lundi 16 juillet 2007 par Notre Voie

La longue crise que tente de conjurer la Côte d'Ivoire a créé un phénomène bizarre qu'il va falloir aussi combattre, comme la corruption qui gangrène notre société. Il s'agit des grèves intempestives aux effets, ô combien dévastateurs, déclenchées juste pourrencontrer le président de la République !

Voyez-vous, si rien d'extraordinaire ne vient contrarier les données, les écoles primaires publiques ouvrent de nouveau leurs portes ce lundi matin. Dans des conditions certainement chaotiques, les enseignants retrouveront leurs petits élèves. Ils les conduiront dans quelques jours aux examens de fin d'année scolaire 2006-2007. Ce n'est que si cette reprise des cours est effective que le président de la République signera le décret qui contient les réponses aux revendications posées par les maîtres? et pour lesquelles ils ont paralysé l'école primaire. C'est le résultat de la rencontre que les instituteurs ont eue, le samedi dernier, avec le président Gbagbo, au Palais présidentiel au Plateau. Si cette rencontre ne sanctionnait pas un mois de grève sauvage, inutile et pénalisante pour notre système scolaire déjà moribonde, nous aurions applaudi des deux mains. Mais hélas ! mille fois hélas !
Depuis le 14 juin 2007, à l'initiative du Mouvement des instituteurs pour la défense de leurs Droits (MIDD), les enseignants membres de ce mouvement bloquent les cours dans les écoles primaires publiques. Ils entendaient protester contre un premier décret pris par le président de la République pour satisfaire leur revendication d'une indemnité contributive mensuelle de 30.000 FCFA à leur logement. Le décret litigieux excluait ceux des instituteurs qui occupent des logements de fonction et qui, de ce fait, n'ont pas de loyer à payer. Le MIDD et ses adhérents exigeaient plutôt l'extension de cette indemnité de logement à tous les instituteurs, sans distinction. Le nouveau ministre de l'Education nationale, Gilbert Bleu Lainé, qui a hérité de ce dossier entamé par son prédécesseur Michel Amani N'Guessan, a fait droit aux revendications du MIDD et promis l'entrée en vigueur de la mesure dès fin juillet 2007. Mais, contre toute attente, il a vu ses interlocuteurs du MIDD se braquer et exiger, du président de la République, la signature illico du nouveau décret qui rectifie la situation et qui leur verse cette indemnité contributive au logement dès la fin du mois de juin 2007. Nous étions déjà au 12 juin. Aux explications sur l'impossibilité technique pour l'administration d'accomplir une telle prouesse, les enseignants ont opposé la grève du 14 juin 2007 pour paralyser l'école. C'était leur sixième grève illimitée en une année scolaire.
Des autorités religieuses aux parents d'élèves en passant par les responsables des organisations de défense des droits de l'Homme, tous les médiateurs, qui expliquaient aux grévistes qu'ils étaient dans une logique suicidaire de défiance de l'autorité de l'Etat, ont échoué. Les militants du MIDD, usant de violence et d'arrogance, empêchaient les autres enseignants non grévistes de travailler. On les entendait tenir des propos fort décevants pour des responsables chargés de l'éducation de base de nos enfants. En tout cas, pour eux, sans le décret, pas d'école !?. Et pourtant, le samedi dernier, ces militants du MIDD ont longuement applaudi quand le président. Laurent Gbagbo ne signera le décret réclamé que dès que la reprise du travail aura été effectivement constatée par leur ministre
Ce matin, l'école reprend donc ses doits au primaire public. Sans le décret?, s'il vous plaît ! On aura perdu tout ce temps, fait tant de mal aux enfants, enfoncé davantage le système scolaire ivoirien, juste pour rencontrer le chef de l'Etat. Dites chers maîtres, vous n'êtes certes pas les premiers à procéder ainsi, mais entre nous, a-t-on vraiment le droit de paralyser son pays, juste pour rencontrer le Président ? Certes, dans un pays comme le nôtre, le désir de rencontrer le chef de l'Etat paraît légitime pour tous les travailleurs. Cela pourrait s'expliquer par le fait que, dans un passé récent, aucun syndicaliste ne rencontrait d'interlocuteur valable pour résoudre son problème. Au contraire, toute velléité de grève était systématiquement réprimée. Or, depuis octobre 2000, avec Laurent Gbagbo au pouvoir, les choses ont positivement changé. Le droit syndical est respecté, protégé. Alors, n'est-ce pas se rendre ridicule, blesser la crédibilité de son mouvement et dégrader l'image de son pays que de déclencher une grève juste pour voir le Président, là où l'on a été correctement écouté et même satisfait par son ministre ? La réflexion mérite d'être engagée pour une réorientation de la lutte syndicale.







C.E cesaretou2002@yahoo.fr

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