samedi 23 juin 2007 par Fraternité Matin

Le président du Mouvement des citoyens de Côte d'Ivoire, maire destitué de Lakota, crie son indignation et accuse. Vous auriez quelques difficultés d'ordre sécuritaire. Pouvez-vous nous dire de quoi il s'agit?
Depuis jeudi dernier (31 mai), ma sécurité rapprochée a été rappelée à sa base et subitement il se pose à moi des problèmes de sécurité. Depuis ce jour-là, je suis menacé de mort par des gens anonymes. Comment cela se fait-il?
Ils le font par téléphone. Ce sont des coups de fil anonymes que je reçois et mes interlocuteurs menacent de me tuer. La chose s'est passée simultanément, c'est-à-dire au même moment que ma garde a été retirée. Je veux être clair. Je ne me plains pas de ce que cette garde ait pris fin. D'autant que ce sont ceux qui me l'avaient affectée, qui me la retirent. Apparemment, cela est normal. Mais ce que je ne comprends pas, c'est que personne ne m'a prévenu que les policiers qui assuraient ma sécurité seraient retirés. Et depuis qu'ils sont partis, je reçois des menaces de mort. Je trouve cela étonnant. A votre avis, qui vous menace?
Je ne sais pas. Si seulement je les connaissais, je n'en aurais pas fait un problème. Je saurais comment traiter la question. Mais je suis dans une situation où des gens m'appellent, sans décliner leur identité, et annoncent ma mort. En quels termes vous menacent-ils?
Ils disent : C'est moi qui vais te tuer Tu va mourir bientôt. Nous allons te tuer, On va te faire la peau. Nous savons où tu habites, La fin de ta vie n'est plus qu'une question d'heures. Les coups de fil se suivent et se ressemblent. Voilà pourquoi je pense qu'il est bon que j'en parle et que la Côte d'Ivoire le sache. A votre avis à quel besoin répondent ces menaces?
Je pense que l'on veut me déstabiliser. Vous déstabiliser pourquoi ?
Je ne sais pas si je gêne quelqu'un (rires). Je suis un Ivoirien et je pense que pour mon pays, je dois parler. Si j'observe quelque chose qui ne va pas, je dois le dire. J'ai des idée pour mon pays, j'ai une ambition pour mon pays. C'est cette ambition que j'exprime ou que je veux exprimer. Et je vais l'exprimer encore davantage les jours prochains. Je ne sais pas qui je dérange. La sécurité rapprochée qui vient de vous être retirée, quand et comment l'avez-vous acquise?
Je l'ai eue il y a plus d'un an quand Joseph Dja Blé était ministre de la Sécurité. J'avais répondu à une invitation qu'il m'avait adressée alors qu'on lui avait raconté que je refuserais de le rencontrer. Mais j'ai répondu à l'appel d'un ministre de la République. Et c'est à lui que j'avais exprimé mes inquiétudes. Car ce type de menaces m'avait déjà amené à quitter le pays. C'est comme cela qu'il m'avait affecté cinq policiers. Puis après, deux avaient été rappelés. Ce sont les trois autres qui viennent de partir, sans que personne en parle avec moi. Ce que je trouve curieux, ce sont les menaces que je reçois depuis ce jour. Au départ, je pensais que des gens voulaient bluffer. Mais comme la chose dure une semaine, je pense que ça peut être sérieux. J'ai donc décidé d'en parler publiquement. Avant d'en parler publiquement, avez-vous approché le ministère de la Sécurité qui vous avait affecté les policiers?
La démarche que j'ai eue est que si les autorités ivoiriennes ont décidé de m'enlever la garde sans m'entendre ou sans discuter avec moi, il me fallait m'en remettre à l'ONUCI. C'est ce que j'ai fait. J'ai été les voir. Ils m'ont bien reçu. Je leur ai adressé une correspondance dont j'attends la réponse. Une chose est qu'on vous enlève votre garde rapprochée, une autre est que des anonymes vous menacent. Avez-vous saisi l'autorité compétente pour vous plaindre des menaces?
Oui, j'ai écrit au Premier ministre, à la gendarmerie, au ministre des Droits de l'Homme. Quelle suite ces autorités ont-elles donné à vos écrits?
Rien encore. Rien jusqu'à ce jour (8 juin. Ndlr).
Depuis, comment gérez-vous vos mouvements?
Avec beaucoup de sérénité. Bien sûr, il faut tenir compte de ces menaces, mais je ne me laisse pas déstabiliser par des gens qui n'ont pas le courage de leurs actes. Monsieur le président du Mouvement des citoyens de Côte d'Ivoire, pensez-vous que ces menaces peuvent être liées à votre candidature à l'élection présidentielle prochaine?
Oui, je le pense. Sans aucun doute. Ces menaces, à mon avis, sont liées à mes activités politiques et particulièrement à ma candidature à la Présidence de la République. Vous voulez dire qu'un autre candidat pourrait être gêné par votre candidature ?
Je pense qu'il y a des gens dans ce pays qui ne veulent pas entendre parler de ma candidature. Cela les dérange par trop. Moi, je suis candidat à l'élection présidentielle prochaine. Et ma candidature ne doit faire l'objet d'aucune discussion avec qui que ce soit. Pensez-vous donc que les autres candidats à la Présidence vous en veulent?
Oui. je le pense. Ce sont eux qui sont gênés. Si je m'en tiens aux propos qui me sont adressés, ça ne peut être qu'eux que ma candidature choque. Quels sont ces propos ?
Ils disent : Toi tu dis que tu es candidat ? Gbagbo est candidat et toi aussi tu es candidat ? On doit te faire la peau. Selon vous, le nom du Chef de l'Etat a été prononcé. Pensez-vous vraiment que votre candidature peut le gêner et qu'il puisse vous menacer?
Je ne sais pas. Mais je pense que le Président de la République ne tomberait pas dans de telles bassesses. Ce sont peut-être des gens qui l'aiment et qui croient jouer leur rôle en me menaçant. Mais je ne pense pas que le Chef de l'Etat le leur ait demandé. Si vous voulez, ce sont des gens qui veulent être plus royalistes que le roi. Qu'ils sachent que leurs menaces n'engagent qu'eux. J'affirme que je ne suis pas du tout certain que le Président de la République les ait envoyés. Ce sont eux qui pensent que Gaza Gazo ne doit pas être candidat contre Laurent Gbagbo. Et moi, je demande en quoi c'est un crime que je sois candidat contre Laurent Gbagbo. Pourquoi les candidatures de Konan Bédié, Alassane Ouattara et autres ne gênent pas ? Avez-vous porté plainte contre X pour les menaces?
J'ai porté plainte. Car, vous savez, c'est embêtant (excusez-moi le terme) qu'un citoyen soit tranquille et qu'on veuille le déranger par ce genre de petites choses. Quels sont vos rapports avec Lakota ?
(Rires). Je suis le maire en exercice de Lakota. Mais vous en avez été destitué. Non, pas du tout. La Côte d'Ivoire est un pays de droit comme on a coutume de le dire. On ne doit pas, au nom du droit, faire une chose quand ça nous arrange et faire le contraire quand ça ne nous arrange pas. Le FPI à Lakota fait un mélange de genres incompréhensible. Il se veut les justiciers alors qu'il foule aux pieds tout ce qui est règlement. C'est lui qui est au pouvoir et la moindre des choses était d'observer les règles. Ils sont au pouvoir et ils empêchent les gens d'exercer leurs droits. Mon droit est que je suis élu maire de Lakota. Par des effets politiques, un conseil municipal ne peut pas démettre un maire. Cela est de notoriété publique. Pourquoi ne peut-on pas observer cela à Lakota ? Quelle que soit la nature des plaintes qu'on formule contre son maire, il est impossible de le démettre devant la loi de notre pays. C'est donc un groupe de petites personnes qui s'agite autour d'une mairie détenue par Gaza Gazo parce qu'il a dit qu'il n'est plus maire du FPI. Justement, est-ce qu'en partant du FPI vous ne partez pas avec le titre de maire?
Mais non (rires). Je vous donne un exemple. A Gagnoa, le maire RDR, M. Gnohité, est parti de son parti. Est-il pour autant parti avec son titre de maire ? Non ! Est-ce que c'est parce qu'on est à Lakota qu'il faut faire autrement? Je demeure le maire de Lakota.
A quand remonte votre dernière visite à Lakota ?
Il y a un mois que j'étais dans ma commune. Et votre parti, le Mouvement des citoyens de Côte d'Ivoire
(MCCI) ?
Le parti se porte très bien. Ceux qui glosent ont tort. Ils seront surpris. Un parti est créé pour aller à la Présidence de la République. Il y a des précautions à prendre. Ces précautions valent mieux que de faire un feu de paille. Maintenant, je suis prêt, j'ai les hommes qu'il faut pour dire que je vais à la bataille présidentielle. Nous avons des intellectuels avec nous. Nous avons atteint un nombre de cadres suffisant capables de rivaliser avec tous les autres.

Interview réalisée par
Pascal Soro

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