mercredi 29 août 2007 par Le Nouveau Réveil

La petite sortie millimétrée du ministre M'bahia Blé Kouadio dans les colonnes de "Le Nouveau Réveil" de ce lundi 27 août aura provoqué, c'est le cas de le dire, un gros effet de panique dans le camp des inconditionnels de Laurent Gbagbo. Qui lisent dans les propos de ce haut cadre de l'Etat ivoirien qui a assuré avec brio 18 ans durant les fonctions de ministre de la Défense sous Félix Houphouët-Boigny, un appel à la révolte et au soulèvement des militaires contre le régime FPI. Et pourtant, le ministre M'bahia Blé n'a fait que conseiller utilement Gbagbo en l'invitant à modérer son langage quand il s'adresse à la grande muette.
Ils sont vraiment curieux ces refondateurs. Comme des sbires, ils ne tolèrent qu'on émette la moindre critique, même constructive, sur ce que fait et dit Gbagbo. C'est l'idolâtrie. Quand le grand prêtre prêche, personne ne devrait trouver de quoi à redire au risque d'être diabolisé, vilipendé, banni de la case commune. Un crime de lèse-majesté, passible de la peine capitale. Pour revenir au faux procès qui est fait au ministre M'Bahia Blé, il faut d'abord faire savoir que cela faisait plusieurs semaines, pour ne pas dire des mois, que nous courrions après cet homme d'expérience pour essayer de le faire sortir de sa réserve, pour lui soumettre certaines préoccupations majeures du processus de paix actuel et connaître son sentiment sur des sujets, comme les grades, la réunification de l'armée, qui fâchent. Ensuite, quand il a accepté de nous recevoir, au cours de notre entretien, nous avons noté que l'homme n'avait point l'intention de trop bousculer les meubles, de gêner les animateurs du régime en place. A plusieurs reprises, il a évité d'être mécanique devant les questions. Il a même évité d'entrer dans certaines polémiques qu'il jugeait inutiles. Cela n'apporterait rien au débat. Le ministre M'Bahia Blé a plutôt fait des constats et essayé, en tant qu'homme avisé, de suggérer des solutions. Il a par exemple dénoncé la virulence des propos que le chef de l'Etat a tenus devant les soldats le 14 août. Ce qui n'est pas un fait nouveau. Tout le monde, y compris les partisans lucides de Gbagbo, a reconnu que leur idole avait commis de graves écarts de langage. "On ne peut pas donner des armes à des gens chargés de veiller sur la sécurité du pays et ne pas tenir compte de ces hommes. J'estime que le Président Gbagbo a été trop virulent avec les soldats. Il faut faire attention, il arrive un moment où les soldats les plus soumis se révoltent. Il faut faire très attention", avait conseillé l'ex-ministre de la Défense d'Houphouët-Boigny. Où est ici la volonté de renverser Gbagbo ou la carte adressée aux soldats les invitant au soulèvement contre le régime FPI ? Les partisans de Gbagbo devraient plutôt remercier le ministre M'bahia Blé qui indique même à ses adversaires politiques comment il faut appréhender les questions et les crises militaires. Il faut, selon lui, devancer ces problèmes pour éviter que les soldats ne grognent. Et quand malgré tout une crise s'ouvre dans les casernes, il faut discuter, dialoguer avec eux. On ne les insulte pas, on ne les banalise pas. Voilà tout ce qu'a dit en substance l'ex-ministre de la Défense et qui, selon les partisans de Gbagbo, est constitutif d'une tentative de coup d'Etat.
On savait que Gbagbo et les siens avaient peur, qu'ils redoutaient quelque chose après les propos guerriers que le chef de l'Etat avait déversés sur l'armée le 14 août dernier, mais on ignorait que cette frilosité avait eu raison de leur sens critique au point où ils n'arrivent plus à faire le départ entre critiques objectives, conseils utiles et attaques ou incitation à la révolte. Qu'auraient-ils alors écrit ou dit si le ministre M'bahia Blé Kouadio était allé jusqu'au bout de ses idées et de ses sentiments ? S'il avait dit tout ce qu'il avait sur le c?ur ? Si bref, il avait véritablement explosé ?
La sérénité et le courage ne sont pas de vains mots, ce sont des comportements. Quand on n'a pas la force ni le courage de ses opinions, on n'adopte pas un certain comportement en public. Car à la vérité, les propos tenus par le doyen M'Bahia Blé Kouadio sont-ils plus dangereux que ceux de Gbagbo le 14 août ? Soyons sérieux !
Akwaba Saint Clair

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