mercredi 8 août 2007 par Fraternité Matin

Les habitants d'Abouabou, dans la commune de Port-Bouët, revendiquent le droit de propriété du site de l'aéroport Félix Houphouet-Boigny. La grande clôture qui ceinture l'aéroport Félix Houphouet-Boigny de Port-Bouët a été démolie, dimanche matin, sur un peu plus de cent mètres dans sa partie située du côté de Abouabou, village ébrié de la commune de Port-Bouët. Les auteurs de cette destruction ne sont autres que les populations autochtones qui, en cette matinée-là, sont sorties massivement et armées conséquemment pour s'en prendre au mur en béton. Il a fallu l'intervention du chef d'état-major des armées, le général Philippe Mangou, accompagné sur les lieux du maire de la commune, Mme Hortense Aka Anghui, pour calmer l'ardeur des casseurs qui ont décidé de remettre ça, si la promesse qui leur est faite par les deux autorités n'est pas tenue aujourd'hui.
Sur l'objet de leur colère, les autochtones de Abouabou, avec à leur tête le chef du village, M. Amon Koutouan Guillaume et les notables invoquent plusieurs raisons. Qui tournent autour de l'expropriation de leur terre par l'Etat. Il s'agit du site et de l'extension de l'aéroport. Là-dessus, nos interlocuteurs ont fait savoir que leurs droits coutumiers n'ont jamais été purgés par l'Etat avant de bâtir l'aéroport. Ils reconnaissent toutefois avoir perçu en son temps des indemnités, qui ne concernaient que les cultures vivrières de leurs parents détruites. Non seulement, ils disent attendre d'être dédommagés, mais ils sont chaque jour menacés d'expulsion de leur propre village pour des questions sécuritaires de l'aéroport. Et la goutte d'eau qui a fait déborder le vase, c'est quand des militaires, sur ordre de leur hiérarchie, se sont mis à abattre les cocotiers, propriété des villageois. C'est pourquoi, défiant l'autorité de leur chef qui s'opposait à tout règlement de la crise par la violence, les originaires du village, en particulier, les jeunes et les femmes, se sont levés comme un seul homme pour se faire entendre. Ils ont cassé une partie de la clôture, mais ont aussi occupé pendant des heures, la piste d'atterrissage, empêchant tout avion d'atterrir ou de décoller. Pis, ils ont coupé les militaires français du 43ème BIMA de leur base. Ce qui a failli tourner au drame. Car un soldat français aurait blessé par balle un jeune du village. C'est une bonne partie de la grande clôture de près de cinq mètres de haut, et surmontée de barbelés en fer, que nous avons découverte, démolie. Et il n'y avait point de casseurs sur les lieux où nous sommes arrivés aux environs de 14 h et où nous avons trouvé, par contre, un détachement de gendarmes. Lesquels nous situent en ces termes : "Les auteurs des casses sont de Abouabou et nous sommes là pour les empêcher de poursuivre leur acte". Du lieu de la destruction, l'on accède à Abouabou par deux voies : la lagune sur environ 50 mètres après avoir parcouru 200 mètres de piste, ou par la route, à partir de Gonzagueville sur la route de Bassam. Pour cette dernière possibilité, il faut parcourir au moins 15 kilomètres. C'est donc par la lagune que nous atteignons Abouabou. " Vous les journalistes, vous arrivez trop tard ! Il aurait fallu venir un peu plus tôt pour nous filmer en train de casser la clôture. " Des femmes, des jeunes gens, des personnes âgées, tous pour la plupart badigeonnés de kaolin ou de charbon, signe de "guerre", nous reçoivent avec empressement chez le chef du village, au bord de la lagune. 1ère difficulté, l'entretien avec le chef, la notabilité, les femmes et les jeunes est gravement perturbé. Toutes les 10, voire les 15 minutes, quand un avion amorce le décollage ou l'atterrissage. En effet, survolant à très basse altitude le village, il produit bien entendu des bruits de moteurs assourdissants. Comme pour entamer ses explications, le chef, M. Amon Koutouan Guillaume, dit que cette situation que le village vit constitue l'une de leurs revendications. "Avec les vrombissements quotidiens des moteurs des avions, nous sommes tous des sourds en sursis. Et comme vous le constatez, nous ne pouvons pas tenir de réunion sans qu'elle ne soit perturbée". Selon le chef, le rendez-vous avec le général Mangou dans le village est prévu pour aujourd'hui.

Landry Kohon

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