aussi d'escroquerie et d'abus sociaux.
Mais qui ai-je escroqué ? J'apporte les fonds à quelqu'un pour gérer. Pour escroquer, il faut recevoir des fonds. Je n'ai jamais rien reçu de la fédération. C'est moi qui finance. Abus de confiance par rapport à quoi. Je porterai plainte contre ceux qui l'ont dit parce qu'il faut qu'ils donnent les preuves. Je suis un opérateur économique. Et la fédération n'a rien dans ses comptes. Le compte à la BIAO est débitaire, il n'y a jamais eu de sous. Parce que ceux qui parlent, quand ils organisent les activités, ils détournent les recettes à leur profit. Je suis un opérateur économique, j'ai été président de la Chambre syndicale des promoteurs immobiliers, j'ai construit près de 2000 logements en Côte d'Ivoire. J'ai eu le prix de l'excellence du meilleur promoteur immobilier. Tout cela avant la fédération. Je suis venu à la fédération pour donner un plus. Pour impulser une nouvelle dynamique de développement dans la banque, l'assurance, les marchés etc. Mais je constate malheureusement que soit mes interlocuteurs sont pour la plupart analphabètes, soit ils sonts ignorants. Et refusent de s'adapter parce qu'ils étaient habitués à la facilité, à des tracasseries sur les commerçants. C'est pourquoi je n'ai jamais voulu éditer une carte qui ne me protège pas par rapport à cette situation. Je me suis dit que cela fait plusieurs tentatives depuis 5 ans. J'ai voulu d'abord moderniser la carte, ils se sont opposés, c'était en 2003. Ensuite, j'ai voulu acheter l'immeuble Woodin, les mêmes se sont encore opposés. Je voulais un opérateur pour la reconstruction du marché de Cocody. Ils sont encore montés en première ligne. L'opérateur a investi près de 150 millions sur ses propres fonds avec mon accord et celui de la mairie de Cocody. Les mêmes ont voulu encore boycotter ce projet. Heureusement que les commerçants de Cocody ne sont pas dupes. Après maintes réflexions, je me suis posé la question de savoir. Suis-je dans un milieu de gens qui me comprennent où suis-je dans un milieu de personnes qui veulent à tous prix saboter mes actions ? Et cela vient toujours des gens que je ne considère pas comme commerçants parce qu'ils ne le sont pas. A savoir Diakité Issouf, Soumahoro Farikou, Bamba Adama. Pourtant cette association devait se réjouir de l'arrivée d'un intellectuel à leur tête pour faire évoluer les choses. Ce sont ces mêmes qui boycottent, c'est quand même regrettable, je suis déçu.
Ne pensez-vous pas que vous êtes combattu parce que la politique est rentrée dans la fédération. Ce n'est pas parce que vous affichez votre préférence pour la mouvance présidentielle qu'on vous combat ?
C'est exactement cela. Parce que ceux que j'ai cités sont des membres de certains partis politiques. Moi je n'appartiens à aucun parti politique. Mais j'ai pris fait et cause pour la mouvance présidentielle. Parce que le président de la République est le garant de toutes activités commerciales dans un pays. On ne peut pas aller contre le président de la République, on doit composer plutôt avec lui pour que les commerçants puissent avancer. Le secteur du commerce doit enregistrer beaucoup d'Ivoiriens, cela est important. Comment voulez-vous que nous puissions remettre le commerce aux Ivoiriens si on n'a pas la caution du chef de l'Etat. Et c'est justement cette idée qui est combattue. Parce que ceux qui se réclament de certains partis politiques veulent faire de la fédération un mouvement politique à la solde de certains chefs de partis politiques. D'ailleurs, ils ont créé un mouvement. A Abobo, c'est un mouvement pour le soutien des commerçants à un parti politique, le RDR au début de leur dissidence. Moi je ne m'inscris pas dans cette logique. Quel que soit le président qui sera à la tête de la Côte d'Ivoire, les commerçants doivent le soutenir. Et c'est mon combat. Le président Gbagbo nous a ouvert ses portes, nous l'avons rencontré, il nous a offert un bureau. Parce que quand je venais à la fédération, nous avions un bureau de 9m² où je ne pouvais pas m'assoeoir. Aujourd'hui, nous avons un bureau de 150m² au CCIA grâce au président de la République. Nous devons le remercier. Il a pris l'engagement le 16 octobre 2006, le jour où nous l'avons rencontré au palais présidentiel, de nous aider à mettre en place la banque des commerçants, l'assurance des commerçants, le fonds de garantie. Autant de projets que le président a acceptés. J'ai voulu créer une union, un conseil fédéral, les mêmes ont encore boycotté. Et se sont écartés pour créer la même chose. Face à tous ces agissements, je me suis demandé si je ne perdais pas mon temps avec des gens de la même région qui me boycottent. Puis-je accomplir cette mission en dehors de ceux-là ? J'ai donc pris la décision personnelle de placer mon 1er vice-président en la personne de Fofana Yacouba pour conduire la fédération jusqu'aux élections prochaines. Je me mets à l'écart de cette fédération dans laquelle je ne me reconnais plus. Puisque la politique est entrée au sein de la fédération. Quand la méchanceté ou l'engagement pour certains politiques atteint un certain seuil, je pense qu'il faut user de sagesse. Personne ne peut m'amener à démissionner. J'ai été élu. Mais j'ai pris la décision de me mettre en congé pour suivre mes affaires et pour aider les commerçants sous une autre forme.
Quel appel avez-vous à lancer à l'endroit de tous les commerçants pour que la cohésion, l'entente reviennent au sein de la fédération ? A vos détracteurs d'abord et à l'ensemble des commerçants?
Je pense que mon expérience de 5 ans à la tête de la fédération me permet de faire un constat. Quand on dit commerçant, on pense que ce sont des Ivoiriens qui viennent du Nord mais 70% des acteurs viennent de la sous-région ouest-africaine. Mais interrogeons-nous pourquoi dans ce secteur et dans celui du transport, il y a toujours des palabres, des règlements de compte. C'est difficile sans une volonté politique d'organiser ce secteur. Parce qu'il est trop porté sur l'argent. L'ancien président N'Sikan a eu la chance sous le parti unique de mettre en place une organisation. Mais il était le seul à financer cette organisation. Moi je ne peux pas être le financier d'une organisation qui ne me rapporte rien et à la corporation aussi. Je demande aux commerçants d'être vigilants. Il s'agit de leur destin. Et ceux qui rendent l'atmosphère délétère, ne sont même pas des commerçants. Certains n'ont même pas de fiches d'impôts. Ils ont été achetés hier pour mener un combat contre la facture normalisée. Aujourd'hui, ces mêmes personnes sont en train de les financer pour me combattre afin d'avoir les roues libres pour combattre l'Etat, c'est-à-dire le Président Laurent Gbagbo. Je ne suis pas dans cette logique. En définitive, M. Doukouré n'a détourné aucun fonds, il n'y en a même pas. Je n'ai escroqué personne. Bien au contraire, c'est la fédération qui me doit près d'une cinquantaine de millions. Je n'ai jamais émis de chèque. C'est une organisation qui doit malheureusement s'organiser parce nous sommes des commerçants de père en fils. Mais malheureusement, la politique est en train de miner cette fédération. Et je ne m'y retrouve pas. Voilà pourquoi je me suis mis en congé de la fédération. Demain, les éclairages du 1er vice-président Fofana Yacouba et le SG Kopoint Sylvain.
Réalisée par
Maxime Wangué
Coll Kady Traoré
(stagiaire)