vendredi 31 août 2007 par L'intelligent d'Abidjan

Boua Tiémélé Edjampan élu du Parti démocratique de Côte D'Ivoire/Rassemblement démocratique africain (PDCI/RDA) vice-président de l'Assemblée nationale ivoirienne, nous donne à travers cette interview, les attentes de son parti pour la tenue d'élections "propres et crédibles" en Côte d'Ivoire. Après cinq ans de partition, la Côte d'Ivoire a fêté son 47e anniversaire sous le signe de la paix et de l'unité retrouvée. Quels sentiments cela vous inspire-t-il ?
Cette période est historiquement importante pour notre pays. Depuis cinq ans, le pays vit la partition et il y a eu beaucoup de déplacés, des pertes en vies humaines, une dégradation de l'économie et l'installation de l'insécurité.
Aujourd'hui, nous avons des armes partout en Côte d'Ivoire. Tous ceux qui devaient détenir des armes en ont, de même que ceux qui ne devaient pas en détenir. Nous sommes dans une situation extrêmement difficile. Il est heureux qu'à la suite du dialogue direct qui s'est tenu à Ouagadougou, nous ayons abouti à un accord qui implique directement les deux belligérants principaux. Notre parti a applaudi cet accord et s'y est impliqué, même si à regarder de près, nous n'avons pas été totalement associés. Mais, compte tenu du fait que le blocage qui prévalait à l'époque était lié aux difficultés des deux parties belligérantes, il était bon qu'à partir du moment où elles acceptent de s'asseoir, nous soyions là pour prendre acte et conduire l'affaire avec elles. Donc aujourd'hui, nous constatons qu'après l'accord de Ouagadougou, des efforts ont été faits. Un gouvernement a été installé et le début de la remise en place de l'armée s'est manifesté, avec la création du centre de commandement intégré qui pourrait préluder à la mise en place de tout le processus de désarmement et de démantèlement des milices. Même si des progrès importants n'ont pas été faits dans l'application de la feuille de route découlant de l'accord de Ouagadougou, le peuple ivoirien s'inscrit dans cette logique de retour à la paix et accepte que progressivement, nous puissions tous oublier la crise. Nous avons salué également la Flamme de la paix à Bouaké, le 30 juillet dernier où mon parti était représenté par son secrétaire général. Si le président de PDCI/RDA, Henri Konan Bédié n'y est pas allé, ce n'est pas que nous étions contre cette cérémonie symbolique. Notre v?u le plus ardent étant qu'elle aboutisse à une paix durable. Aujourd'hui, nous pouvons souhaiter qu'après ce rassemblement des Ivoiriens autour de l'accord de Ouagadougou et après la journée de la Flamme de la paix, qu'ensemble nous puissions poursuivre la mise en ?uvre de tout ce qui découle de cet accord. Auriez-vous quelques appréhensions quant à la mise en ?uvre efficiente de cet accord ?
Nous n'avons pas d'appréhensions particulières. Mais nous constatons que de temps en temps nous entendons des échos qui ne reflètent pas une volonté réelle d'aller à la paix. Quand dans un pays comme la Côte d'Ivoire où on n'a jamais vu d'attentats politiques, on tire sur l'avion du Premier ministre au moment où nous allons à la paix, on doit se poser des questions. Qui est derrière cela, qui ose une telle action dans une période aussi cruciale ? Voilà les questions qui nous amènent à nous demander si tout est prêt pour aller vers la paix. Après Ouagadougou nous avons eu une tentative de démantèlement des milices à Duekoué qui a fait long feu. Le centre de commandement intégré est installé mais on ne sait pas s'il fonctionne. La question de surveillance de l'ex-zone de confiance nous inquiète également, etc. Toutes ces questions nous inquiètent. L'accord de Ouagadougou repose sur une entente parfaite entre le camp présidentiel et les Forces nouvelles. Est-ce que cette entente existe toujours ? La confiance est-elle toujours de mise quand le problème des grades et celui des audiences foraines est posé et est à résoudre ? Toutes ces choses nous inquiètent mais nous croyons que la bonne volonté va prévaloir et qu'ensemble, nous pourrons redresser la chose et continuer pour que nous puissions réellement sortir de cette crise. La vraie sortie de crise, c'est les élections. Certaines opinions laissent entendre que l'identification, étape cruciale vers ces élections risque d'être bâclée. Le PDCI/RDA n'a pas de problèmes particuliers concernant l'identification. Le principe acquis depuis Marcoussis, puis à Accra et à Pretoria était de répondre à ce souci des Ivoiriens qui se disent ignorés, méprisés, exclus. C'est pour cela qu'il fallait procéder à une identification complète. D'abord de la population de ce pays pour que l'on sache qui est qui. Ensuite, que les Ivoiriens qui n'ont pas de papiers en aient. Bien sûr, si on détermine les Ivoiriens, on détermine les non Ivoiriens. C'est cela qui va renforcer la paix que nous allons retrouver. Or, dès que nous parlons d'identification, on parle d'audiences foraines et, chaque fois que l'on commence, il y a des difficultés. Le Premier ministre Seydou Diarra n'a même pas pu arriver aux audiences foraines. Le Premier ministre Banny a commencé, mais a connu un échec avec des morts à la clé. Aujourd'hui, on se demande si on pourra les tenir.
Nous souhaitons que ces audiences foraines se déroulent normalement. D'abord, par le fait que la réunification est en cours, et ensuite du fait que les autorités représentant l'Etat se mettent en place progressivement. Bien sûr il y a la querelle sur l'utilité de ces audiences foraines et leur portée. Le PDCI/RDA comprend le souci de ceux qui veulent que les audiences foraines débouchent sur les jugements supplétifs et sur la nationalité. Je pense qu'on est entre gens de bonne foi et on doit pouvoir y arriver. A partir du moment où les audiences foraines sont destinées essentiellement à faire les jugements supplétifs d'actes de naissance et qu'à la suite de ces audiences, les parties prenantes s'entendent pour que ceux qui ont ces jugements supplétifs puissent bénéficier de la nationalité ivoirienne, il n'y aura pas de problèmes.
Comment préparez-vous les échéances électorales à venir?
Nous préparons très activement les élections. Le seul ennui réside dans le fait que nous n'avons aucune lisibilité sur les dates. Mais nous nous sommes préparés à avoir des élections aux conditions que les choses de base soient faites. Premièrement, que l'identification ait lieu, deuxièmement, que les listings électoraux soient élaborés et enfin, que nous puissions nous asseoir pour arrêter en accord avec la Commission électorale indépendante (CEI) et le gouvernement, les modalités liées à la tenue de ces élections elles-mêmes. Nous sommes prêts et nous nous battons pour cela. Le PDCI/RDA a depuis longtemps choisi son candidat (NDLR=Henri Konan Bédié) à travers une grande convention. Depuis, nous sommes en ordre de bataille.
Ce n'est jamais fini, mais le plus important pour que les élections soient crédibles, réside dans une identification claire et cohérente. Il faut que les Ivoiriens qui doivent être identifiés et qui doivent participer au vote, aient les documents pour le faire. Si ce n'est pas le cas, nous allons à des élections qui ne tiennent pas. Un autre élément important, ce sont les médias d'État et leur utilisation. Nous ne sommes pas d'accord, nous protestons et nous protesterons d'autant plus que nous allons vers des élections. Nous demandons que là aussi, le médiateur Blaise Compaoré nous aide, car c'est un problème qui a été posé dès Marcoussis. On ne peut pas faire des élections crédibles sans que les médias aient un comportement objectif.
Un entretien de Jean Philippe
TOUGOUMA
et Boubacar SY
(Envoyés spéciaux à Abidjan)
In Sidwaya du 30/08/2007

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