vendredi 31 août 2007 par Fraternité Matin

Le 30 juillet dernier, des leaders politiques ont fait la fine bouche. Ils ont brillé par leur absence à Bouaké, capitale de la paix?. Au-delà de l'extraordinaire mobilisation et des populations, et de la présence de plusieurs Chefs d'Etat africains, le formidable impact de la cérémonie symbolique de la Flamme de la paix? sur le cours des événements, montre qu'ils se sont indéniablement fourvoyés. Car, le Bûcher de la paix? a agi comme un déclic. Le retour de la confiance qu'il induit a dopé le déplacement des populations sur toute l'étendue du territoire national, les activités commerciales, etc. C'est le boom également au niveau politique. Depuis le déclenchement de la rébellion armée, les manifestations n'ont jamais été aussi intenses qu'au lendemain de l'arrangement politique de Ouaga. Elles se déroulent, sans encombre, aussi bien dans les ex-zones assiégées, autrefois interdites, aux partis politiques que l'ex-zone gouvernementale. Comme l'hirondelle qui annonce le printemps, l'embellie politique augure bien de l'organisation prochaine de la présidentielle. Les tournées succèdent aux meetings dans toutes les contrées du pays. La campagne électorale est déjà engagée et bat son plein. Avant son ouverture officielle. Toutes les principales formations sont sur le terrain. Affi N'Guessan ratisse large et tente de grignoter des voix dans les bastions habituels du PDCI-RDA. Alassane Ouattara, lui, a battu le rappel de ses troupes aux USA et, samedi dernier, à Paris. Il se lancera bientôt à l'assaut du pays profond. Konan Bédié va également abandonner sa retraite douillette (?) de Daoukro pour entamer, nous dit-on, un périple à travers le pays à partir de Dabou, où il est attendu dans les jours à venir
Même si les autres partis politiques refusent de s'en laisser conter et tentent de se faire une place au soleil, les poids lourds, eux, se livrent une lutte de leadership sans merci et, pour l'heure, à distance. Chaque sortie de l'un constitue un test de sa capacité de mobilisation et agit comme un véritable baromètre pour évaluer ses chances de succès. Baromètre qui ne laisse pas indifférents les adversaires. Bien au contraire. Surtout que chacun est convaincu qu'il va sortir vainqueur du prochain scrutin présidentiel.
Le président du PDCI-RDA, ancien Chef de l'Etat, se base sur son expérience? et sa majorité sociologique? pour soutenir, comme on le dit prosaïquement en Côte d'Ivoire, qu'?il n'y aura pas match?, c'est-à-dire qu'il ne fera qu'une bouchée de ses adversaires. Ce mardi, au siège social du FPI à Abidjan, Sylvain Miaka Ouretto, secrétaire général de ce parti, a été sans ambages: Je tiens à vous dire que Gbagbo est déjà réélu !?. Le président du RDR est, lui, plus que confiant: Ado sera candidat et il gagnera les élections. Je le répète, en 2008, nous serons à la Présidence de la République?. Dans le décor qui se plante, la politique est en train de reprendre ses droits. Tous ses droits. Qui ont été confisqués, depuis 1999, par les armes et l'instabilité institutionnelle. Le président du RDR s'en est réjoui, à Paris, face à ses partisans: Si vous êtes là, cette après-midi, c'est parce que vous avez la ferme conviction, comme moi, que l'action politique est le moyen le plus sûr pour opérer le changement que les Ivoiriens appellent de tous leurs v?ux et pour parvenir à la renaissance dont notre beau pays a besoin après tant d'années d'affrontements stériles, de violences inutiles et de gâchis?.
De la part d'Alassane Ouattara, ce discours-là parait tout à fait nouveau et mérite d'être relevé. Surtout que c'est la toute première fois que l'homme s'exprime ainsi depuis le déclenchement de la rébellion armée. Il est clair et sans bavure. Et sa prise de position veut trancher, sur toute la ligne, avec toutes les autres, qui étaient biaisées et comportaient de nombreux sous-entendus et non-dits. Le prochain Président de la République de Côte d'Ivoire?, comme il s'est présenté aux journalistes d'une chaîne française (tout comme l'avait déjà fait une dépêche de l'AFP quand il revenait au pays après le coup d'Etat du général Guéi Robert en décembre 1999), s'élève ainsi et ouvertement contre la prise des armes comme moyen d'accès au pouvoir. Mais il faut se garder de tirer des conclusions hâtives. Et prendre la sortie du président du RDR avec des pincettes. Car, en fait, elle met à nu son état d'âme. Et révèle sa profonde déception devant le statu quo ante. Laurent Gbagbo est toujours là. A croire que ce diable d'homme survit ?et survivra toujours- aux coups d'Etat. Toutes les tentatives entreprises, depuis octobre 2000, pour renverser les institutions républicaines et le dégommer ont avorté. Et, pour ne pas arranger les choses, le mandat présidentiel ? qui est un quinquennat- se prolonge indéfiniment, passant aujourd'hui à un septennat. Pis, le Chef de l'Etat a réussi à se débarrasser du bicéphalisme que les résolutions onusiennes, par deux fois, ont essayé d'introduire dans le fonctionnement de l'Exécutif pour lui couper l'herbe sous les pieds. Avec l'Accord de Ouaga, il a retrouvé la plénitude de ses pouvoirs et de ses prérogatives. D'où l'ire de Ouattara: La Constitution à laquelle certains s'accrochent, comme à une bouée de sauvetage, a mis fin au mandat du Chef de l'Etat en octobre 2005. Ce qui est inacceptable. Ce qui veut dire que depuis le 1er novembre 2005, le Chef de l'Etat est reconduit par des résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU. Mais pour combien de temps? Il faudrait que ceci ait une limite?, s'est-il insurgé, pour condamner, implicitement, la lenteur de Soro Guillaume. Le Premier ministre, ayant déclaré qu'il ne fait pas de fétichisme des dates dans l'exécution du chronogramme de Ouaga, est donc dans le viseur du président du RDR. De ce fait, la situation reste, encore et dans l'ensemble, précaire et bien fragile. Car, le processus démocratique est déjà miné. Les principaux leaders veulent l'élection présidentielle dans les plus brefs délais. Ils se sont, tous, déclarés vainqueurs du scrutin. N'est-ce pas que, sous nos cieux gris d'Afrique, il n'y a jamais de perdant et que le fair-play est un v?u pieux? Tous les discours sont en train de chauffer à blanc les militants et autres partisans à l'effet de préparer leurs esprits à la contestation des résultats en cas de défaite électorale de leur champion. Pour l'opposition, en général, et le RDR, en particulier, la régularité du scrutin ne se mesurera qu'à l'aune de leur victoire. Si les élections sont transparentes, nous sommes sûrs de les gagner?, assure Ouattara. Il promet même une retraite dorée à Gbagbo. Donc, s'il les perd, c'est qu'elles sont entachées d'irrégularités. Notre pays n'est donc pas encore à l'abri de nouvelles aventures, de nouveaux troubles et d'une nouvelle escalade de la violence pour le gnangami?* et le rendre, à nouveau, ingouvernable?. Comme l'avait prévu, déjà en 2001, le Brave tchè?. Le responsable de la chienlit est tout trouvé: l'ONU. Pour avoir supprimé le poste de Haut représentant des Nations unies pour les élections en Côte d'Ivoire.

? Mélanger en langue malinké


Par Ferro M. Bally

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