samedi 25 août 2007 par Le Nouveau Réveil

Il y a donc un an que les Abidjanais ont été conviés à respirer les odeurs toxiques pour cause de cupidité extrême de certains Ivoiriens. Un an après, les victimes directes et collatérales sont là qui, vaincues, observent impuissantes. La répartition des 100 milliards de TRAFIGURA censés destinés à l'indemnisation des victimes a montré les limites d'une gestion de crise dont le moins que l'on puisse dire est qu'elle est calamiteuse. Si l'initiative d'indemnisation des victimes est, en elle-même juste, il reste que le mode opératoire a emprunté aux logiques les plus irrationnelles. Qu'on en juge ! C'est sur la base d'une liste prétendument exhaustive que le listing a été établi. Or, à peine a-t-on commencé à publier cette liste, que les organisations spontanées des riverains des sites de déversement des déchets toxiques ont occupé la rue pour crier leur désarroi face à l'oubli monstrueux dont ils sont l'objet. Il y a eu notamment ceux du Plateau Dokui qui, en guise de réponse à leur mécontentement ont été purement et simplement gazés. Aucun de ces groupes constitués spontanément pour faire front à la mort programmée par les cupides n'a été approché pour faire le point et trouver un autre mode opératoire. Certains ont poussé le vice jusqu'à faire courir des rumeurs selon lesquelles, les leaders de ces groupes auraient perçu l'argent d'indemnisation des associations. Tel est le cas de Mme N'GUESSAN Philomène, la première à avoir saisi l'opinion pour l'informer de la programmation de la mort des Abidjanais. Qui a donc été jetée à la vindicte et à la furie des jeunes chauffés à blanc et surexcités, détenant des armes blanches. Il y a des semaines en effet, les jeunes de son quartier sis à Laurier 9, ont encerclé son domicile pendant trois jours l'empêchant ainsi que sa famille de sortir de son domicile. Il a fallu la police pour l'extirper des mains de ses tortionnaires non sans y avoir laissé des foulures et surtout deux (2) de ses frères bastonnés par les bourreaux. Ces jeunes auraient appris que leurs indemnisations auraient été remises à Mme N'GUESSAN Philomène, qui les aurait gardées par devers elle. C'est alors que sa famille et elle, n'eurent leur salut que grâce à la police du 18e arrondissement et une société de gardiennage privée, qui les ont exfiltrés nuitamment de leur domicile, les sauvant des mains de leurs bourreaux. Or, on se souvient qu'au plus fort de la crise des déchets toxiques, les bureaux de Madame N'GUESSAN ont été nuitamment saccagés. Pour des besoins de sécurité, elle a dû faire changer d'école à ses enfants en pleine année scolaire, les faisant passer d'une ville à une autre. Il y a donc d'une part, les auteurs directs ou indirects des déchets toxiques, gents au goût du lucre bien au-dessus de la valeur d'une vie humaine, et d'autre part la cellule de gestion dont la stratégie de communication est des moins communicantes. Entre les deux, les doubles victimes à la fois des déchets et de la mauvaise communication. Le drame des victimes des déchets toxiques tient à ce que leur douleur a été sacrifiée sur l'autel des intrigues politiciennes et des égos.
En effet, le fait même de la création de deux cellules de suivi dont l'une à la primature sous Charles KONAN BANNY et l'autre dépendant de la présidence de la république, faussait le débat et jetait les victimes en pâture à l'indifférence. Les deux cellules ont- elles travaillé ensemble en vue d'harmoniser leurs approches et définir des critères non discutables d'indemnisation ? Rien n'est moins sûr. L'on sait seulement que TRAFIGURA a payé à l'Etat de la Côte d'Ivoire, 100 milliards de francs CFA. Celui-ci par le biais de la cellule mise en place par le Président de la République, a décidé l'indemnisation sur la seule base des ordonnances médicales délivrées à ceux qui ont pu se faire ausculter dans les hôpitaux publics. Quid de ceux qui étaient dans les officines privées ? Quid des riverains connus ? Quid de ces anonymes qui ne pouvaient se rendre dans les centres hospitaliers publics ? Quid des familles des morts non reconnus comme victimes des déchets toxiques ? Aujourd'hui, il y a eu deux poids deux mesures dans la politique d'indemnisation des victimes. Et l'on s'achemine vers l'indifférence et la mise en veille de cette affaire dont les conséquences continuent d'hypothéquer la vie des Abidjanais et de leurs enfants nés ou à naître. Après le passage des experts présents actuellement à Abidjan pour la dépollution des sites et la construction du centre d'enfouissement et d'incinération des ordures, que restera-t-il du processus d'indemnisation, de prise en compte des riverains des sites, des malades ?
Patrice Yao

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