samedi 1 septembre 2007 par Fraternité Matin

Quelle est l'opportunité du concours de français que vous avez lancé il y a quelque temps à travers les lycées et collèges d'Abidjan qui prend fin aujourd'hui?
Le concours de français est une vieille tradition qui date de l'époque où nous étions jeunes. Mais aujourd'hui, évidemment, la question mérite d'être posée pour savoir s'il est toujours bon d'encourager la langue française chez nous. Nous pensons que tant que la langue française demeure notre langue officielle, on ne peut pas ne pas veiller à sa pratique juste et efficace. Tout simplement parce que la langue est tellement liée à la pensée que si on laisse les enfants la massacrer parce qu'on la considère comme une langue étrangère, on fera beaucoup de tort à leur pensée. En les empêchant de raisonner sainement. En tant que linguiste, je soutiens que la langue est trop liée à la pensée. Les non spécialistes ne s'en rendent pas compte parce qu'ils ont une habitude empirique de pratiquer la langue qui fait qu'ils croient que ça va de soi. Non! Ça ne va pas de soi. La langue modifie la pensée, elle la structure. Tant qu'une ou deux de nos langues nationales n'auront pas un jour pris le pas sur la langue française, eh bien, on devra s'occuper de la manière dont on s'en sert.
J'ajoute à cela, le fait que nous sommes aujourd'hui à l'heure de la cybernétique et vous savez à quel point, les courriers, les relations épistolaires ont disparu totalement. Nous assistons, à travers les SMS, à un massacre en règle de la langue française parce que, aussi bien les jeunes que les adultes sont pressés, de sorte que, pour dire ?'Je vais'', ils préfèrent écrire: ?'Je vê''. Le reste, ce n'est pas leur problème. Entre l'efficacité et la vitesse d'exécution qu'exigent les nouveaux outils de communication et l'accoutumance qui peut s'instaurer, il y a problème.
Notons que les Universités de Cocody et de l'Atlantique ou bien d'autres encore, entendent désormais enseigner les langues ivoiriennes. C'est une bonne initiative! Alors, ces deux langues vont concourir. Vous savez, les nations n'ont pas d'âge, sur cinquante ans ou cent ans, qui sait, nos langues s'imposeront un jour. Et une langue africaine pourrait devenir une langue de communication internationale. En ce moment-là, on n'aura aucune raison de s'accrocher à tout prix à la langue française. Mais en attendant, c'est notre outil de communication, il faut qu'on le soigne!

Propos recueillis par
Mayane Yapo

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