jeudi 2 août 2007 par Le Temps

Peut-être auraient-elles souhaité que jamais, la Côte d'Ivoire son ancienne colonie ne retrouve l'unité de son territoire. A peine la cérémonie du bûcher de la paix a pris fin et avant même que les lampions ne s'éteignent sur l'évènement marquant la réunification de la Côte d'Ivoire, que la France met en branle sa machine de communication. Tout, ce mardi 31 juillet y est pour disqualifier et les actes et leurs acteurs majeurs. On est pratiquement surpris de voir une France qui joue les rabat-joie. Alors que la fumée du bûcher n'est pas encore montée au ciel et les colombes lâchées par Gbagbo et Soro devant un parterre de chefs d'Etat africains n'ont pas fini de déployer leurs ailes vers d'autres horizons. C'est d'abord la chaîne en continu I-Télé qui annonce les couleurs dans un léger différé. " Le Président ivoirien Laurent Gbagbo s'aventure à Bouaké dans le fief de la rébellion la première fois depuis 2002". Annonce sans pince sourire la présentatrice du jour. Ne pouvant plus contenir son agacement dans le gros plan que fait l'envoyé spécial à Bouaké sur la tribune bigarrée de couleur Orange-Blanc-Vert qui grouille de monde, elle finit pas lâcher : "Ce monde qui a afflué de partout pour converger à Bouaké et le Président Laurent Gbagbo et son Premier ministre Guillaume Soro marchant main dans la main. Peut-être pour masquer l'enlisement du processus de paix". On se serait cru devant un fait surréaliste si le média n'était pas français. Sur une autre chaîne en continue France 24, on annonce " à Bouaké un symbole important, mais tout reste à faire pour la paix ". Comme si ce " tout " devait sortir d'un néant qu'on n'aurait jamais voulu voir se réaliser du côté de l'hexagone. L'envoyé spécial de cette chaîne distribue des tours de parole et s'essaie à un prisme déformant. Peut-être se serait-il mieux senti dans la peau d'un opposant ivoirien. D'autant plus qu'il est contrarié par l'analyse de cet expert de l'ICG (International Crisis Group) : "c'est un évènement politique important, qui a le mérite d'éloigner un peu plus le conflit armé ", dit l'expert. Un point que n'apprécie guère l'envoyé spécial qui s'empresse à tendre le micro à un véritable opposant duquel il entend une réaction appropriée. Il la trouve en la personne du porte-parole du RDR qu'il croit la mieux indiquée: "c'est un acte fort. Un retentissement considérable ", clame M. Ali Coulibaly au grand désarroi du journaliste. Ce dernier ne se laissera pas conter : "mais de là en faire une percée majeure dans le processus de paix". Boude-t-il. Voyant la réaction de l'opposant peu satisfaisante, France 24 se tourne vers "un diplomate européen" à qui elle attribue ces propos : "on n'en est très loin ". De cette analyse " diplomatique" le journaliste déduira : " résumant le sentiment de nombre d'observateurs du dossier ivoirien mardi ". A commentaire partisan suite logique étriquée : "ce matin, la Côte d'Ivoire s'est réveillée dans le même état que la veille, toujours coupée en deux et d'énormes problèmes à régler pour débloquer la situation". Peut-être aurait-il fallu préparer d'avance l'esprit de ce journaliste à ne pas croire au tour de magie. Cette citation du président Laurent Gbagbo toujours d'actualité pourrait lui servir d'analyse politique : "on ne sort pas d'une guerre comme on sort d'un dîner gala ". Continue d'asséner le chef de l'Etat ivoirien à toutes ces personnes qui continuent de croire aux baguettes magiques comme dans un conté de fée. C'est là tout le drame de la politique extérieure de la France. Bouder, toujours bouder et encore bouder tout processus qui ne l'implique pas. Sinon que vaut encore aujourd'hui ce sentiment de rejeter ce que l'on n'a pas conçu. " Et c'est là tout le paradoxe du processus de paix mené par M. Gbagbo et Soro depuis leur réconciliation du printemps : il a suscité un espoir de paix inédit, mais s'est jusqu'ici révélé incapable de résoudre les problèmes. Difficile de contenir son aversion Côte d'Ivoire définitivement réunifiée. Cette philosophie du " si tu n'es pas avec la France, c'est que tu es contre elle "vieille de l'époque gaulliste est toujours de rigueur. Dans le bûcher de la paix continue de voir" cette paralysie nourrit les soupçons sur les réelles intentions de MM. Gbagbo et Soro, que leurs opposants soupçonnent de vouloir avant tout assurer leurs intérêts personnels au lieu d'appliquer l'ensemble du processus de paix. " Y'a-t-il meilleure manière de jouer les rabat-joie ? A Bouaké comme partout ailleurs dans les autres villes ivoiriennes, on continue de croire qu'il " y a des gens que la paix n'arrange pas ".

Simplice Allard al08062317@yahoo.fr

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