vendredi 31 août 2007 par Le Matin d'Abidjan

Les cadres du département de Danané dénoncent l'activisme du ministre Mabri Toikeusse accusé de retarder le développement de la région et de prendre en otage l'UDPCI. Ils ont décidé de monter au créneau pour faire entendre la voix des populations.

La tournée du président du conseil général de Danané dans les chefs lieux de sous-préfecture du département a pris fin mardi dernier à Bin Houyé. Au cours de ce périple démarré le mercredi 22 août dernier, Noutoua Youdé qui était accompagné de nombreux cadres et élus de la région a expliqué aux populations, les tenants et aboutissants de l'accord de Ouaga. Après l'étape de Danané, c'est le nouveau département de Zouan Hounien qui compte Bin Houyé au nombre de ses sous-préfectures, qui a accueilli la délégation. Le président du conseil général de Danané et des membres de sa délégation constituée de cadres de différents partis politiques ont expliqué aux populations le bien-fondé de leur attachement à l'accord de paix. Il les a exhortées à se l'approprier afin de favoriser la reconstruction dans les meilleurs délais de leur région qui a souffert le martyr au cours de cette crise. Et de tourner le dos à ceux qui racontent qu'il est en campagne pour le candidat Laurent Gbagbo. ''Je ne suis pas contre la candidature de Mabri Toikeusse à l'élection présidentielle. Mais soyez réalistes. S'il veut être président de la république, ce n'est pas ici qu'il a besoin de battre campagne alors que le reste du territoire national est à conquérir. La vérité, c'est que c'est le conseil général de Zouan Hounien qui l'intéresse et rien d'autre'', a-t-il soutenu. Le contrôle de cette institution incontournable pour le développement du département serait à l'origine de la guerre de leadership dans laquelle les deux fils de la région sont engagés. La candidature du ministre Mabri à la présidentielle, ce serait de la poudre aux yeux. Juste pour entraîner les populations qui ont déjà assez souffert dans une aventure sans lendemain. Une situation qui viendra dégrader davantage les conditions de vie des populations. Vu que malgré les problèmes que vit le département depuis le début de la guerre, Mabri n'a jamais usé de son titre de ministre pour mener des actions en faveur de ses parents. ''Pourquoi les mairies de Bin-Houyé et Zouan Hounien n'ont pas de budget de fonctionnement jusqu'à présent ? Alors que Toulepleu, Bangolo et bien d'autres localités qui ont été reprises par les forces gouvernementales ont vu leur situation régularisée ? Mabri n'a pas l'honnêteté de vous dire qu'on nous accuse d'avoir favorisé la guerre dans la région'', assène l'ex-président du groupe parlementaire UDPCI. Le député Oulé Tia, président du RDP, viendra enfoncer le clou, convaincu que l'accession du ministre Mabri à la tête du parti de Guéi Robert est une erreur. Pis, il estime que le parti est pris en otage pour satisfaire des intérêts personnels. Ce qui compromet dangereusement son avenir. Selon lui, les arguments ne manquent pas pour montrer que l'héritage politique du général Guéi est en lambeaux : ''Mabri a chassé tous les fondateurs du parti. Sur les quatorze députés que Guéi a laissés, il ne reste plus que quatre dans ses rangs. Et sur les 17 membres fondateurs, il ne reste que 2 de l'UDPCI, 6 partis politiques ont émergé. Il ne reste plus rien à l'UDPCI. Mabri a détruit le parti. C'est la vérité qu'il vous cache. Après Ahipeaud Martial, Kahé Eric, Akoto Yao, Monné Tia et autres, il s'apprête à chasser Noutoua. Pour résoudre donc l'équation du développement de la région, les deux élus et les cadres de la région ne voient pas d'autre issue que de poser des actes pour convaincre les tenants du pouvoir que ceux qui ont tué les Guéré ont aussi assassiné des Yacouba. ''C'est le temps d'aller chercher le président pour qu'il vienne voir que nous avons souffert le martyr. Nos routes, les écoles etc., qui peut nous aider à les reconstruire si ce n'est Gbagbo ?'', a martelé le président du conseil général de Danané. Dans ce cadre, une délégation de deux cent personnes, faut-il le rappeler, se rendra bientôt à Abidjan pour inviter officiellement le chef de l'Etat à se rendre dans la région. A Bin Houyé, les 51 chefs de village et le chef du canton de Koulanlé, le seul de la sous-préfecture, ont demandé à Noutoua Youdé de les aider à régulariser leur situation vis-à-vis de l'administration. Aussi lui ont-ils demandé de se pencher sur le problème des routes qui sont impraticables et l'électrification de leurs villages. A ces deux dernières étapes, on notait la présence du professeur Digbéi, le directeur de campagne de Laurent Gbagbo dans le département de Zouan Hounien.

La fête de la solidarité politisée à Danané
Deux jours avant, c'est sur l'esplanade de la mairie de Danané que Noutoua Youdé et Mabri Toikeusse se sont rencontrés pour la première fois depuis que le premier cité a été suspendu de ses responsabilités au sein du parti. Il était treize heures. Après les civilités d'usage qui n'ont pu masquer les difficultés au niveau du protocole, le ton des allocutions a tout de suite glissé sur le terrain politique. Dans son adresse, le maire Méamin Gbato a souhaité davantage de solidarité à l'endroit du département de Danané qui ne devra surtout pas être oublié, insiste-t-il, au moment de la reconstruction du pays. A sa suite, le président Noutoua Youdé, vice-président de la cérémonie, a soutenu que la solidarité doit devenir une réalité dans l'extrême ouest après la guerre. Une exhortation aux filles et fils de la région à s'unir pour son développement. Au lieu de s'oublier dans les querelles politiques qui ne profitent surtout pas aux populations. Par ailleurs, il a chargé le ministre Mabri Toikeusse qui représentait le premier ministre Soro Guillaume de transmettre au gouvernement et au président Gbagbo les préoccupations des populations de Danané. ''Nous ne voulons pas être oublié dans l'application de l'accord de Ouaga'', a insisté Noutoua Youdé. Vient alors le tour de parole du président de la cérémonie, le ministre Mabri. Il faut dire qu'il s'est fait accompagner d'une importante délégation constituée en majorité de hauts dignitaires de l'UDPCI. Notamment Siki Blon Blaise, Woï Messé, Jacquet Florent, Don Ouello, Dié Bonaho et bien d'autres. On se croirait à un meeting politique. Mais cela valait la pleine car la fête de la solidarité était un prétexte pour donner la réplique à Noutoua qui était en pleine tournée dans la région. ''Si le gouvernement m'a choisi pour venir présider cette cérémonie, c'est parce que je suis le mieux placé pour traduire les préoccupations des populations'', dira-t-il d'entrée. Et quand une coupure d'électricité vient interrompre brusquement son discours, le ministre des Transports se contient difficilement. ''Ils sont vaincus au nom de Dieu tout puissant. Ils sont vaincus parce que tout Danané est solidaire avec moi. Ils ne réussiront pas'', a-t-il lancé. Sans doute, pensait-il que ce sont ses adversaires politiques qui sont à l'origine de cette coupure d'électricité. La tension déjà vive entre les deux états-majors est devenue plus forte. Sortie de son contexte, la deuxième édition de la fête de la solidarité qui a élu domicile à Danané a montré l'ampleur de la guerre Noutoua-Youdé. On se rend compte que les enseignements du sociologue Dédi Séri sur la solidarité la veille, dans la salle de conférence de la mairie n'ont servi à rien. Pourtant, sa conférence a été très appréciée des populations qui n'ont pas manqué d'inviter les cadres et élus de la région à s'en inspirer pour le bonheur du département. Dommage !

Emmanuel Akani
Envoyé spécial à Danané et Zouan Hounien



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