lundi 25 juin 2007 par Le Front

Avec l'arrivée, à Abidjan, de la juge française Emmanuelle Ducos, les violences anti-françaises de novembre 2004, pudiquement dénommées ?'Evénements de novembre 2004'', sont remises à l'ordre du jour. Consécutives au retentissant fiasco de l'opération ?'Dignité'', les manifestations des ?'jeunes patriotes'' avaient pris pour cible les ressortissants et les intérêts français. Pendant trois jours (les 7, 8 et 9 novembre 2004), les partisans de Laurent Gbagbo ont violemment réagi après la destruction des aéronefs de l'aviation militaire ivoirienne par la Force Licorne en représailles au bombardement de la base militaire française de Bouaké. Ce furent trois jours de violence sauvage et aveugle contre les entreprises et les résidences des Français à Abidjan et dans certaines localités à l'intérieur du pays. Résultat des forfaits : plus de 100 entreprises furent saccagées et pillées. Des établissements scolaires français furent vandalisés et fermèrent. Plus de 30 000 travailleurs se retrouvèrent au chômage et sur le carreau. Près de 8000 Français regagnèrent, précipitamment, l'Hexagone en état de choc et dans le dénuement total. Le 9 novembre 2004, devant l'hôtel Ivoire, un détachement de la Force Licorne fut pris à partie par une foule de ?'jeunes patriotes'' surexcités et conditionnés. Piégés par les gendarmes ivoiriens qui les abandonnèrent, les mettant dans une situation inattendue et inconfortable de face-à-face avec les ?'jeunes patriotes'', les soldats français firent usage de leurs armes. Une jeune femme ivoirienne fut étêtée et d'autres jeunes furent tuées. En tout, on dénombra 9 victimes. L'opinion internationale s'en émut et la partie ivoirienne (clan présidentiel) y trouva matière à diaboliser davantage l'ancienne puissance colonisatrice. La thèse selon laquelle ?'la France fait la guerre à la Côte d'Ivoire'' ne pouvait pas trouver preuve plus probante. Les griefs du régime contre la France de Chirac accusée de soutenir l'ex-rébellion s'alourdissaient ainsi d'un nouvel élément. Des émissions ont donc été produites et des conférences organisées dans cet esprit. Le pouvoir d'Abidjan s'est donc appliqué, avec une rare constance, à présenter ce ?'versant'' des évènements de novembre 2004 en faisant l'impasse sur l'autre ?'versant''. C'est-à-dire les violences monstrueuses perpétrées contre les Français. Le clan présidentiel semblait donc, manifestement, les avoir passées par pertes et profits. On aurait donc pu penser que les tueries de la Force Licorne de l'hôtel Ivoire ont soldé, pour tout compte, les violences anti-françaises de novembre 2004. Que non ! Pas pour les Français, en tout cas. Ils n'entendent donc pas lâcher l'affaire, ni la pression sur le pouvoir d'Abidjan. On rappelle que les rapatriés français ont fait de leur dédommagement une condition de leur retour en Côte d'Ivoire. Comme gage de sa bonne volonté, Abidjan s'est d'ailleurs engagée à réhabiliter les établissements français détruits lors des événements de novembre 2004. La présence de la juge française Emmanuelle Ducos à Abidjan participe donc de cette logique de réparation chère à Paris. Mais, comme il fallait s'y attendre, la justice ivoirienne qui semble s'être totalement arrimée au régime, freine des quatre fers. Il nous est donc revenu que le procureur de la République s'opposerait à la démarche de la juge française. Abidjan pourrait donc multiplier les entraves judiciaires à l'effet de décourager la magistrate. Ce serait du plus mauvais effet. Surtout après l'épisode de Trafigura qui a vu l'Etat de Côte d'Ivoire recevoir 152 millions d'euros (100 milliards de Fcfa) en guise de dommages et intérêts après le désastre écologique (déchets toxiques) qui a causé de lourds dommages à de nombreuses familles ivoiriennes. L'Etat de Côte d'Ivoire devrait saisir la leçon de ce dédommagement qui lui a profité. Le monde moderne a ses règles dont l'une des plus importantes est que l'on doit assumer les conséquences de ses actes et responsabilités. Toujours et sans dérobade. Cela vaut aussi bien pour les Etats, les entreprises que pour les individus. En conséquence, Abidjan a l'impérieuse obligation de laisser la juge française mener tranquillement son enquête. A moins que le pouvoir ne penche pour un arrangement. Comme ce fut le cas avec Trafigura. Mais avec, dans ce cas, les rapatriés français dans la position de bénéficiaires. Il n'y a pas une troisième voie.



Honoré Sépé

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