vendredi 29 juin 2007 par Le Front

La réforme du permis de conduire fait l'objet de contestation de la part des auto-écoles. Dans cette interview, le secrétaire général du syndicat national des exploitants, employés et moniteurs d'auto-écoles de Côte d'Ivoire (Syneemae-ci) en donne les raisons. Sans détour, il aborde tous les problèmes qui plombent l'essor des auto-écoles. Qu'est-ce que les auto-écoles reprochent au nouveau permis de conduire qui s'inscrit dans une vaste réforme des transports en Côte d'Ivoire ?
Nous ne reprochons rien au nouveau permis de conduire. Cependant, nous dénonçons un vice de procédure. Pour une telle réforme, l'Assemblée nationale devrait statuer là-dessus et adopter une loi parce que le permis va changer de format. En outre, avec cette réforme, les catégories A et B ne sont plus permanentes. C'est donc un problème national. A cela, il faut ajouter l'élévation du coût dans l'identification du candidat. Je suis surpris de voir que les coûts de la visite médicale sont exorbitants et qu'on annonce que des diabétiques n'ont plus le droit de conduire. Nous sommes en période de crise, ce qui ne permet pas aux citoyens de supporter les coûts d'une visite médicale s'élevant à près de 60.000 Fcfa. Ainsi le nouveau candidat a du mal à payer non seulement la visite et les frais d'auto-école. Ce qui fait environ 200 000 à 300 000 F pour s'offrir un permis de conduire. D'où les difficultés actuelles des auto-écoles. Si les coûts du pré- enregistrement étaient revus à la baisse. Est-ce que les auto-écoles accepteraient la réforme ?
Le Syneemae-ci dit non au pré-enregistrement, car à l'auto-école, nous faisons le pré- enregistrement. En outre, tel qu'il est imposé, le pré-enregistrement est une vaste escroquerie bien organisée et bien ficelée, pour permettre à Starten-ci de gruger des Ivoiriens et se remplir les poches. Tenez, au niveau des papiers timbrés, les auto-écoles paient à l'Etat près de 20 milliards de Fcfa. Mais le nouvel investisseur chargé du pré- enregistrement pour scanner simplement des photos sur des papiers timbrés engrange plus que l'Etat ivoirien. Nous ne sommes pas surpris que cet opérateur propose près de 25 milliards de Fcfa à l'Etat. En réalité, ce sont les Ivoiriens qui paieront toute cette somme. Pour scanner une photo, il n'est pas utile de débourser autant d'argent. L'administration avance qu'elle impose le pré- enregistrement pour sécuriser des données sur tout candidat en vue de rendre le permis fiable. Que répondez-vous à cet argument ?
C'est vrai l'administration n'a pas tort de parler de la fiabilité des titres de transport. Cependant, il y a un problème. En effet, une ordonnance de 2000 signée de feu le général Robert Guéi permet de créer une redevance pour développer le secteur des transports. Ce qui a été fait. Où est donc passé le fonds recueilli de sorte qu'aujourd'hui, c'est à un investisseur que l'autorité de tutelle demande de moderniser cette filière ? Il faut le dire, les auto-écoles ne se limitent qu'à la formation. Les faussaires sont donc du côté de l'administration. Ce sont des fonctionnaires véreux qui tirent profit de la fraude et s'opposent à l'essor de l'administration. Si nous voulons être un peu objectifs, nous nous apercevons que les papiers servant à l'édition des permis de conduire sont importés de France. Mais ces papiers se retrouvent au black market d'Adjamé et dans certains endroits de Treichville. Cela n'est possible qu'avec la complicité de certains agents véreux de l'administration ivoirienne. Les auto-écoles sont les parents pauvres dans cette affaire. Elles sont contre la fraude et souhaitent que l'Etat sécurise ses recettes. Nos v?ux, c'est que les signatures que nous mettons sur les fiches d'examen payées au trésor aident l'Etat à atteindre cet objectif. C'est pourquoi nous nous offusquons qu'on nous accuse de fraude. Les dysfonctionnements que nous déplorons sont dus au ministère des transports. Vous semblez en avoir gros sur le c?ur. Quelles en sont les raisons ?
Voyez-vous, il existe des problèmes cruciaux dans notre secteur d'activité. Il s'agit notamment de la récurrence des accidents avec leur lot de morts. Mais ces tares ne préoccupent guère le ministère des Transports. Parce que le permis génère de l'argent alors il s'acharne sur ce dossier. Tenez, l'Etat ivoirien n'a pas encore signé une convention de concession avec Starten. Mais le premier responsable actuel de ce département, M. Mabri Toikeusse, fait croire le contraire. C'est dire qu'il y a du faux actuellement dans ce ministère. A cela, il faut ajouter d'autres dysfonctionnements, à titre d'exemple, des moniteurs d'auto-écoles qui ont passé leurs examens depuis 2000 n'ont jamais eu leur diplôme. Des moniteurs, qui devraient travailler en harmonie avec l'Oser pour contribuer à la réduction du taux d'accident, ne le font plus. Cela n'est pas normal. Nous nous battons pour l'intérêt de la Côte d'Ivoire. C'est pourquoi nous demandons que l'Etat remette la filière aux mains des auto-écoles. Car les moniteurs vivent comme des esclaves. Nous ne comprenons pas que les grandes compagnies de transport ne soient pas en mesure d'engager des moniteurs pour recycler leurs conducteurs. C'est à tout cela que nous voulons remédier. L'administration dénonce qu'il existe de nombreuses auto-écoles fictives d'où la réforme. Que répondez-vous à cette préoccupation ?
Je crois que le directeur de la direction générale des transports terrestres et de la circulation (Dgttc) a vu juste lorsqu'il dénonce qu'il y a des auto-écoles fictives. Mais cela se comprend. Il y a des moniteurs d'auto-écoles qui ont plus de dix-sept (17) ans de métier et qui n'ont pas d'autorisation. Parce que la commission de délivrance des autorisations ne siège pas. C'est donc la faute de l'administration qui est en train de tuer les auto-écoles. Pis, pendant que la commission ne siège pas, on est surpris de constater que des individus ont en leur possession des autorisations signées du directeur de la Dgttc. C'est avec quelle magie ces personnes atteignent-elles leur objectif ? Aujourd'hui, nous en avons gros sur le c?ur. C'est la raison pour laquelle nous attendons avec impatience la rencontre avec le chef de l'Etat. Si cette rencontre avec le président de la République n'était pas imminente, nous aurions dû arrêter les examens pour mettre en évidence notre colère. Car, nous sommes assaillis par les problèmes. Les mêmes agents de la Dgttc se retrouvent à la Sonatt, Starten, Côte d'Ivoire logistique pour chercher des sous, rien d'autre. La formation n'intéresse personne. Les examens de permis de conduire se déroulent-ils normalement dans le contexte actuel ?
Les examens se déroulent à compte-gouttes. Puisque ce sont les candidats qui ont été immatriculés depuis deux mois qui sont programmés actuellement. Tout cela à cause de la procédure de pré- enregistrement mise en place par le ministre Mabri Toikeusse, le 07 mai ; soit deux jours après sa nomination. Sans même nous consulter, il a pris une mesure impopulaire qui risque de créer des troubles dans notre secteur. Quelle est la situation des auto-écoles, aujourd'hui ?
Les auto-écoles vivotent. Elles ne travaillent plus. Le ministre Mabri Toikeusse nous a mis dans d'énormes difficultés. Nous faisons semblant de travailler. C'est dire que nos structures ne sont pas en mesure de payer leurs impôts. Ce qui est écoeurant, c'est que les autorités restent indifférentes à notre situation. On veut nous obliger à nous révolter. Je demande au gouvernement de plancher sérieusement sur cette filière.



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