lundi 9 juillet 2007 par Le Patriote

Pourquoi et comment des terroristes tapis dans l'ombre ont voulu faire exploser l'avion dans lequel se trouvaient Guillaume Soro et une cinquantaine de personnes le vendredi 29 juin dernier à l'aéroport de Bouaké ? Une semaine durant, nos reporters ont séjourné dans le fief des Forces nouvelles. Les résultats d'une enquête approfondie sur le terrain

Il est 12 heures et demie ce jeudi 4 juillet à l'aéroport de Bouaké quand le jet privé du président du Faso à bord duquel le premier ministre ivoirien a pris place en direction de Ouagadougou disparaît dans les airs. Parmi les membres de son entourage immédiat venus l'accompagner à l'aéroport, Meité Sindou et Alain Lobognon. L'un est porte-parole et l'autre, Conseiller spécial du chef du gouvernement. Tous deux sont des rescapés de l'attentat manqué contre l'avion du Premier ministre le 29 juin dernier. Ils ont rallié la ville de Bouaké la veille mercredi en provenance d'Abidjan où ils avaient été hospitalisés des jours auparavant. Selon l'adage, le criminel retourne toujours sur les lieux du crime. Ils n'ont rien de criminels.
Mais pour leur part, ces deux victimes de l'attentat de Bouaké ont décidé de retourner sur les lieux de l'attentat qui a failli leur être fatal. Ainsi, juste après l'envol du Premier ministre en direction de Ouaga, ils font mouvement vers l'endroit exact d'où sont partis les tirs de roquette sur le Fokker 100 qui les transportait ce vendredi là. Cela, pour leur propre gouverne. Le commandant Adama Yéo, chef de cabinet du général Soumaila Bakayoko est le guide de circonstance. Lui a vécu les faits depuis l'aérogare où ils attendaient d'accueillir le Premier ministre et sa suite dès l'atterrissage. En plus, il fait partie de l'équipe de l'Etat major des Forces nouvelles qui mène l'enquête sur place. Très vite, on arrive sur les lieux. Il s'agit de la broussaille qui borde la piste A de l'aéroport dans le sens Katiola-Abidjan. Une végétation herbeuse dominée par des arbustes. Aucun grand arbre. L'endroit ayant servi de cachette aux assaillants a été délimité par une bande à rayures rouges et blanches et est strictement interdit à la circulation. Derrière le site, une clairière est visible. Le commandant Yéo tente de reconstituer les faits comme il l'a fait déjà avec la RTI. Selon lui, il faut dénombrer au moins quatre tireurs. Trois parmi eux ayant tiré les roquettes. Et le dernier qui tirait des rafales de mitrailleuse lourde, des 12,7 mm. Il indique aux collaborateurs directs du Premier ministre, la position approximative du premier tireur, puis celle du deuxième, du troisième et enfin du quatrième. Selon ses propres estimations, le premier tir qui a touché la seconde cabine de l'avion est parti de soixante mètres, le second qui a touché l'arrière du Fokker 100 est parti
de quatre vingt mètres. La provenance du troisième tir, celui qui a raté l'avion, n'a pu être évalué. Selon lui, il a pu provenir du troisième tireur qui a pris peur dès l'instant où il s'est rendu que le coup avait échoué. Dans la débandade, il n'a pu bien ajuster son tir et la roquette est partie dans le vide.
Pendant ce temps, explique-t-il, le quatrième tireur continuait de décharger des rafales sur l'avion. Après les explications, cap sur le site délimité, du moins la cachette présumée des terroristes qui ont failli faire exploser l'avion du premier ministre. Avant d'y
accéder, il montre un arbuste amputé d'une de ses branches : Ils ont coupé cette branche pour bien voir l'avion dans leur ligne de tir , fait-il savoir. Selon lui, l'objectif des terroristes était sans aucun doute de faire exploser l'avion du Premier ministre. Ils visaient pour ce faire le réacteur et le réservoir de l'avion. Mais, ils n'ont pu atteindre leur cible.
D'abord l'avion a atterri à vive allure, ensuite parce que le pilote a pris la bretelle menant à la piste B. Et c'est en
amorçant le tournant que le premier tir destiné au réacteur a atteint la deuxième cabine. Et le second tir qui visait le réservoir a plutot atteint le fuselage. En clair, la man?uvre opérée par le pilote a permis de changer l'angle des projectiles. Contrairement à ce qui a été écrit dans la presse, les assaillants n'ont pas creusé de tranchées. Mais, ils ont utilisé le terrain pour opérer à leur guise. L'espace qui
entoure l'aéroport de Bouaké est parsemé de crevasses occasionnées, soit par les intempéries, soit par les cultures champêtres. Mais au-delà, les caniveaux occasionnés par les travaux de construction même de l'aéroport de Bouaké existent, bien que recouverts par les herbes. Les assaillants en ont profité pour se fondre dans la nature. Par exemple, à l'endroit d'où a opéré le premier tireur se trouve une ancienne termitière. Le creux de cette termitière lui a permis d'échapper à la vue des éléments des Forces nouvelles positionnés, selon le
commandant Yéo, sur l'autre versant de la piste. Bien camouflé à cet endroit, il a fait mouche. Le second tireur lui s'est camouflé dans un creux existant depuis les travaux de construction de l'aéroport. C'est de là qu'il a atteint le fuselage de l'avion avant de décrocher en utilisant le caniveau recouvert par des herbes pour se retourner dans la clairière décrite plus haut et se fondre définitivement dans la nature. Le tireur à la mitrailleuse lourde était chargé de faire la couverture pour permettre à ses acolytes de rejoindre en toute sécurité le véhicule de dégagement qui les attendait sur la voie non bitumée menant à Diabo : Après avoir opéré, ils ont ramassé leurs clic et clac et sont partis. Sur place, nous avons retrouvé des restes du repas froid qui leur a permis de se nourrir durant leur planque jusqu'à l'arrivée de l'avion .
Dans les environs de la zone d'opération des assaillants, un champ de mais et d'ignames dont le propriétaire n'a jusque là pas encore été identifié, estime le commandant Yéo. En plus du quartier périphérique jouxtant l'usine Gonfreville, trois villages baoulés existent dans le périmètre aéroportuaire. Il s'agit des villages de Konankankro, Allocokro et Amanikro.
Des perquisitions ont eu lieu dans ces villages avec la permission et l'accord de leurs chefs respectifs. Des perquisitions restées jusque là infructueuses, selon des sources proches du dossier et le témoignage même des villageois
interrogés. Cependant, de recherches sont engagés pour retrouver le propriétaire du champ de mais et d'igname situé à proximité du lieu de l'attaque. Il pourrait s'avérer un témoin capital s'il était présent ce jour là dans son champ, estime une source.

Khristian Kara (Envoyé spécial)

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