mercredi 27 juin 2007 par Fraternité Matin

Le messager de la paix de l'ONU a dévoilé, hier à Fraternité Matin, son plan pour mettre fin au conflit ivoirien.

MON PLAN DE SORTIE DE CRISE

Le plan est dénommé La pyramide du salut. Une pyramide coiffée par un Chef d'Etat, Président de la République en la personne de Laurent Gbagbo, suivi par un Premier ministre, Charles Konan, à la tête d'un gouvernement d'union nationale. Puis vient le Conseil suprême des sages comprenant les anciens présidents d'institution et Premiers ministres : Mamadou Koulibaly, Pascal Affi N'Guessan, Laurent Dona-Fologo, Henri Konan Bédié, Alassane Dramane Ouattara, Kablan Duncan, Seydou Elimane Diarra, Séry Gnoléba, Emile Brou et tous les autres qui entrent dans sa composition. Mais, Guillaume Soro, en sa qualité de chef des Forces nouvelles doit en faire partie. Dans tous les cas, la liste des membres du Conseil sera discutée et arrêtée par l'ensemble de la classe politique. Ce que je propose n'est qu'un squelette qu'ils doivent habiller. Mais dans mon plan, chacun des membres de ce conseil anime une Cellule de réflexion dont il choisit les membres. Je suppose par exemple que M. Ouattara voudrait être un jour président de la République. Alors, ceux qu'il voudrait mettre dans son gouvernement vont constituer sa Cellule de réflexion. Ce sera pareil pour tous les autres membres du Conseil. Tous doivent travailler ensemble ; mais chacun dans sa Cellule. Ainsi, les cellules de réflexion comprennent l'ensemble de toutes les familles politiques. Le Président Gbagbo est le président du Conseil suprême des sages chargé d'exécuter le programme de gouvernement pendant la durée de l'application de la pyramide du salut. Cela veut dire que le programme (les actions) de gouvernement sera soumis aux différentes cellules qui vont y travailler, statuer. Et quand ils finissent, ils le soumettent au Conseil suprême des sages qui le valide et le fait remonter à l'exécutif (le Chef de l'Etat) qui enfin le remet au gouvernement d'union nationale pour exécution. Cela, c'est pour éviter les querelles intestines du genre : Je suis d'accord, je ne suis pas d'accord. Tous les cerveaux dont dispose la Côte d'Ivoire se mettront au service de l'exécutif. C'est le principe de l'aviation. Ce sera la tour de contrôle qui dira au commandant de bord : Attention, orage à mille kilomètres d'ici. Attention, un autre avion arrive. Pour qu'on ne tombe plus dans les mêmes problèmes qu'on a eus qui nous ont entraînés là où nous sommes aujourd'hui. Et quand les cinq ans finiront, on ne fera pas du cinéma des présidents africains qui, quand leurs mandats finissent, cherchent un pays ami pour aller en exil. Il rejoint le Conseil suprême des sages. Et le prochain Président de la République viendra du Conseil des sages. Ça peut donc être MM. Ouattara, Fologo, Bédié, Koulibaly, Affi, etc. Et il devra bénéficier du même traitement que le Président Gbagbo, son prédécesseur. Tous pour un, un pour tous.
Quand j'ai exposé mon plan à Alassane Ouattara, il m'a dit que le Conseil suprême des sages doit avoir un code de bonne conduite. Cela évitera que ses membres se comportent n'importe comment. Et quand j'ai parlé de la pyramide du salut à M. Hamed Bakayoko, il m'a dit qu'il serait bon que le Président Gbagbo soit le président du Conseil suprême des sages. J'ai accepté sa proposition. Mais, ce sera au Conseil de se pencher sur ces petits détails. Dans mon plan, je prévois un parapluie financier pour le Conseil pour ne pas que ses membres aient des préoccupations financières. Il vaut mieux qu'ils aient tous la tête dégagée pour se concentrer sur les programmes qui leur seront soumis pour la Côte d'Ivoire. On m'a dit que cela va coûter cher. Croyez-moi, ça ne peut pas coûter plus cher que la guerre. La Côte d'Ivoire, je le dis sans prétention ni vanité. Et quand j'ai rencontré le président de l'Union nationale des journalistes de Côte d'Ivoire (UNJCI), Amos Béonao, il m'a interrogé sur la place que je prévoyais pour la presse dans la pyramide. Je n'y avais pas encore pensé. Mais je l'ai insérée dans le plan. Ainsi, après le Conseil suprême, vient la presse. Car si la presse n'est pas incluse dans ce plan de sortie de crise, la caisse de résonance risque d'être faussée. Bien sûr, ce n'est pas pour empiéter sur la liberté de la presse. Mais, elle doit jouer un rôle positif, émettre des critiques constructives et ainsi aider, de façon efficace à l'application de cette démocratie ivoirienne.

LE DÉSARMEMENT

Mais je sais que le problème épineux demeure le désarmement. Comment se fera-t-il ? Le jour où j'ai été reçu par le Président Laurent Gbagbo, j'étais avec mon petit frère Blé Goudé (c'est d'ailleurs lui qui a obtenu le rendez-vous pour moi). J'ai dit au Président ce jour-là, ce que j'avais déjà dit à MM. Alassane Ouattara, Guillaume Soro, Charles Konan Banny. Je lui ai dit qu'il fallait mettre ensemble les milices, les Forces de défense et de sécurité et les Forces armées des Forces nouvelles. Car, autant il ne faut pas lâcher les miliciens dans les rues, autant il ne faut pas lâcher les combattants des Forces nouvelles dans la nature. Il faut forcément les regrouper au sein d'une armée nationale dirigée par un état-major intégré et avec une poudrière commune. Ils doivent y être appelés avec tous ce qu'ils ont comme armes. Ainsi, on aura l'oeil sur tout le monde. On dit qu'il y a beaucoup d'étrangers dans les zones des Forces nouvelles. Avec la formation de la nouvelle armée telle que nous le pensons, les étrangers vont s'éliminer d'eux-mêmes. Car une affaire où on parle de liste et d'appel, ils ne sont pas dedans. De fait, nous aurons le nombre précis de ceux que nous devons prendre en charge.

ÉTAT-MAJOR INTÉGRÉ

Mais pourquoi l'état-major intégré ? L'état-major intégré donnera la confiance à tout le monde. Car les uns ont peur qu'on leur tende une embuscade. Mais, si les Forces armées des forces nouvelles ont leur chef auprès du général Mangou, cela va les rassurer, elles vont se sentir en sécurité. J'ai aussi expliqué au Président Gbagbo ainsi qu'à MM. Ouattara, Banny, Soro qu'il faudra réactiver le service civique. Cela permettra de donner une formation aux combattants des Forces nouvelles qui ne sont pas des militaires. MM. Gbagbo, Ouattara et Banny ont tous eu la même réaction à mon explication. Ils l'ont trouvée particulièrement judicieuse. Quant à mon petit frère Soro, il ma dit : Grand frère, mon problème est que j'ai des éléments sur la main, et je ne peux pas les lâcher dans la nature. Ça ne peut pas marcher. Le frère Chérif Ousmane, lui, m'a dit : cela est extrêmement important. Il a expliqué qu'il peut certainement avoir un poste quelque part dans une ambassade. Mais, ce n'est pas le cas pour les jeunes qu'il a formés. Wattao m'a dit la même chose. C'est dire qu'ils ont tous salué ce plan. Vous voyez qu'avec ce plan, notre guerre sera bel et bien terminée. On me dira mais où trouver l'argent ? Je voudrais que vous sachiez que la Côte d'Ivoire a un peu d'argent déjà. Mais les Nations unies sont prêtes à frapper aux différentes portes pour que les uns et les autres mettent la main à la poche pour nous aider dans ce programme de réinsertion.

UNANIMITÉ AUTOUR DE LA PYRAMIDE

J'ai proposé que la pyramide soit appliquée sur cinq ans. Cela a fait grincer des dents. Mais au début, j'ai proposé que ce temps soit discuté entre les politiques. Certains ont commencé à parler de trois ans, d'autres de deux ans, d'autres encore de quatre ans et que sais-je encore ? Alors j'ai décidé que ce soit cinq ans. Car je sais que pour la réaliser, ce n'est pas évident. Je n'aime pas les anti-inflammatoires. Je veux un médicament. Depuis le début de cette crise, on nous a déjà donné trop d'anti-inflammatoires. C'est bon comme ça. Nous voulons le médicament. Et cette Pyramide du salut a été acceptée par les uns et les autres. Gbagbo ne m'a pas menti, c'est un homme de parole. Alassane Ouattara ne m'a pas menti, c'est un homme de parole. Banny ne m'a pas menti, c'est un homme de parole. Soro ne m'a pas menti, c'est un homme de parole. Ils ont tous approuvé ce plan de sortie de crise. Soro m'a dit, qu'il n'a pas de problème avec la durée de cinq ans. Il a dit que cela ne le gêne pas de travailler au sein du Conseil suprême des sages pourvu qu'eux tous, autour de Laurent Gbagbo, puissent trouver une solution à la crise. Il m'a dit que si le Président Gbagbo est d'accord pour cela, lui est d'accord pour cela. O K ? Vous pouvez le lui demander. Il a une copie de la Pyramide. Mais celle que j'ai est plus récente. Je peux lui envoyer une copie récente. M. Ouattara est d'accord pour ça. Je vais vous dire quelque chose qui pourrait blesser les uns et les autres. Je ne suis pas un anti-Français. Mais je n'aime pas et je ne supporte pas que quelqu'un d'autre frappe un membre de ma famille. Toute résolution qui viendra d'ailleurs, je ne l'accepterai jamais et je la dénoncerai. Car la foutaise a franchi les frontières. On ne va pas continuer à accepter que des gens d'ailleurs, qui ignorent tout de nous, nous imposent des plans qui ne marcheront jamais. Toute résolution qui ne sera pas conçue ou validée par Laurent Gbagbo, Banny, Alassane Dramane Ouattara, Bédié, Guillaume Soro et leurs équipes, sera nulle et non avenue.

LA GUERRE DU PÉTROLE

Qu`ils arrêtent de se moquer de nous. La honte de mon père est la mienne. Ouattara n`a pas dit qu`il ne veut pas de Gbagbo. Gbagbo non plus n`a pas dit qu`il ne veut pas de Ouattara, ainsi de suite. De toutes les façons, c`est une solution ivoiro-ivoirienne ou c`est la guerre, pour au moins trente-cinq ans, et ils le savent tous. Ceux qui veulent arracher le pouvoir de X pour le donner à Y, sur quoi comptent-ils au juste ? Ils savent bien que Laurent n`acceptera pas, et les autres non plus. A quel jeu jouent-ils ? Moi, je ne joue pas. En vérité, les uns ne veulent pas que les autres s`en sortent. Aucun Ivoirien ne sortira gagnant d`une guerre en Côte d`Ivoire. Mais notre guerre ne profitera qu`aux vendeurs d`armes. Ils ne vont donc pas nous aider à y mettre fin.
Ne trouvez-vous pas bizarre que ce soit nous, les Africains, qui avons des richesses mais que ce soit nous qui sommes des mendiants ? Savez-vous pourquoi la guerre pourrait durer trente-cinq ans ? Vous avez du pétrole à profusion. Je le tiens de source sûre. Tous ceux qui diront le contraire sont des menteurs, des tricheurs et des voleurs. Vous avez du pétrole pour 400 ans. A raison d`un million de barils par jour. Au premier coup de feu, Laurent, Ouattara, Bédié, Soro, tous ne verront que du brouillard parce que personne n`en profitera, puisque c`est avec cela que vous paierez les armes. Et puis, attention, les marchands d`armes ne veulent pas de vainqueurs. Je tenais à vous dire ceci, parce que c`est très important. Aidez-moi !Invitez-les à s`approprier la Pyramide du salut ! C`est peut-être petit, mais c`est très important. Ce n`est pas moi qui ai fait ça. Ce sont des gens du FPI, du RDR, du PDCI. Ils ont tous compris, ils ont tous apprécié et cela signifie qu`ils se sont retrouvés quelque part.

RAPPORTS AVEC LES LEADERS DES JEUNES

Quand j'ai été nommé, je ne savais pas par quel bout commencer. Et comme le ?' Général'' Blé Goudé venait souvent au Café de Versaille et qu'on discutait parfois, j'ai demandé son avis. Il m'a dit : Grand frère, il faut que tu rencontres tous les jeunes . Donc l'idée n'est pas de moi. Et quand j'ai eu KKB, il m'a dit la même chose. Qu'il fallait que je les réunisse et qu'on puisse se dire les vérités et voir comment gérer la situation. Je ne suis pas le vrai père de cette rencontre. Mais je me suis retrouvé au bon endroit et au même moment. Les petits frères m'ont vraiment accordé de l'importance. Ils avaient déjà l'envie de se parler. Eux aussi sont fatigués de cette crise qui perdure. Alors, le cadre du Café de Versaille était approprié parce que tout le monde y va. Quelles que soient les tendances politiques. Blé Guirao est venu et on a discuté. Ce sont les différents leaders des jeunes qui m'ont dit que si je veux qu'ils viennent m'aider, il faut que je m'adresse à leurs patrons. Et c'est certains d'entre eux qui ont pris rendez-vous avec les chefs de leur parti. Donc j'avoue que dire que je suis le père de cette rencontre, ce serait légèrement prétentieux. Blé Guirao, on se voit. Nous étions une fois ensemble au Café de Versaille. KKB, Blé Goudé, Marguérita de l'Onu et moi. Nous étions là et on bouffait et rigolait tranquillement. Quand le téléphone de KKB a sonné. Quelqu'un dit, la rumeur, KKB aurait été kidnappé chez Alpha Blondy. On bouffait tranquille, le plat de poisson braisé était presque entamé, on se lançait des blagues. Nous on s'amusait lorsqu'on a raconté que ça chauffait. Quand on sort, la sécurité de mes petits frères était excitée. Je n'aime pas les coïncidences coincideuses . Et j'ai donc dit à mes petits frères Blé Goudé, Blé Guirao et KKB que notre problème est très compliqué parce qu'il y a des hommes de l'ombre qui n'ont pas envie de paix. Notre mission devient donc très compliquée. On te fera dire ce que tu n'as pas dit, juste dans le but de maintenir cette tension. C'est pour cela que quand tu dis quelque chose à Blé Goudé, il va le dire à KKB, qui va le dire à Yayoro et qui va le dire à Blé Guirao. On s'est laissé distraire. On ne laisse plus les semeurs de zizanie mener le jeu. Et il faut que les aînés aient la même attitude. Tant qu'il y aura une certaine faille, eh bien, les semeurs de zizanie auront pignon sur rue. La preuve, c'est que Kassy est là. Je n'ai pas exigé qu'il vienne. Je lui ai dit mon gars, je dois rencontrer la presse ce matin vraiment je mouille . Il m'a dit Grand frère, on sera à tes côtés. Ce matin Serge Kassy m'a appelé pour me dire le général m'a demandé de t'appeler pour voir si tu es déjà à Fraternité Matin. Je lui ai dit que j'étais en route. Il m'a dit qu'il arrive et que le Général Blé Goudé suivra. Donc, il y a vraiment une sincère relation familiale, la famille ivoirienne, singulier.. plurielle.
J'ai déjà rencontré Djué Eugène. J'ai rencontré Watchard Kédjobo, Fofana, Zéguen, Serge Koffi. J'ai eu Gervais au téléphone, Navigué au Téléphone, Damana Pickas, Yayoro, Blé Guirao. J'ai même demandé la permission à M. Salif Ndiaye pour qu'il permetre à Blé Guirao de venir à cette rencontre. Le Grand frère Salif Ndiaye m'a dit qu'il allait intercéder auprès de Blé Guirao parce qu'il y a toujours les rayons radio- actifs de la méfiance qui persistent. Il faut qu'on arrive à effacer ça. J'ai appelé la Grande s?ur Henriette Diabaté, hier, pour qu'elle permette à Yayoro de venir à la rencontre de ce soir (ndlr : hier) au Café de Versaille.

POURQUOI J'ACCUSE LA FRANCE

Vous savez, la délicatesse du peuple ivoirien, il ne faut pas être objectif. Quand tu commences à être droit, il y a toujours un camp qui trouve que tu marches pour l'autre camp. Il faut qu'on sorte de cela. Je m'évertue à dire aux uns et aux autres qu'il faut une solution ivoiro- ivoirienne. Et quand je dis que la France est coupable, je vais vous expliquer et on sera clair une fois pour toutes. Je ne veux ni offenser le RHDP ni donner l'impression d'être un anti- français. Il faut appeler un chat un chat. Ce que je reproche à la France, je vais vous le dire et ce n'est pas M. Bédié qui va me contredire. Je dis, durant la réunion de la Baule, qu'est-ce que le Président Mitterrand a dit ? Il a dit que la France ne supportera plus jamais un régime qui viendra au pouvoir par un coup d'Etat. On est d'accord. Et les Africains y ont cru. Même que M. Bédié y a cru. Le jour où M. Bédié a été renversé, qu'ont-ils fait à part affréter un avion à la famille du Président. La Bible dit que le scandale est inévitable. Mais malheur à celui par qui le scandale arrive. Nous ex colonie française, on a toujours cru en cette France. Les paroles de la France ont toujours été considérées comme parole d'évangile. C'est même Roger Ouegnin qui a demandé un deuxième hélicoptère pour M. Duncan et sa Famille. Et il y a un soldat français qui a pris la terre de la Côte d'Ivoire, l'a mise dans un papier journal pour le donner à Patrick Bédié et lui a dit : Tiens ta part de Côte d'Ivoire . Vous pouvez vérifier. Evidemment, quand on a ouvert cette boîte de pandore, des coups d'Etat entraînent toujours des coups d'Etat, je l'ai dit. D'autre avant moi l'ont dit. Après, on était dans les coups d'Etat hebdomadaires. De coup d'Etat hebdomadaire, on est tombé dans la guerre. Je répète et je récidive, la France est coupable pour non assistance à pays en danger, d'un. De deux, pour rétention d'information. Ce qui équivaut à une complicité. Il y a des accords de défense entre la Côte d'Ivoire et la France. Si la sécurité de l'Etat français est menacée, les services d'Etat ivoiriens sont tenus d'informer la France. Et si la sécurité de l'Etat ivoirien est menacée, la France qui a tous les moyens de renseignements est tenue d'informer les Ivoiriens. Alors, Bédié n'a pas été informé. Mais par contre, ce que nous ne voulions pas savoir, on le savait dans les maquis. Ils étaient au courant de tout. C'était dans les journaux français. Bédié a giflé la biche royale, Bédié est un alcoolique. C'était écrit, c'était eux. Ce qu'on devait savoir, on ne l'a pas su. Ce qui ne nous intéressait pas, ça, on l'a su. Je n'ai pas aimé ça. Il y a un certain journaliste français que j'ai écouté sur LCI, un certain spécialiste de la Côte d'Ivoire qui a dit le problème ivoirien, c'est le candidat du Nord musulman Alassane Ouattara contre le candidat du Sud chrétien Bédié. Je dis mais où est le mérite ? Je n'ai jamais connu le Nord musulman et le Sud chrétien et c'est ce monsieur qui prétend être le spécialiste de la Côte d'Ivoire. Qu'est-ce qu'ils ont fait ? Ils n'ont rien fait pour empêcher ce que nous vivons aujourd'hui, pour alléger un peu la chose.

RUPTURE FRANCE-COTE D'IVOIRE

La France et nous, c'est un peu comme ce monsieur et sa femme. Le monsieur, un jour dit à sa femme : Chérie tu étais avec moi le jour où les bandits nous ont agressés et on a failli me tuer ? Elle répond oui, mon amour. Tu étais avec moi le jour où notre camion a fait tonneau et j'ai failli mourir ? Elle répond oui, mon c?ur. Il lui demande encore, tu étais avec moi la fois où les bandits ont battu mon père à la gare d'Adjamé et lui ont crevé l'?il ? Elle répond toujours oui. Alors, il lui dit, tu sais quoi chérie, il faut qu'on se quitte parce que tu me portes malheur. C'est un peu l'histoire de la Côte d'Ivoire et de la France. Attendez ! la Côte d'Ivoire a quel âge ? 40 ans ! Mais par l'âge d'un pays, c'est comme un enfant à quatre pattes. Et la France, elle a 200, 300 ans. Et si nos politiques sont toujours liés à eux, c'est parce qu'ils sont conscients de leurs limites.
Vous ne pouvez pas prêcher quelque chose et en même temps faire le contraire. Je ne défends pas Gbagbo Laurent. Je ne suis pas en train de lui baiser les souliers. Même si c'était Alassane qui était là ou Banny, j'aurais eu le même discours. On dit que Gbagbo n'a pas confiance. Vous voulez qu'il ait confiance en qui ? En des personnes qui ont trahi Bédié ? Donc sa méfiance est justifiée. Aujourd'hui, ils veulent déshabiller Pierre pour habiller Paul. Ce sont les mêmes qui ont trahi Guéi. Il y avait un certain général qui venait chaque fois, quand il était au pouvoir, et qui lui chuchotait des choses. On a tué Guéi et ce sont les mêmes qui l'ont traité de tyrannique. Aujourd'hui encore, c'est le nouveau dictateur, évidemment c'est Gbagbo. Les mêmes diront demain que Banny est dictateur. Qu'ils arrêtent la foutaise !

UN NOUVEAU PACTE DE CONFIANCE

Si je suis là pour dire à M. Banny, à M. Alassane Ouattara, à M. Gbagbo Laurent qu'ils sont obligés de s'entendre, je sais de quoi je parle. Parce que le danger qui menace Gbagbo est le danger qui menacera M. Ouattara et le même danger qui menacera M. Banny. Et à mes yeux, que ce soit Ouattara, Banny, Gbagbo, Bédié, Soro, Mamadou Coulibaly, Affi N'Guessan, Blé Goudé ils sont tous des présidentiables.
Je vais vous poser une question. Vous ne trouvez pas bizarre que tous les journalistes européens aient accès à nos présidents ? Je vois Laurent Gbagbo sur Canal. Ils lui posent des questions. Un petit .avec son micro qui pose des questions embarrassantes. Je vous défie tous ici.
Le mépris est vachement avancé et je ne voudrais pas jouer le jeu de ceux qui disent, tu es du côté RHDP ou tu es contre eux. Je ne suis pas dans ce jeu-là. Moi, j'ai 16 millions de vies à sauver.
Quand nous avons 16 millions de vies à sauver, je ne joue pas dans ce piège à .de diviser pour régner. Aujourd'hui, on parle de quoi ? On va enlever les pouvoirs de Gbagbo pour les donner à Banny. Evidemment, ça c'est lundi. Mardi on va enlever les pouvoirs de Banny pour les donner à l'autre. Evidemment, on va y passer la carrière. Comme si c'était trop dur de trouver des solutions à nos problèmes. Il nous faut être justes, et partout. La France est un membre permanent du Conseil de sécurité et, en même temps, il s'invite dans le mauvais côté de notre débat. Ce n'est pas juste. Si vous ne pouvez pas arranger, ne gâtez pas.

ENTERRER LES GERMES DE LA DIVISION

Ce que je voudrais dire, je vous demande à tous, aux médias, ne jouez plus à ce jeu. Quand on a dit quelque chose de bien sur Gbagbo, ah oui ! donc on est devenu FPI. Quand on dit quelque chose de bien sur Alassane Ouattara, donc tu es devenu RDR. Si tu es parti voir Banny donc Ce n'est pas juste.
C'est vrai, le pays est divisé en deux. La Côte d'Ivoire traverse une épreuve. Et chaque Etat comme chaque individu doit traverser des épreuves dans sa vie. Et cette épreuve, nous la surmonterons. Comme je le dis, il va falloir que les Ivoiriens se disent les vérités, mais pas violemment. Nous devons nous dire les vérités sans violence. Parce que, à y voir de près, des gens tapis dans l'ombre essaient de nous diviser. On me demande pourquoi il y a des Patriotes avec moi et pas les autres. Mais c'est parce que les autres ne sont pas venus. Ils sont occupés, cela ne veut dire que nous ne sommes pas d'accord. C'est faux. Il ne faut pas toujours chercher à voir le pou sur le crâne du chauve.

L'IVOIRITÉ, LA CAUSE

Je pense que la Côte d'Ivoire a été divisée parce que au commencement était l'Ivoirité, ce concept identitaire qui est tellement ridicule. On demande la pièce d'identité de M. Bally (rédacteur en chef central), et puis on dit : ah ! tu es né en 1956. Mais il est né en 1956 parce que quand il a repris la classe de CM, tu n'étais pas là. Et pour aller en sixième, on a diminué nos âges. Donc depuis le commencement, tout est faussé. Ce qu'on aurait dû faire pour couper court, à l'époque j'en avais parlé à M. Bédié, c'était de dire : écoutez, comme tout est confus, essayons d'établir deux périodes bien distinctes comme les Blancs nous ont appris : la période avant Jésus Christ et celle après Jésus Christ. Ensuite, décider que ceux qui sont nés à partir d'une certaine période, qu'ils leurs soient permis de faire leurs papiers. Les autres, nés plus tard, seraient quant à eux soumis aux nouvelles règles établies. Quand on a dit que la terre appartenait à celui qui la mettait en valeur, on n'a pas concerté les uns et les autres. Ce qui n'était même pas écrit puisque nous avons une tradition qui est orale en Afrique. Mais, on ne savait pas. Vous savez, un Etat peut se tromper, un individu peut se tromper, reconnaissons qu'il y a eu cette erreur-là, mais qui est corrigible. Attendez. On ne va pas quand même pas détruire la Nation qui est remplie de forêts pour une affaire de forêt. Par exemple, à ceux qui ont perdu des terres, on aurait pu essayer de leur trouver d'autres en compensation. On aurait dû faire des concessions afin de sortir pour de bon de cette triste réalité. Parce que sans cela on n'avance pas. Et tout le monde s'énerve parce que tout le monde se sent déshérité. Aujourd'hui, on est en train de perdre le pays parce que les marchands d'armes sont à nos portes et tant que nous ne trouverons pas la solution, eux ils nous proposeront une solution toute faite : la guerre. Et c'est très rentable pour eux. Moi je pense sincèrement que le gros problème que nous avons eu, on peut y trouver une solution. En disant il y a Koné d'ici, Koné de là-bas, Kouassi d'ici, Kouassi de là-bas. Est-ce que ce sont Alassane Ouattara ou son grand-père ou le père de Laurent Gbagbo, de M. Bédié ou d'Houphouet-Boigny qui ont tracé les frontières ? Ce ne sont pas eux. Donc, bombe tribale bombe coloniale, comment allons-nous faire pour la désamorcer ? On est dedans et donc on est obligé aujourd'hui de mettre de l'ordre dans cette balkanisation du continent qui n'est pas le fait de nos chefs, encore moins celui de nos concitoyens. Et tout est parti en vrille comme ça. Bédié dit que ce n'est pas lui qui a fait l'ivoirité. Il dit que lui, il a fait un concept culturel. Alors, si le concept culturel a dérapé, on peut toujours le rattraper très vite.
Moi j'ai confiance aux cerveaux ivoiriens et il y en a plein. Il faut tout simplement qu'on leur donne le temps de s'exprimer.

LA PATRIOTITÉ?, LE NOUVEAU CONCEPT

Dans le tohu-bohu, le brouhaha et les menaces, tout premier couillon qui débarque se fait politicien. Et tient un discours incohérent, il faut vite sortir de ces conneries. C'est Fraternité Matin qui l'a écrit, alors qu'ils n'ont même pas lu l'article. Les journalistes eux-mêmes l'ont compris, que ce qui fait vendre c'est le titre. Ils donnent des titres accrocheurs du genre: Alpha Blondy : la France est un salaud . Et quand il y a de tels titres, les lecteurs se ruent sur le journal et l'achètent. Je pense sincèrement que si on a eu ce problème-là, c'est parce qu'on n'a pas laissé la parole à ceux qui peuvent résoudre la chose. On a trop vite passionné le débat. On a indexé les uns et les autres. Alassane Ouattara n'est pas la propriété de la France ni des Etats-Unis. C'est un Ivoirien. Bédié n'est pas la propriété de la France. C'est un Ivoirien. Que ce soit Affi N'Guessan, que ce soit Gbagbo Laurent, que ce soit Banny, ce sol est autant à eux qu'à nous. C'est notre capital cérébral, notre cerveau qui peut nous aider à sortir le pays de l'ornière dans laquelle elle se trouve. Faisons-leur confiance.
La patriotité? est venue de cette division. Moi qu'on a humilié, Je m'appelle Koné Seydou. Mais quand on cherche un Koné Seydou Malien, moi je suis avec ma petite amie et puis sur le pont, on m'a arrêté, on m'a humilié. Voilà ce qui fait naître de tels sentiments. Et le fameux coup d'Etat du général Guéi a fait entrer ce concept-là dans les casernes, tout Madou était RDR ; et le Koffi qui s'aventurait à le défendre était immédiatement indexé comme étant son complice. Les frères d'armes se sont massacrés à Akouédo d'où les survivants ont fui. Ils sont partis et quand ils voulaient revenir qu'est-ce qui s'est passé ?

RENCONTRES AVEC LES POLITIQUES

J`ai d`abord commencé par rencontrer les jeunes frères Blé Goudé, KKB, Yayoro, Léon, Blé Guirao, Navigué et autres. J`ai également rencontré des frères journalistes pour qu`ils me donnent des idées. J`ai par la suite rencontré des homme politiques : MM. Ouattara, Affi N`Guessan, Mamadou Koulibaly, Banny et le Président de la République qui m`a fait l`honneur de m`inviter à Yamoussoukro. Je n`ai pas pu rencontrer M. Bédié parce que KKB m`a dit qu`il était à Paris. J`ai été également à Bouaké où j`ai rencontré Soro Guillaume, Wattao, Sidiki, Chérif Ousmane et bien d`autres.
J`ai rencontré par ailleurs des personnes extérieures pour avoir leur vision de la crise et c`est d`ailleurs à partir de leurs propositions et conseils que j`ai pu m`engager dans l`esquisse d`une solution à la crise.

BILAN À MI-PARCOURS

J`avoue qu`à un moment donné, on a l`impression qu`il y a une sorte de malentendu généralisé. Et pourtant, toutes ces personnes disent la même chose. Elles ont en commun le désir de paix. J`ai pas eu affaire à des gens braqués les uns contre les autres. Chacun espère une sortie de crise honorable. J`ai cependant remarqué qu`ils ne se parlent pas assez, mais plutôt à l`intérieur de tendances communes. Il y a un manque de communication véritable. A aucun moment, je n`ai remarqué qu`ils veuillent aller à l`affrontement bien qu`ils soient énervés par moments. Si jusque-là ils ne s`accordent pas, c`est parce que chacun a des à priori par rapport aux autres. Il y a un mur de méfiance qui s`est installé entre ces différentes personnes. J`ai souvent eu affaire à des gens qui avant même que je n`ouvre la bouche refusent de parler. D`autres par contre ont refusé de me parler dans un premier temps parce qu`ils ont pensé que j`allais les convaincre dès le départ.
Pour résumer, je dirai que les Ivoiriens ont un problème de communication, un problème d`amour blessé et non de désamour. J`ai donc pensé qu`il fallait obliger les uns et les autres à se parler franchement, à se dire les vrais ``Gbê`` parce que trop de non-dits et de discours partisans ont faussé le débat. Ce qu`il faut retenir, c`est qu`ils disent tous la même chose, seulement à travers des gammes différentes.

TOUS SINCERES

Non, je n`ai pas eu cette impression. Je n`ai pas non plus eu l`impression qu`ils me tournaient en bourrique. Lorsque j`ai rencontré le grand frère Laurent, il était sincère. Il n`était pas obligé de me recevoir et de prendre tout le temps que nous avons pris. Je pense que ce sont des hommes de parole qui m`ont parlé avec leur c?ur, avec honnêteté. Lorsque j`ai rencontré M. Ouattara, c`était la même chose et je me suis même permis de poser des questions que tous les Ivoiriens se posent. Leur attitude et leurs réponses étaient honnêtes. Avec Soro Guillaume, j`ai parlé longuement. Je lui ai demandé par exemple s`il avait l`intention d`humilier le Président Gbagbo. Il m`a répondu par la négative et affirmé par la suite que l`humiliation du Président Gbagbo serait également la sienne. Ils m`ont tous appris beaucoup de choses que j`ignorais. Mais c`est parce que les uns et les autres m`ont ouvert leur c?ur ! Voilà pourquoi, j`ai foi en une paix qui est à portée de main. Cela, parce que les acteurs du conflit désirent cette paix. Vous avez vu lorsque j`ai rencontré mes jeunes frères Blé Goudé, KKB, Yayoro, ils m`ont promis des choses et ils ont respecté leur parole.
Pour revenir à ma mission, je dirai qu`elle consiste justement à briser ce mur de méfiance qui s`est installé entre les différents acteurs de la crise parce qu`on ne peut pas parler sincèrement à quelqu`un de qui on a peur.

Propos recueillis par Marc Yevou, Pascal Soro, Mayane Yapo, Evelyne Aka et Louis B. Parfait

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