lundi 3 septembre 2007 par Notre Voie

La Côte d'Ivoire n'est pas ce qu'on a fait croire pendant 40 ans. Le président du FPI vient de découvrir, en plein centre du pays, des réalités qui font mal au c?ur. Kondossou, village de la tribu Sondo, situé à 98 Km de M'Bahiakro. On a du mal à s'imaginer en Côte d'Ivoire, 40 ans après les indépendances. Un village perdu au bout d'une piste très difficilement cyclable, avec presque toutes les maisons en banco et recouvertes de chaume. Ici, on ne connaît ni électricité, ni eau potable, ni centre de santé, ni école. Seul bâtiment digne de ce nom, une petite église catholique dont la construction est presque achevée. Les murs crépis n'attendent plus que d'être peints pour que, la cour nettoyée, les chrétiens équipent leur lieu de culte. Ce sera l'unique signe de modernité du village. Quand nous étions malades, nous nous rendions à Kpakpanou à 10 Km d'ici. Mais Kpakpanou est occupée par la rébellion et le dispensaire sert de bureau et d'habitation aux rebelles. D'ailleurs, les habitants de Kpakpanou sont déplacés en grand nombre ici. Ils sont encore là. Maintenant, pour nous soigner, nous allons à Satama-Sokoura, à 27 Km. Les rebelles sont là-bas mais le chef de canton a pris l'infirmier sous sa protection et il est resté en place?, explique M. Kouamé Saramame. Il poursuit pour dire qu'avant la guerre, les enfants du village allaient à l'école dans le village d'Akakro. Mais l'école a été fermée avec la guerre et tous les enfants sont au village.
C'est dans un tel bled que le président du FPI s'est retrouvé jeudi dernier, dans le cadre de la tournée qu'il entreprend dans le département de M'Bahiakro depuis près d'une semaine. Après avoir égrené les souffrances des populations qui manquent de tout et les espoirs placés dans la politique de la refondation, M. Alphonse Kouamé N'Guessan, secrétaire général de la section locale du FPI, n'aura qu'un seul mot à dire à son hôte : Le président Gbagbo peut compter sur la population de Kondossou pour les élections à venir. Nous sommes prêts à le soutenir?.

Pendant le meeting, un enfant d'une dizaine de mois se met à pleurer. Et ses cris agacent. Pour le calmer, sa mère qui sait qu'il a faim, lui tend une assiette où se trouvent trois morceaux d'igname, sans rien de plus. Ni poisson, ni viande, ni huile, rien qu'une pincée de sel. Et lorsque le bébé se remet à crier de soif, c'est un des artistes qui animent la tournée, qui lui tend un sachet d'eau. La scène est poignante, d'autant que dans ce village, il y a de très nombreux enfants à bas âge. Avec des mères tout aussi jeunes dont l'âge moyen est de 16 ans. Quand elles ne sont pas enceintes, elles portent un enfant dans les bras ou au dos. La plupart de leurs enfants sont en âge d'aller à l'école, mais hélas ! Et comme il fallait s'y attendre, le taux d'analphabétisme est effrayant. La presque totalité des jeunes gens, filles ou garçons, ne savent ni lire ni écrire, ni même s'exprimer en français. C'est à peine s'ils répondent quand on leur adresse la parole.

Kondossou est une terre oubliée. Au propre comme au figuré, par les autorités administratives et, surtout, politiques de M'Bahiakro. C'est la toute première fois qu'un président de parti arrive ici. Le simple fait de vous déplacer jusqu'ici est à saluer?, se borne à dire le porte-parole de la communauté villageoise, M. N'Guessan Kangah. Son village n'est cependant pas le seul dans cette situation. Ahougnanfoutou, Awêbo et Krakrakro dont les habitants sont venus à la rencontre avec le président du FPI, souffrent du même mal. Quand, après le meeting, la délégation prend la direction d'Akafou-N'Drikro, on croit en avoir fini avec le tableau noir. La danse Vlou? exécutée par les villageois, met un peu de baume au c?ur et l'on a tendance à se laisser gagner par la grande joie qui anime les villageois. Et pourtant, quelques pas à travers le village suffisent pour se rendre compte qu'ici non plus, il n'y a ni électricité, ni école, ni centre de santé. La pompe hydraulique du village a été installée en 1975. Elle a rendu l'âme depuis belle lurette et l'on s'approvisionne en eau dans un petit cours d'eau qui coule à l'orée du village. J'ai trois enfants. L'aînée apprend la couture à Soubré et les deux autres sont avec moi ici. Ils n'ont jamais été à l'école?, explique M. Firmin Kouakou Kangah. Le plus jeune de ses enfants, présent sur le lieu du meeting, a pourtant plus que l'âge d'aller à l'école. Pour ce qui est de la santé, la situation n'est pas meilleure. Nous allons nous soigner à M'Bahiakro, à près de 100 Km d'ici. Aucun enfant n'est scolarisé dans notre village. Avant la guerre, la situation du village était déjà ainsi?, précise notre interlocuteur. Le village est loti depuis 1993, selon des habitants qui comptent sur leurs doigts, mais toutes les maisons sont en terre. Elles sont construites dans le style dahoméen? et recouvertes de feuilles de rônier. Et le manque de perspective fait que personne ne respecte le plan de lotissement du village. A Bandamankro, on ne peut s'empêcher de se demander si les autorités de M'Bahiakro, notamment le conseil général, a une dent contre la tribu Sondo ou si celle-ci compte si peu à ses yeux qu'il refuse d'en faire cas dans ses projets. Bandamankro non plus n'a ni école, ni centre de santé, ni électricité et la quasi totalité des maisons sont en banco et recouvertes de chaume. Ici toutefois, on n'est qu'à 60 Km de M'Bahiakro, même si l'état de la piste rend la trafic des camions de transport, très rare. Quand nous sommes malades, nous allons nous soigner à M'Bahiakro?, les plus chanceux des enfants, ceux qui peuvent avoir une chance d'aller à l'école sont ceux qui vivent loin de leur village, dans d'autres localités. Les futurs analphabètes s'entassent dans le village. L'arrivée d'Affi N'Guessan plonge les villageois dans une sorte d'euphorie. Tout le monde se met à bouger et personne ne semble pouvoir tenir en place. Même le chef Nicolas Kramo Anien doit faire des efforts pour ne bouger que la tête. Son porte-parole donnera une explication de cet état de fait. C'est la première fois qu'une personnalité de votre rang foule le sol de la région. Depuis 40 ans, nous nous sommes enfermés dans le PDCI et notre région a reculé de plus de 80 ans. Aujourd'hui, grâce au député Baudouhat, nous avons décidé de nous ouvrir au FPI?.
Nul doute que l'espoir placé par les populations dans le FPI pèsera comme une charge sur les épaules d'Affi N'Guessan. Les populations de la tribu Sondo qui, naguère, ne voulaient pas entendre parler d'autre chose que le PDCI, ont promis de donner la victoire à son parti, à toutes les élections à venir.

Paul D. Tayoro
envoyé spécial

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