samedi 25 août 2007 par Le Patriote

Le Patriote : Qui sont les animateurs du groupe Macase et pourquoi avoir choisi ce nom ?
Binam Bikoï Ruben : Macase est un groupe du Cameroun composé de cinq jeunes camerounais: Mbazoa Ekoa Basile Christian (Batteur), Maboma Paul Serge (Bassiste), Minka Menye Roger (Guitariste), Denguemo Louise Corinne (Chanteuse) et moi-même Binam Bikoï Ruben (Pianiste et Administrateur du groupe). Il a été créé en 1996. Au départ nous étions juste une bande d'amis qui voulait faire de la musique. Au fur et à mesure que le temps passait, nous avons commencé à croire en nos capacités et à nos projets. Et la première chose à faire était de trouver un nom. C'est ainsi que nous avons choisi Macase qui, pour nous, sonnait bien. Nous sommes des musiciens et nous sommes sensibles au son. Macase pour nous ça faisait marque et c'était bien. Ensuite derrière l'idée de ce nom- là, nous avons pris l'idée de la case africaine. En Afrique, la case, c'est l'endroit où on partage tout, où on se retrouve entre personnes chères, c'est le lieu où on se pardonne où on se connaît et où on partage. Macase, pour nous c'est ce symbole, le symbole de la case africaine réunie qui unifie et tisse les liens durables.

L.P : Vous êtes à votre deuxième participation au MASA, quel bilan en faites- vous ?
B.B.R: Déjà en 2001, lorsque le groupe Macase a participé à son premier MASA, il a connu un tournant dans sa carrière, parce que le MASA est le point de départ de notre carrière internationale. A partir du MASA 2001, nous avons commencé à avoir des contacts panafricains. Nous avons eu aussi notre prix RFI à partir de ce MASA là, puisque ce que nous avons présenté à ce concours a été enregistré à ce MASA. Avant 2001, le groupe n'a travaillé que sur le terrain camerounais. Notre seconde participation est un symbole pour nous en ce que ce MASA spécial fête le retour de la Côte d'Ivoire à la paix. Et nous nous sommes heureux d'être là pour dire que nous sommes solidaires de la stabilité de ce pays, ce, d'autant plus que ce genre de rencontre permet aux artistes africains de se rencontrer pour échanger leurs expériences. Nous sommes ici donc pour deux raisons : notre solidarité vis-à-vis de la Côte d'Ivoire et notre enthousiasme et notre optimisme vis-à-vis de la musique et la culture Africaine. Nous sommes satisfaits de notre séjour en terre ivoirienne.

L.P. Avez-vous des relations avec certains artistes ivoiriens, lesquels?
B.B.R: Vous serez peut être étonnés, mais nous avons la chance de connaître les fondateurs du village Kiyi, Wèrè-wèrè Liking est une de nos mamans, spirituellement elle est l'une de nos repères. C'est une personnalité de la Culture africaine et c'est une personne avec laquelle nous avons la chance d'avoir des relations particulières. En Côte d'Ivoire, en dehors d'elle, nous avons tissé des relations avec d'autres artistes ivoiriens dans le cadre du MASA.

LP : En Côte d'Ivoire, l'on a connu de grands artistes camerounais tels que Manu Dibango, Henri Dikongué, Sam Fan Thomas, Richard Bona qui évoluent en solo, mais vous vous êtes un groupe. Le succès aidant, la carrière solo ne va- t- elle pas vous pas vous séparer?
B.B.R: Nous pensons que notre profil de groupe, nous ne l'avons pas fabriqué pour un effet de mode. Macase est un groupe depuis le début. Nous nous sommes retrouvés, parce que nous sommes des amis et nous avons appris à travailler ensemble. Et aujourd'hui, nous défendons notre projet sur le projet d'une équipe qui travaille et diffuse sa musique. Je peux vous le dire, nous avons eu la chance de savoir ce que c'est le succès. En Afrique, quand un groupe a un projet qui réussit, il reçoit plusieurs trophées. Il passe, par exemple, au MASA, il gagne des CORAS, il passe au "prix RFI". On peut donc dire que nous ne sommes pas étranger au succès. Cela fait onze ans que nous travaillons ensemble. Au-delà de cela, il y a de multiples rencontres, il y a un développement au niveau international et commercial. Après onze, nous voulons évoluer sur une forme de développement surtout médiatique et commercial. En réalité, nous ne sommes pas inquiets, nous sommes persuadés que nous serons toujours soudés.

L.P : Le choix de votre genre musical, le Bikutsi, une musique du terroir camerounais, est-il à la base de votre succès... Ne pensez- vous pas que ce pourrait âtre un obstacle à votre éclosion au-delà du Cameroun et de l'Afrique ?
B.B.R : Notre musique n'a pas souvent eu l'étiquette "musique du terroir". Je ne dis pas que musique de terroir c'est péjoratif, parce qu'au Cameroun, nous ne sommes pas classés comme un groupe du terroir. Nous sommes plutôt considérés comme des avant-gardistes. Nous sommes des Bantous (Ndlr, une tribu du Cameroun), nous nous nourrissons de tout ce que nous sommes, même s'il y a d'autres groupes au Cameroun. Seulement nous sommes des Camerounais et dans notre "Camerounité", nous nous ouvrons à tout ce qui se passe chez nous, aussi bien à l'Ouest qu'au Nord du pays, sachant que les Bantous sont au Sud et à l'Est du Cameroun. Et nous revendiquons notre "Camérounité". Nous sommes sensibles, musicalement, à tout ce qui se passe partout en Afrique. Notre musique, c'est "le Bantou Groove", nous allons à la rencontre du monde.

L.P : Combien de productions musicales avez vous sur le marché?
B.B.R: Nous avons sorti notre premier album en 1999, le second en 2003. Nous sommes en train d'enregistrer, actuellement, le troisième album dont la sortie est prévue début 2008.

LP. La piraterie, en Afrique, a atteint une ampleur inquantifiable. A votre niveau, quels sont les moyens dont vous disposez pour lutter contre ce fléau ? Par ailleurs, l'on pourrait vous demander si vous vivez de ce que vous faites ?
B.B.R : Tout le monde sait que la piraterie, c'est le malheur de la musique africaine. Mais, je vais seulement dire que nous nous sommes organisés au Cameroun pour essayer de parler aux gens. Je refuse de croire que les populations africaines soient une troupe de voleurs. Je refuse de penser ça. La question pour moi n'est plus est- ce que les gens vont continuer de pirater. Oui, chaque fois que les gens peuvent prendre gratuitement, ils ne vont pas s'en priver. J'interpelle les producteurs, j'interpelle les artistes. je souhaite que nous nous rapprochions de nos bases. La piraterie est née parce que les CD originaux sont chers. Avec les moyens techniques dont nous disposons aujourd'hui, on peut faire un CD à un coup moins élevé qu'il y a 10 ans, alors, pourquoi maintenir les CD à des prix encore si élevés, quand on sait très bien que le prix de production est très bas. Qu'est ce qui explique cette marge ? Le peuple est conscient de ce que les CD originaux sont de très bonnes qualités. Il les achètera dès que le prix suit, dans le cas contraire, ils vont les prendre là où ils peuvent. La deuxième chose, c'est que les gens, pirates souvent parce que, malgré leur honnêteté, ils sont très éloignés des artistes dont les produits sont presque inaccessibles.

L.P. : A part la sortie de votre prochain album, quels sont vos projets?
B.B.R : Nous envisageons des tournées pour poursuivre la promotion de notre dernier album, en attendant la sortie du troisième. Nous avons aussi un projet de développement de talents émergeant au Cameroun. Nous travaillons aussi avec des artistes camerounais qui font la même musique que nous, nous les aidons à la sortie et à la promotion de leurs ?uvres.

L.P. : Vous êtes l'Administrateur du groupe. En même temps, vous en êtes le claviste. Comment conciliez- vous vos differentes fonctions ?
B.B.R: Il y a toujours un moyen de gérer des situations comme celle- là. En ce qui me concerne, sur scène, je suis artiste. En dehors de la scène, c'est ma casquette d'Administrateur qui est mise en avant. Ce n'est pas un dilemme pour moi, c'est plutôt un atout pour le groupe.
L.P. : Au-delà du MASA, quel souvenir gardez- vous de la Côte d'Ivoire ?
B.B.R: Il y en a tellement. Le souvenir le plus marquant, c'est Man. J'ai vu la force de la destruction. J'ai senti ce que c'est d'avoir vécu la guerre dans le regard des enfants qui venaient nous accueillir, dans le regard des gens qui avaient l'air perdu. J'ai vu à Man que la paix est un trésor.

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