mercredi 1 août 2007 par Le Matin d'Abidjan

De l'avis des observateurs, il n'y a pas de doute. La Côte d'Ivoire vient de franchir un grand pas. N'empêche, le bel agencement de la cérémonie et le beau tableau de la paix, estiment certains, ont été quelque peu noircis. Et pour cause !

Stupeur et désapprobation. Lundi à l'arrivée de la flamme olympique devant servir à l'incinération de l'arsenal de guerre, plus d'un a marqué son étonnement. L'assistance n'en croyait pas ses oreilles lorsque le speaker a annoncé les athlètes militaires conduits par un soldat de la force Licorne, porteur de la flamme de la paix. L'intense émotion qui secoue en ce moment la foule ne dissimule pas la gêne et la frustration sur les visages et dans les voix. De fait, nombre de participants à la cérémonie fustigent le comité d'organisation qui a noirci le beau tableau de la paix. Ils ont de quoi tenir ! Au moment où les militaires français sont fortement soupçonnés d'enrhumer la mise en ?uvre de l'accord politique de Ouaga, des Ivoiriens digèrent mal ce que d'aucuns n'hésitent pas à assimiler à un affront. L'attentat manqué contre l'avion du Premier ministre est de fraîche mémoire. Ce qui justifie le courroux des partisans de Soro qui n'ont pas eu de mots assez durs pour fustiger une telle option. Dans la zone gouvernementale, l'on s'est aussi souvenu, au passage de l'élément de la Licorne à la tête de ses frères d'armes du FDS, FN et ONUCI, des tueries de l'hôtel Ivoire, en novembre 2004. Dans chaque camp, les griefs ne manquent pas contre la Licorne. D'ailleurs, se réjouit-on dans la capitale de la rébellion, les organisateurs ont eu le nez creux, en isolant le contingent français de la ville, durant ces intenses moments de retrouvailles. Les hommes du Général de division Bruno Clément Bollée, le nouveau commandant de la force Licorne, qui ont certes été impliqués dans la sécurisation de la cérémonie, ont été tenus loin des populations. Encore que les discours officiels entendus depuis la signature de l'accord, placent les Ivoiriens au c?ur du processus de sortie de crise. C'est du reste ce que rappelle Blé Goudé à la fin de la cérémonie. Sans détours, il exprime vivement sa désapprobation. Le leader de l'Alliance de la jeunesse patriotique, sans gants, a dénoncé " cette zone d'ombre. " qui a failli tout gâcher, jugent de nombreuses voix. Le ''Général'' était d'autant plus remonté que depuis le 4 mars, le Président Gbagbo et son Premier ministre ont donné une leçon à la communauté internationale en paraphant les arrangements politiques. " La solution ivoirienne à la crise ", ressasse-t-il à satiété à ses partisans, est " une grande victoire pour la Côte d'Ivoire et l'Afrique. " Poursuivant, le patron du COJEP met les pieds dans le plat. " Les Ivoiriens ont discuté entre eux, je ne comprends pas que c'est un Français qui porte la flamme de la paix. Je ne suis pas d'accord, arrêtons avec le biberonnisme politique. La colonisation est terminée, j'aurais préféré qu'on donne cette flamme à un Burkinabé. Lorsqu'on discutait à Ouaga, les Français n'étaient pas présents, pourquoi les revoient-on à un moment aussi important pour notre pays ? Je ne suis pas d'accord, c'est la fausse note de cette cérémonie ", a décrié avec force Blé Goudé au sortir du stade de Bouaké, où justement Guillaume Soro venait de se réjouir de l'initiative locale qui conduit à la manifestation du jour. Le ''Primus'' a réitéré sa reconnaissance à l'initiateur des pourparlers inter-ivoiriens. "Excellence monsieur le président de la République, en initiant le dialogue direct auquel nous avons souscrit (), les Ivoiriens ont traduit ainsi leur volonté d'assumer leur destin politique. En signant l'accord de Ouagadougou, les Africains peuvent être fiers de leur capacité à résoudre leur problème par eux-mêmes ", a signifié Soro. De quoi justifier la stupeur de la foule venue célébrer le plan de sortie de crise labellisée Côte d'Ivoire, avec l'appui de structures et personnalités africaines. Laurent Gbagbo venait encore de le reconnaître tantôt. Ceci dit, s'exprimant sur le bûcher, le président redevient radieux. " Je suis heureux ", a-t-il dit, se souvenant de ceux qui ont payé de leur vie cette paix. Occasion de rendre hommage à tous ses compagnons de la galaxie patriotique, qui voient ainsi l'aboutissement de leur détermination. Blé Goudé, la gorge nouée par l'émouvant spectacle qu'il venait de vivre, a salué le chef de l'Etat pour son action et le Premier ministre pour son engagement ferme à soutenir la paix.

Guillaume N'Guettia

www.225.ci - A propos - Plan du site - Questions / Réponses © 2023